Un secret, Magdalena, Elsa Oriol (par Yasmina Mahdi)
Un secret, Magdalena, Elsa Oriol, éditions L’Étagère du bas, septembre 2021, 32 pages, 14 €
Le pot-aux-roses
Dès l’ouverture de ce remarquable album jeunesse, riche de 32 pages, aux dimensions de 24,5 cm x 30,5 cm, le mot secret s’affiche sur la 2ème et la 3ème de couverture, sous forme de messages confidentiels, dépliés et froissés, assez nombreux (plus de 40). Ces bouts de papier relatent un morceau d’histoire de Paul et de Laura, les deux principaux protagonistes. L’on peut y lire Journal secret intime, ou pitié dis-moi ton secret, tu sais pas garder un secret, etc., griffonnés avec une écriture enfantine et colorée. La graphiste et illustratrice Elsa Oriol brosse de véritables tableaux, à la peinture à l’huile, ce qui est assez rare. L’on peut voir le jus de la matière pour le motif des cheveux, par exemple, le grattage du fond (des sols), le tout assorti de tons poudreux, mats, bistres, rehaussés de bleus ciel, de jaunes paille.
Il y a des scènes en gros plans dans lesquelles des groupes de jeunes personnes, fillettes et garçonnets, se meuvent, ou s’immobilisent, ou encore sont représentés assis en classe, occupant l’entièreté des doubles-pages de l’album. La trame de la toile apparaît par endroits, et de vastes passages ombrés sont apposés librement. Les écoliers de toutes origines, de toutes couleurs, se trouvent rivés autour de ce fameux secret. Sur la belle couverture, Laura empêche Paul de parler – Paul étant l’objet du pot-aux-roses. Au verso, sur la 4ème de couverture, le secret se referme, et sur fond blanc, une illustration détaillée de la classe entière clôt les illustrations.
Les premiers plans des corps sont parfois coupés de moitié, près du bord cadre, ce qui donne une perspective large et légèrement en surplomb. Les jambes seules, les pieds et les mains sont également parlants, des sujets à part entière, autant que les élèves de la classe saisis en plans américains. Le soin apporté aux détails vestimentaires en fait une image actuelle, où l’on reconnaît le style d’une mode contemporaine goûtée des enfants (et des parents).
Le texte écrit par Magdalena, simple, en forme de charade, de comptine, parle d’amitié, de confiance et d’amour. L’auteure aborde ainsi la problématique des premières amours. C’est Paul qui est le fil conducteur du récit, qui s’interroge. Des bruits courent, enclenchant presque des disputes, et des échanges agitent chacun des élèves. L’énigme va se résoudre à l’intérieur d’une boule de papier, le « pot-aux-roses » sera découvert ! Les émois et la révélation des désirs adolescents restent atemporels, mais sans doute abordés plus franchement, plus directement, sans tabous, comme l’écriture enlevée de Magdalena le confirme.
Notons un beau paysage de nature lequel offre un abri à Laura et à Paul. L’iconographie expressive et la plasticité des modèles les rapprochent des œuvres de l’art contemporain. Ce livre-jeunesse est accessible dès l’âge de six ans.
Yasmina Mahdi
Elsa Oriol, née à Paris en 1967, est une illustratrice française. Elle a travaillé dans l’architecture d’intérieur avant de se consacrer définitivement à la peinture et à l’illustration. Elle vit à Paris.
Magdalena, professeure des écoles pendant 15 ans, est l’auteure de nombreux ouvrages chez Flammarion, dont les albums Léon et son croco ; Un, deux, trois, Sorcière ! ; Blanc bonhomme de neige. Elle est également connue pour les séries 24 petites souris, Bali et Je suis en.
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