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Sainte Caboche, Socorro Acioli

Ecrit par Cathy Garcia 12.04.17 dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Langue portugaise, Roman

Sainte Caboche, Belleville éditions, mars 2017, trad. Portugais (Brésil) Régis de Sá Moreira, ill. couv. Fernando Chamarelli, 242 pages, 19 €

Ecrivain(s): Socorro Acioli

Sainte Caboche, Socorro Acioli

 

C’est un vrai régal cette Sainte Caboche, premier roman publié par ces prometteuses éditions Belleville, qui offrent une particularité, celle de publier une littérature d’ailleurs, populaire et connectée, ce qui permet de découvrir et approfondir via internet différentes thématiques de l’ouvrage. Dans celui-ci, on retrouve toute la tendresse, la simplicité, l’autodérision et la ferveur de l’âme brésilienne, et tout particulièrement celle de la région la plus pauvre du pays, le Nordeste. Illustré par de belles impressions en noir et blanc d’Alexis Snell, qui rappellent, et ce n’est pas un hasard, les gravures de la littérature de cordel, Sainte Caboche nous offre aussi des glissades vers le fantastique, ce réalisme magique cher à la littérature latino-américaine. On y retrouve aussi tous les contrastes de cette terre, notamment entre une forte et souvent naïve aspiration de la population au mysticisme et la mégalomanie des notables si facilement corruptibles. C’est un roman tout plein de coração, qui sous sa simplicité apparente ne manque pas pour autant de profondeur. Le style en est limpide comme un ruisseau.

Samuel vient de perdre sa mère, depuis longtemps malade, la presque sainte Mariinha, et celle-ci lui a fait promettre, avant sa mort, d’aller de Juazeiro do Norte, où ils vivent, à Candeia, pour y retrouver sa grand-mère et son père qu’il n’a jamais vus, et aussi d’aller déposer une bougie au pied des statues de trois saints hommes : celle du padre Cicero à Juazeiro, et celles de St Antoine et St François qui sont voisines à Candeia et Canindé. Samuel marche nuit et jour sur les routes qui traversent le sertao hostile, avec en poche une adresse, animé surtout par la rage et le vif désir de tuer son père, celui qui les a depuis toujours abandonnés, lui et sa mère. Il arrive à Candeia, sale, dépouillé, affamé, pitoyable, pour y trouver un village délabré quasi abandonné et une grand-mère recluse dans sa maison qui refuse de l’y accueillir ou de répondre à ses questions. Elle l’envoie chercher abri plus loin. Attaqué par des chiens sauvages, l’abri en question dans lequel il se réfugie est une sorte de sombre grotte, en réalité la tête géante d’un St Antoine décapité, dont le corps domine le village depuis le haut d’une colline. Blessé, fiévreux, Samuel devra sa survie au fait que la tête sert aussi de planque de revues pornographiques pour un jeune garçon du village, Francisco. Donnant, donnant : Samuel garde le secret des revues, en échange Francisco lui apportera médicaments et nourriture. Mais voilà que dans cette tête, Samuel se met à entendre des voix, il entend toutes les prières des femmes des alentours, parfois jusqu’à la cacophonie, principalement des prières pour obtenir le mari qu’elles désirent. St Antoine étant considéré comme la cause du déclin du village, nul n’ose le prier ouvertement. Et puis il entend une voix de femme qui chante aussi, tous les jours, à 5 heures du matin et 5 heures du soir, magnifique, dans une langue qu’il ne reconnaît pas.

Cette faculté, dont Samuel est le premier étonné, va entraîner un enchaînement d’évènements des plus heureux aux plus saugrenus qui vont faire revivre Candeia, mais qui vont finir par mettre en péril la vie même de Samuel. Samuel, seul au monde, qui n’a pas oublié sa quête initiale. Or le destin est un bon marionnettiste et le hasard, on le sait, est censé bien faire les choses. Sainte Caboche sait habilement distiller le secret et les révélations, on ne s’ennuie pas une seconde. Il y a quelque chose de vraiment cinématographique dans ce roman, sans doute parce qu’il est très imagé, riche en couleurs et en saveurs, il redonne toute sa pleine valeur au terme « populaire ». On croque dedans comme on croquerait dans une papaye bien mûre et bien juteuse et c’est terriblement gostoso. Délicieux.

 

Cathy Garcia

 


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A propos de l'écrivain

Socorro Acioli

 

Socorro Acioli est née en 1975 à Fortaleza, au Brésil. Après avoir obtenu un master en littérature brésilienne, elle a commencé une carrière de journaliste, et a commencé à écrire à partir de 2001. Depuis, elle a publié 15 livres au Brésil, et notamment des biographies, des nouvelles pour enfants et des romans jeunesse. En 2006, elle a participé à un atelier animé par Gabriel Garcia Marquez à Cuba, et a été désignée lauréate de l’atelier par le Prix Nobel colombien avec son roman Sainte Caboche. Sainte Caboche est son premier livre paru en français.

 

A propos du rédacteur

Cathy Garcia

 

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Rédactrice

Domaines de prédilection : littérature française et étrangère (surtout latino-américaine & asiatique)

Genres : romans, poésie, romans noirs, nouvelles, jeunesse

Maisons d’édition les plus fréquentes : Métailié,  Actes Sud

 

Née en 1970 dans le Var.

Premier Prix de poésie à 18 ans. Premiers recueils publiés en 2001.

A Créé en 2003 la revue de poésie vive NOUVEAUX DÉLITS. http://larevuenouveauxdelits.hautetfort.com

Fin 2009, elle fonde l’association NOUVEAUX DÉLITS :

http://associationeditionsnouveauxdelits.hautetfort.com/

Plasticienne autodidacte, elle compose ce qu’elle appelle des gribouglyphes,  mélange de diverses techniques et de collages. Elle illustre plusieurs revues littéraires et des recueils d’autres auteurs. Travail présenté publiquement depuis fin 2008 et sur le net :

http://ledecompresseuratelierpictopoetiquedecathygarcia.hautetfort.com

Elle s’exprime aussi à travers la photo, pas en tant que photographe professionnelle, mais en tant que poète ayant troqué le crayon contre un appareil photo : http://imagesducausse.hautetfort.com/ Ce qui  a donné lieu à trois Livr’art visibles sur internet dans la collection Evazine :

http://evazine.com/livre_art.htm