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Trente-neuf tankas rouges (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres 13.09.21 dans La Une CED, Ecriture, Création poétique

Trente-neuf tankas rouges (par Didier Ayres)

 

(…) et rouge comme ce dont je ne parviens

pas à me souvenir

Je dirai que je suis tombé.

Roland Dubillard, Limoges/Poitiers

Réalisé grâce au soutien de la région Nouvelle-Aquitaine

 

1. Telle la nuit

Qui reste mon habitation

Au-dehors la lumière

 

Un demi-cercle

Pauvre comme le sommeil.

2. Mon angoisse me ressemble

Ainsi le maître

À travers le travail du destin

 

De grandes fumées rouges

Dans un miroir.

 

3. Mes yeux se portent sur le soir

Quels gardiens

Dans le temple étrange

 

Je ne distingue rien

Comme si je cessais d’exister.

 

4. Le village

Je pourrais en mourir

Regardant la fenêtre blanche

 

Cependant rien n’existe ici

L’image pure seulement.

 

5. Dimanche

Quel siècle écarlate

Dans ce récit

 

Ton être est mon être

Et avec nous l’univers.

 

6. La somme des eaux

Des galaxies herbeuses

Rien comme la mélancolie

 

Mon cœur n’est personne

Viens-tu ?

 

7. Viens avec moi dans le sentier

Là où croissent des arbres de sel

Tout sera pourpre ou noir

 

Comme ce petit drapeau

Le temps brûlé.

 

8. Le silence

Où disperse-t-il

La durée ?

 

L’esprit est court

Au milieu du vertige.

 

9. Les nuits ne disent rien

Ni mes yeux

Ni le ciel si pauvre et si simple

 

Qu’ai-je appris de l’ancienne étoile

Un voilier fait d’orchidées et de lumière ?

 

10. Dans la nuit glacée

Il y a davantage de nudité

Ce théâtre clair

 

L’hiver nous y retrouve

Et avec lui les chemins.

 

11. Les nuits et les jours ne se succèdent pas

Seul au sein des flammes

Mon cœur fut abîmé

 

Je ne connais aucune langue

Mais l’orgueil de la durée.

 

12. Papillons du premier cercle

Qui se battent

Avec le sommeil

 

Que sont ces rectangles d’or

Ces oiseaux vertigineux ?

 

13. Ce n’est pas mourir

La fleur de l’acacia

Dans ce jardin de cendres

 

Le silence

Minuit.

 

14. J’ai bu le crépuscule

Là où le seigneur est destin

La journée dès lors est un disque

 

Rêverie des labyrinthes

Ivresse de l’invisible.

 

15. Que reste-t-il

Ta voix

Ton angoisse intellectuelle

 

Entendre les choses

Le vide la mort ?

 

16. L’abeille cogne dans le verre

Prise dans les sucres de l’alcool

Il est cinq heures

 

Toute la nuit j’ai marché en moi

Quel dieu brûlant m’a aidé ?

 

17. La nuit vient

Ainsi que les merveilles de l’anxiété

Figeant la beauté glaciale du torrent

 

Herbes hautes à minuit

Des couronnes d’or sur la chemise du matin.

 

18. Nous nous dirigeâmes

Dans l’averse

Au sein des eaux blanches

 

Mon âme fût-elle

Prise par la pluie entière ?

 

19. J’ai mélangé le sel et l’amertume

Sorte de coquelicots noirs

Où brille une bizarre constellation

 

Tout a jailli

Comme un cheval armé.

 

20. Que fut le très impossible sommeil

Un oiseau rouge

Mon visage de pierre ?

 

Suis les Argonautes

Et leur manteau de lumière.

 

21. Dans la cathédrale de notre chambre

Va et vient la peine

Le destin universel

 

Le poème

Comme le ferait un mirage.

 

22. la gravité de l’angoisse est telle

Qu’elle chante l’apocalypse

En des termes nouveaux

 

Fin de soi

Dans le lac rouge.

