Rimbaud et la Rédemption, Fabienne Bader, par Didier Ayres
Rimbaud et la Rédemption, Fabienne Bader, éditions Polyglotte, 2018, 10 €
Mort et rédemption
J’ai connu les éditions Polyglotte à travers les réseaux sociaux, et j’ai été attiré d’abord par le titre du livre de Fabienne Bader, sans rien connaître de l’auteure. Je cherchais Rimbaud. Quel était ce Rimbaud ? le mien ? celui des amours violentes avec Verlaine ? celui d’Aden ? le Rimbaud voyant ? le Rimbaud escorté par un appareil critique, comme l’est le Rimbaud de Bonnefoy ? Toujours est-il que j’étais prêt à suivre la démarche d’une quête, notamment celle du poète de Charleville. Ce recueil très sobrement présenté, prend donc Rimbaud pour compagnon d’écriture. Et avec le langage, la grave question de la mort et de la rédemption. Cette poésie, que l’éditeur Nasser-Edine Boucheqif publie dans sa collection Féminin Pluriel, cache une femme complexe et douloureuse. Hantée par l’insomnie, et travaillée par la pratique de la poésie, l’auteure questionne la banalité de notre séjour ici-bas, avec en vue la fin de toutes choses et la vie d’un au-delà.
Je te parle
Quelle est
La divine Parole
Que dans la nuit d’hécatombes
J’entends
C’est « La Saison en enfer » d’Arthur Rimbaud
Et dans le Silence de la mer
J’entends cette voix d’outre-tombe
Et cela conduit l’écrivaine à se mettre à jour et à se découvrir au milieu de la banalité de la vie, et encore aussi à s’adosser aux grandes questions qui prêtent souvent au silence. Il me reste à moi, lecteur, à suivre la tension intérieure, l’arc-boutage des mots de Fabienne Bader et de son Rimbaud, poète où puise la poétesse qui tente de se prémunir – s’il était possible ! – de la mort et de la disparition.
La nuit je ris
la lumière éclaire la chambre
un jaguar s’étale
à l’horizon
Les chacals s’enfuient
et le rempart de pierre
S’effondre
La poésie est bonne compagne, elle permet différentes expressions et thèmes. Là, c’est le questionnement de la banalité parfois, qui laisse entrer ici de la réalité dans le poème, et peut sans doute rendre chacun plus fort devant l’échéance mortelle qui est notre condition. Concluons avec un poème :
0h20
Entre chiens et loups.
Quand la nuit descend,
Cet hiver est si long,
Mon estomac se tord d’angoisse
Je sors dans mon quartier,
Dans les rues,
Au hasard des rues que je connais si bien et
rentre à la maison dans l’attente de la
rédemption de l’Aube…
Didier Ayres
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