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Roman

Avant le passage, François Emmanuel

Ecrit par Pierrette Epsztein , le Mercredi, 23 Octobre 2013. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Actes Sud

Avant le passage, octobre 2013, 96 pages, 12,80 € . Ecrivain(s): François Emmanuel Edition: Actes Sud

 

Le roman, Avant le passage, de François Emmanuel, nous embarque dans une divagation qui nous emporte et nous déporte. Nous quittons les rives tranquilles de la platitude des jours et nous partons pour un voyage à risques. Avec le narrateur, nous sillonnons des eaux agitées. On ne peut s’empêcher d’avoir devant les yeux l’image de la barque d’Arnold Böcklin qui conduit vers l’Île des morts. Le narrateur nous le confirme en affirmant : « je dérive à nouveau sur le radeau lumière ».

Dans un espace coupé du monde, confiné, nous naviguons sans cesse entre deux eaux. Entre le blanc trop blanc des murs d’une chambre d’hôpital et l’obscurité très noire des pensées du narrateur qui erre aux marges du royaume des morts. Entre quelques rayons de soleil des souvenirs de pays lointains, de moments joyeux, émouvants, rappelés, et la nuit de l’adieu à l’aimée brutalement arrachée à la vie dans un bruit assourdissant de ferraille fracassée. Entre le fleuve des enfers de la réalité et la terre silencieuse de paysages coutumiers. Entre la joie d’une main posée sur un front comme une présence maternelle bienveillante qui réchauffe et la tristesse de l’enfermement dans un corps qui ne répond plus. Entre l’oppression vécue dans une rêverie inquiète et la liberté rêvée, dépliée comme un fil que l’on tire. Entre le temps dilaté et menacé de sombrer dans le gouffre ténébreux de l’oubli et le temps resserré, suspendu, qui défile à toute allure.

Dernier été à Primerol, Robert Merle

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Mardi, 22 Octobre 2013. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Editions de Fallois

Dernier été à Primerol, 121 p 8,70 € . Ecrivain(s): Robert Merle Edition: Editions de Fallois

 

Il est ainsi des inédits dont la publication constitue un moment de bonheur. Il faut dire que ce petit livre concentre l’intelligence, l’élégance et la force de Robert Merle.

On est a la veille de la deuxième guerre mondiale. A l’extrême veille. En fait, dans son premier « chapitre » (il n’y a pas vraiment de chapitres mais des fragments) on est déjà dans la guerre. Cette période abrutissante et terrible des camps de transit où on a jeté Robert Merle et ses camarades. La douleur a porte un nom : la faim ! Ces quelque pages ne s’oublient pas, la faim est de toutes les tortures la pire pour l’homme, celle qui peut  changer sa nature même, l’avilir.

« En moins d’un mois, j’avais appris à la considérer, ma faim, comme un état normal. Je l’avais accueillie comme une habitude. J’en souffrais toujours, je ne m’en étonnais plus, j’avais faim comme d’autres sont boiteux. »

Une illusion passagère, Dermot Bolger

Ecrit par Patryck Froissart , le Mardi, 22 Octobre 2013. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Iles britanniques, La rentrée littéraire, Joelle Losfeld

Une illusion passagère (The Fall of Ireland), traduit de l’anglais (Irlande) par Marie-Hélène Dumas, août 2013, 133 pages, 15,90 € . Ecrivain(s): Dermot Bolger Edition: Joelle Losfeld

Quand Martin, haut fonctionnaire irlandais, accompagnant en Chine pour la célébration de la fête de Saint-Patrick le sous-secrétaire d’état au cabinet de qui il est attaché, se retrouve seul dans son hôtel, à Pékin, où l’a laissé son patron pour un jour ou deux, il loue, après avoir longuement tergiversé, les services d’une masseuse.

L’aventure est banalement triviale.

Les hôtels chinois, constate le narrateur, intègrent très naturellement ces prestations, dûment tarifées, dans l’éventail des offices disponibles.

Tout naturellement, Martin s’attend, avec une sourde excitation, à ce que l’officiante lui propose le massage spécial. Et en effet la jeune femme qui le rejoint dans sa chambre lui soumet, après une onctueuse friction qui lui procure un délicieux moment de plaisir, l’offre espérée.

Le récit aurait pu consister en une suite de tableaux érotiques, voire pornographiques, de ce qui se passe ordinairement en ces moments-là.

L’heure du chacal, Bernhard Jaumann

Ecrit par Victoire NGuyen , le Jeudi, 17 Octobre 2013. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Langue allemande, Le Masque (Lattès)

L’heure du chacal, traduit de l’allemand par Céline Maurice, 281 pages, mai 2013, 20,90€ . Ecrivain(s): Bernhard Jaumann Edition: Le Masque (Lattès)

 

Le passé n’est jamais mort


Sous une chaleur écrasante d’un mois de janvier, la mort approche et encercle la riche demeure d’un ancien membre actif des services secrets sud-africain. En effet, un homme qui n’a plus rien à perdre, sort son l’AK-47 et abat la victime sous les yeux de sa fille. D’autres meurtres vont suivre et obéissent au même rituel. L’inspectrice chargée de l’enquête est Clémencia Garrise. Elle vient d’un township. Elle est noire. Dans un monde post apartheid et machiste, elle doit s’imposer et mène son enquête en usant de son intelligence. Ses investigations l’amènent vers la piste d’un vieux crime politique, l’assassinat d’une figure légendaire, Anton Lubowski. Sa tâche va devenir complexe d’autant plus que ces pistes sont dangereuses à exploiter car personne n’a envie de déterrer un passé lourd de conséquences…

Intérieur, Thomas Clerc

Ecrit par Martine L. Petauton , le Mercredi, 16 Octobre 2013. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Récits, Gallimard

Intérieur, Gallimard l’arbalète, Juin 2013, 386 pages, 22,90 € . Ecrivain(s): Thomas Clerc Edition: Gallimard

 

Conseil : ne pas laisser traîner ce livre, n’importe où, exposé à l’œil curieux de vos visiteurs… le risque serait trop grand de la salve des « quoi !!! c’est fou ce bouquin ? Tu appelles ça comment ? de la littérature !! »… et d’accompagner le commentaire de rires qui vous moqueront encore, la nuit tombée.

Cet Intérieur est effectivement fou, parfaitement inimaginable, et totalement littéraire. Une sorte d’épice nouvelle jamais goûtée et définitivement adoptée.

Explication qui vaut baptême : l’auteur « a passé ses premiers mois rue de Lille, et se souvient d’avoir entendu, bébé, les plaintes des analysants de Jacques Lacan, dont le cabinet était proche, puis d’avoir habité plus tard rue de Quatrefages, où il reçut les voix de Georges Perec, et de ses Choses, avant d’aménager le 11 Septembre 2001 dans son intérieur… ». 50 m2, rue du Faubourg Saint Martin, et presque 400 pages de… visite ? certainement pas, plutôt de parcours initiatique dans le chez lui de Thomas Clerc. « Autobiographie d’une maison », nous est-il dit.