Scholomance, Tome 1 Éducation meurtrière, Naomi Novik (Par Didier Smal)
Scholomance, Tome 1 Éducation meurtrière, Naomi Novik, éd. J’ai Lu, avril 2023, trad. anglais (USA) Benjamin Kuntzer, 384 pages, 8,60 €
Edition: J'ai lu (Flammarion)
La carrière éditoriale de l’Américaine Naomi Novik vient d’entrer dans une troisième période. La première fut celle de la remarquable série Téméraire (2006-2016), une rencontre en neuf tomes entre Cecil Scott Forester et Robin Hobb, pour faire très bref. La deuxième fut composée de deux romans sublimes : Déracinée (2015) et La Fileuse d’argent (2018), deux histoires qui plongeaient dans le folklore de l’Est de l’Europe, tant yiddish que slave, proposant chacune la destinée d’une jeune femme confrontée à une magie terrifiante et pourtant magnifique ; deux romans multi-primés, deux chefs-d’œuvre d’une fantasy plongeant aux racines du genre, en l’occurrence le conte (dans le genre, on ne voit que la Trilogie d’une nuit d’hiver de Katherine Arden à posséder autant de grâce et de puissance narrative).
La troisième période est donc la période Scholomance. En toute logique, puisque la Scholomance est une école légendaire de magie noire supposément située en Roumanie, cette série de romans a pour cadre, du moins le premier tome, Éducation meurtrière, une école de magie où l’on obtient son diplôme avant tout en… survivant ! Normal : le moindre recoin de l’école semble peuplé de créatures retenues au terme d’un concours de cauchemars plus ou moins imbibés (ainsi des « ersatz », qui peuvent prendre la forme d’objets inanimés qui en deviennent… animés des pires intentions !), et y échapper relève de la magie de haut vol – apprise sur le tas de grimoires ou presque.
Tout cela laisse l’impression d’un Harry Potter dont l’héroïne, Galadriel, mi-Galloise, mi-Indienne (mais admise dans aucune des deux communautés et munie d’un pouvoir au fort potentiel destructeur), tente de s’en sortir tant grâce à son mauvais caractère qu’à ses connaissances en magie. Et ça laisse un peu sur sa faim… Car, outre que la répétitivité guette, le lecteur est prié de faire confiance à Novik pour lui dévoiler les véritables enjeux du récit dans les deux tomes suivants – ainsi de cette histoire d’enclaves, autrement dit de communautés magiques disséminées à travers la planète parmi la population mais semblant en grande tension politique, demanderait à être éclaircie.
Par ailleurs, il faut convenir que Scholomance, contrairement à Téméraire, est plutôt à réserver à un public de jeunes adultes, comme on dit de nos jours, un peu à l’image de la Trilogie de Bartiméus de Jonathan Stroud – ce qui lui offre néanmoins une compagnie appréciable ; contrairement aussi et surtout à Déracinée et La Fileuse d’argent, Novik semble avoir ici préféré les effets de manche, certes plaisants et efficaces, à la profondeur du récit. Mais on lui laisse le bénéfice du doute, en attendant de lire les deux autres tomes de Scholomance.
Didier Smal
Naomi Novik (1973) est une autrice de fantasy américaine, dont l’œuvre a été primée à de multiples reprises.
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