Une autobiographie, Neil Young
Une autobiographie, octobre 2012, 546 pages, 23 €
Ecrivain(s): Neil Young Edition: Robert Laffont
Le mot digression est celui qui vient à l’esprit quand on referme cette autobiographie. Neil Young a en effet opté pour une construction thématique plus que chronologique pour écrire ses souvenirs d’une vie riche à différents titres. D’un chapitre à l’autre, le chanteur passe de la musique au cinéma, de la pureté oubliée du son actuel produit par les fichiers informatiques aux voitures anciennes qu’il collectionne, de sa famille à son train électrique. Cette autobiographie est un kaléidoscope qui, si elle fait fi de toute chronologie, ne nous perd jamais. Neil Young sait raconter les événements qui ont ponctué sa vie, et sa vie fut riche, assurément. L’ex-membre de Buffalo Springfield maîtrise cet art sans jamais se départir de son sujet : montrer qui il est devenu en donnant les différentes facettes de sa personnalité.
La musique est cependant l’élément fondateur du personnage. Avec Buffalo Springfield tout d’abord, il fit un apprentissage formateur, ou seul, comme lors de certains concerts durant lesquels il s’accompagnait à la guitare acoustique et à l’harmonica. Ce génial Canadien a subi les influences de la country music, du rock, et il admire tout autant Bob Dylan qu’il a côtoyé, qu’Elvis Presley. Il croise un certain John Kay, qui chantera Born to be wild avec Steppenwolf. Sur scène, il jouera avec Joni Mitchell, Linda Ronstadt.
La façon dont il compose est matière à réflexion dans plusieurs pages. L’époque bénie au cours de laquelle les titres venaient d’eux-mêmes, guitare en main, avec des textes qui colleront parfaitement aux mélodies, semble, à en croire le chanteur, liée souvent « à la fumette », pour reprendre une expression qui revient souvent, et à un mode de vie entièrement dévolu à la musique. Mais l’actualité a aussi inspiré Neil Young comme pour Keep on Rockin’ in the free world qui fut inspirée par la chute du mur de Berlin. L’inspiration dont il fit preuve est pour lui comme un mystère, n’expliquant pas l’origine profonde des mélodies ou des textes.
Mais il y a surtout eu le Crazy Horse, ce groupe mythique qui, dit-il, a contribué à l’éclosion de sa musique. Le groupe a permis au chanteur de mettre en place les titres qui ont marqué l’histoire de la musique américaine. « Il y avait simplement l’amour, la musique, la jeunesse, la vie. Le temps du bonheur. C’est ça, Crazy Horse ». La cohésion du groupe, une base rythmique exemplaire, un état d’esprit guidé par le seul amour de la musique, ce furent là les ingrédients essentiels qui firent des albums de Neil Young l’expression d’une époque, d’une sensibilité et d’une intégrité sans faille.
Quand Neil Youg évoque tous ceux qui l’ont accompagné tout au long de ces quarante années, la tristesse du propos est palpable ainsi que sa gratitude quand il dresse le portrait de ceux qui ne sont plus là. Et ils sont nombreux, accidents, maladie ou overdose les ayant emportés. Neil Young est ici comme le rescapé d’une époque révolue.
C’est le récit d’un amoureux de la vie, qu’il a vécue intensément, dirigée par la création musicale, un amoureux du son aussi quand il se bat aujourd’hui contre un son dégradé par le mp3, et un mari et un père qui adore sa famille. Un personnage complexe, attachant, intègre, qu’on découvre tout au long de ces pages.
Neil Young a commis une œuvre de trente quatre albums. Canadien d’origine, il fit partie du Buffalo Springfield, de Crosby, Stills, Nash and Young avant une carrière solo qui le fit passer du folk à la country, du rock au blues.
Guy Donikian
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