Yamabuki, Aki Shimazaki
Yamabuki, avril 2014, 144 pages, 13,80 €
Ecrivain(s): Aki Shimazaki Edition: Actes Sud
Zakuro Toda est une jeune femme japonaise, partisane de l’égalité entre les sexes, du libre choix de son futur époux. Elle est la nièce de Mme Aïko Toda qui va fêter bientôt son anniversaire de mariage avec Tsuyoshi Toda, rencontré il y a déjà quelques décennies.
Pour assurer son choix, elle décide de prendre conseil auprès de sa tante, femme mûre et expérimentée. En apprenant la future visite de sa nièce, Aïko Toda remonte le fil de ses propres souvenirs, de sa jeunesse dans le japon de l’après-guerre, marqué par l’occupation américaine, le sort des prisonniers de guerre japonais détenus en Sibérie, et dont on ne sait s’ils sont toujours vivants ou exécutés. Elle se souvient des usages du Japon d’alors, de la bonne éducation que l’on doit acquérir pour trouver un mari. On y apprend qu’elle admire son époux, salarié d’un entreprise prestigieuse. Il voyage, se comporte comme un samouraï, sert les intérêts de son pays, contribue à sa restauration. L’auteure décrit les aspects de la vie quotidienne d’alors, le poids du miaï, sorte d’institution des mariages arrangés, qui pesait sur les destinées des Japonaises…
« En réalité, il n’y a rien de moderne dans la façon dont Zakuro et Toshio se sont rencontrés. Après tout, c’est un miaï, comme dans le cas de mon premier mariage avec H (…) Ce qui me semble curieux, c’est qu’une fille aussi libérée que Zakuro compte sur autrui pour trouver son futur compagnon ».
Elle y décrit, avec une tendresse certaine, le poids des traditions dans la vie du japon d’alors, l’apprentissage de la cérémonie du thé, la maîtrise de l’art de l’Ikebana.
« Elle m’explique tout en continuant d’arranger les fleurs : – A cause de l’esprit militariste et de la guerre, nous avons perdu nos traditions artistiques ».
Les deux destins de ces femmes semblent à l’origine bien dissemblables ; pourtant, Aki Shimazaki dessine un parallèle entre Zakuro, jeune femme éprouvée par les abandons de son fiancé, un soutien inattendu qu’il apporte à l’implantation d’un site industriel au cours d’une réunion publique, et celui de sa tante Aïko. Cette dernière évoque longuement la vision qu’elle a de son futur fiancé, dans un train entre Fukuoka et Tokyo. Elle est séduite, et reçoit de la part de ce jeune homme un billet l’invitant à le contacter… Elle songe également à son premier mariage, complètement raté, qui lui a fait prendre une distance sérieuse avec l’institution. Pourtant, cet homme l’épousera, en dépit de son infertilité.
Le roman est écrit avec un style très simple, dépouillé, des phrases courtes qui percutent. Il illustre à merveille la permanence de la recherche du bonheur au travers des époques, des cultures, des vies marquées par l’histoire immédiate.
Stéphane Bret
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