 

23. Il n’y a pas de silence

Où le ciel gît en miroir

Qui descend vers le soleil

 

Ici dans la ruelle

Aussi grande que l’école.

 

24. Parfois il faut mourir

Quand la chambre s’illumine

Et disparaître

 

Le pourrais-tu

Anxieuse maison ?

 

25. Je suis nocturne et définitif

Parmi mille moments

Dans l’astre inouï

 

Solitude

Flamme qui détruit le temps.

 

26. C’est le rêve d’une aurore

Le triste néant

Le ruisseau froid

 

Qui glisse depuis l’est

Attendant le nouveau crépuscule.

 

27. Les nuits sont devenues poreuses

Qui cachent le mystère

Une histoire profonde

 

Est-ce mieux qu’un arc de feutre

Ce tablier du soir ?

 

28. La mort est venue

Seule dans la maison jaune au coin de la rue

Est-ce la sombre voix du mal

 

Que je ne peux décrire

Quand ici séjourne l’étang de la mélancolie ?

 

29. Tel un oiseau de glace

Qui dessine une oblique

Dans le grand néant elliptique

 

Un gypaète descend droit sur la rue

Où la mort fut battue.

 

30. Il fallait donc boire la gentiane

La jonquille rêveuse

L’ordre

 

Nos regards vers la divinité

Si belle parmi les fleurs.

 

31. Quel est-il le froid glacé de l’âme

Est-ce ce rameau d’orchidées

Ou peu à peu la rivière ?

 

J’ai pleuré plusieurs fois

Au milieu du conflit de la nuit.

 

32. Mes doigts furent brûlants

Touchant à la fièvre

Des lignes et des cieux pourpres

 

La rue et son drapeau

L’oiseau éternel de mai.

 

33. Demi-cercle de la pluie

Comme sont les attelages

Ainsi que les abeilles

 

Je m’achemine

Vers les citronniers et l’énigme.

 

34. Empreinte de tes yeux

Là où séjourne le disque de la vie

Quelque naissance sublime

 

Nous voulûmes renaître

Mais vivre la vérité.

 

35. Le verger porte ses fruits d’argent

Comme seules les destinées

Les îlots de la connaissance

 

Mon âge est un archipel

Où tanguent les heures mortelles.

 

36. Attendre est une chance

Et l’éparpillement de certaines averses

Avec celles des héliotropes

 

La beauté est devenue nôtre

Partageant la chambre du temps.

 

37. Quelle est cette épée de glace sur nos poitrines

Ressemblant à des œuvres de titane

Et toute cette majesté intentionnelle ?

 

Nul corps obscur

Dans l’être au flacon noir.

 

38. Ici se constitue un monde de cuivre

Cette demeure les équidés le rêve

La clarté du sujet

 

Cependant l’univers se détruit durant mon sommeil

Auquel je préfère le chœur gigantesque des choses.

 

39. Ma vie est ce corps violent

Trouvé seulement par la pensée

Se ferme ainsi la maison de fer

 

Trois œuvres successives

Dans la force naturelle des idées.

 

St-Junien, 25 mai 2021

 

Didier Ayres

 

Je remercie l'ALCA- Nouvelle-Aquitaine qui a permis la réalisation de ce texte


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A propos du rédacteur

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Rédacteur

domaines : littérature française et étrangère

genres : poésie, théâtre, arts

période : XXème, XXIème

 

Didier Ayres est né le 31 octobre 1963 à Paris et est diplômé d'une thèse de troisième cycle sur B. M. Koltès. Il a voyagé dans sa jeunesse dans des pays lointains, où il a commencé d'écrire. Après des années de recherches tant du point de vue moral qu'esthétique, il a trouvé une assiette dans l'activité de poète. Il a publié essentiellement chez Arfuyen.  Il écrit aussi pour le théâtre. L'auteur vit actuellement en Limousin. Il dirige la revue L'Hôte avec sa compagne. Il chronique sur le web magazine La Cause Littéraire.