Vivian Maier, À la surface d’un miroir, Paulina Spucches (par Arnaud Genon)
Vivian Maier, À la surface d’un miroir, Paulina Spucches, éditions Steinkis, novembre 2021, 151 pages, 22 €
Vivian Maier, en peinture
Dans les quelques publications récentes autour de Vivian Maier (catalogue de l’exposition au Musée du Luxembourg, essais biographiques de Françoise Perron et de Ann Marks qui retracent sa vie et interrogent son œuvre), le livre de Paulina Spucches occupe une place particulière. Il s’agit d’un roman graphique, le premier livre de la jeune autrice, âgée de 21 ans, qui a découvert le travail de Maier lors d’une exposition à San Sebastian en 2019. Elle créé ici un dialogue inattendu mais bienvenu entre l’art photographique, celui de Vivian Maier et la bande-dessinée, mais aussi entre le biographique et la fiction, raison pour laquelle le livre n’a pas été approuvé par la succession de Vivian Maier, la collection Maloof ou la galerie Howard Greenberg.
On est sensible, dès les premières planches, à la beauté et à la qualité du dessin, très coloré, très vif. Les scènes de rue sont celles que traquait Vivian Maier et renvoient à certains de ses célèbres clichés dont Paulina Spucches imagine le contexte dans lesquels ils furent saisis. L’autrice se focalise sur des périodes précises de la vie de la photographe, notamment son arrivée en tant que nounou dans une famille new-yorkaise, les Ward, puis celle à Chicago, dans la famille Gensburg, où elle s’occupera de trois jeunes garçons qui, lorsqu’elle se retrouvera sans travail et dans la précarité, l’aideront à la fin de sa vie. La dessinatrice consacre aussi plusieurs pages au voyage de Maier au Champsaur où elle retourna pour vendre le domaine de Beauregard que lui avait légué sa grand-tante. Par l’intermédiaire de plusieurs flashback, l’autrice revient par ailleurs sur l’enfance difficile de la photographe, entre un père qui ne s’intéressa jamais à elle et un frère que sa mère n’arrivait pas à gérer, même si elle connut, au Champsaur, des moments plus heureux. Le roman graphique se termine par la découverte, par John Maloof, des photographies de Maier qu’il achète lors d’une vente aux enchères. Il ne prendra la mesure du talent de la photographe que quelques mois après sa mort…
Si le livre, dans son ensemble, reste trop elliptique pour s’approprier la vie et l’œuvre de Maier, il n’en demeure pas moins un bel objet, très esthétique, à la frontière de l’imaginaire et de la biographie, qui comblera ceux qui connaissent déjà bien le travail de Maier. Eux seuls, familiarisés avec ses images, reconnaîtront, transformés et métamorphosés par le talent de Paulina Spucches, celui d’une des plus grandes photographes du XXe siècle.
Arnaud Genon
Autrice et illustratrice Franco-Argentine, Paulina Spucches publie un premier roman graphique dédié à la figure de Vivian Maier, photographe découverte après sa mort. Dans des couleurs vives, Vivian Maier, A la surface d’un miroir (éd. Steinkis), la Française raconte le destin secret de cette grande photographe attachée aux scènes de rue.
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