Une saison à Gaza, Katia Clarens
Une saison à Gaza, voyage en territoire assiégé, avril 2011, 339 p. 19€
Ecrivain(s): Katia Clarens Edition: Jean-Claude LattèsJ’avais oublié que le livre avait un sous-titre : voyage en territoire assiégé… En ouvrant ce livre, je pensais y trouver un témoignage, bien sûr, Katia Clarens dit ce qu’elle a vu, bien sûr la vie est difficile pour les Gazaouis, c’est une évidence, mais comme on dit il ne s’agit pas de ça, bien sûr, mais j’ai eu beaucoup de mal à me remettre de ce livre, beaucoup de mal à faire la part des choses, beaucoup de mal à me tenir quitte de cette impression de retrait, de défensive quand on présente ainsi tous les torts dans le même plateau. Il n’y a pas d’équilibre possible, et pas de possibilité d’équilibre – même et surtout dans ce divorce à l’amiable et non au mieux disant appelé par nombre d’Israéliens –, il n’y a pas de paix possible, et ce livre quoi qu’il en dise, ne porte pas de message de paix. Il statue : aux « autres » de faire le premier pas, de lâcher du lest, de relâcher la mise.
Il me semble qu’un reporter, immergé à Ashkelon ou Beersheba, zones privilégiées des tirs du Hamas depuis Gaza, aurait pu, de la même manière, rapporter ces faits.
Katia Clarens émet bien quelques réserves sur le mode de vie des Gazaouis en accord, il faut le préciser, avec leur culture, notamment quand elle rencontre un dirigeant modéré qui n’hésiterait pas à quitter sa femme s’il la voyait fumer, ou sur l’enfermement des femmes dans leur niqab ou dans leur maison ou leur pays, les frères, pères ou oncles leur refusant le droit aux études ou à quitter le pays pour étudier à l’étranger, mais quand un membre du comité de résistance populaire armé déclare « notre premier objectif est de satisfaire notre Dieu, Allah. Le second est de libérer notre terre par tous les moyens, de combattre les Israéliens jusqu’à ce qu’ils partent » (p. 144), ou (p. 151), en face du ministre des Affaires étrangères du Hamas « il évoque ensuite la libération de Jérusalem, la résistance légitime à l’occupant israélien, puis son désir de voir émerger une internationale islamique »… : pas de commentaire…
Lorsqu’elle visite Israël avec des amis sans carte de presse et qui n’ont donc pas droit d’entrée à Gaza, parenthèse dans son séjour, Katia Clarens décrit Jérusalem de façon lapidaire et faussement naïve – du moins peut-on espérer que tel est le cas– : « Dès l’entrée, la ville montre son caractère dogmatique. Aux arrêts de bus se pressent des groupes d’orthodoxes juifs… (…) Le vendredi au coucher du soleil, après qu’une sirène a annoncé dans toute la ville le début du repos hebdomadaire que les Juifs appellent sabbat, ils forment un flot déferlant au pas de course à travers la vieille ville en direction du mur des Lamentations ».
En guise de ré-conciliation, pour élargir cette « histoire de famille(s) » et terminer, plutôt que sur une condamnation, sur un sourire qui porte peut-être plus d’enseignements sur la voie de la paix que le poème de Victor Hugo cité par Katia Clarens en guise d’épilogue : Dieu apparaît à un commerçant juif. Celui-ci lui demande quelle est selon lui, la meilleure religion, à quoi Dieu répond « Aucune, moi, je ne suis pas religieux ».
Anne Morin
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