Requiem pour une République, Thomas Cantaloube / Frakas, Thomas Cantaloube (par Jean-Jacques Bretou)
Edition: Gallimard
Requiem pour une République, Thomas Cantaloube, Folio Policier, avril 2021, 544 pages, 9,20 €
Frakas, Thomas Cantaloube, Gallimard Série Noire, avril 2021, 420 pages, 19 €
Requiem pour une République et Frakas ont pour point commun d’être deux romans policiers historiques se déroulant au début de la Ve République. Le premier couvre la période de septembre 1959 à avril 1962, le second de mai 1962 à août 1962. La première période est celle de la décolonisation algérienne, la seconde, celle de la guerre du Cameroun et le début de la « Françafrique ». Les deux ouvrages ont pour trait commun d’emprunter à la réalité sur fond de fiction pour mieux faire comprendre les enjeux politiques et mercantiles ainsi que le climat et les évènements de ces époques. Ainsi trouve-t-on, par exemple, parmi les héros récurrents des deux volumes, Luc Blanchard, Sirius Volkstrom, Antoine Carrega, des silhouettes de personnes connues qui passent en arrière-plan, telles celles du préfet Papon, du sénateur Mitterrand, de Marcantoni, de Charles Pasqua, de Jean-Marie le Pen, de Jean-Pierre Melville, ou bien celle de Gaston Deferre.
Dans le premier livre, on retrouve assassiné chez lui, à Paris, un avocat algérien et sa famille. Il s’avère que parmi les victimes se trouvent la femme de l’avocat et fille d’Aimé de La Salle de Rochemaure et ses petits-enfants. Ce dernier qui ne fait pas confiance à Papon et à ses hommes confie à son ami Antoine Carrega, qu’il a connu dans le maquis durant la guerre avant qu’il ne se reconvertissent dans le trafic de drogue et d’alcool, le soin de venger les victimes. Le jeune policier Luc Blanchard est chargé par le bras droit de Papon, Jean-Paul Deogratias, de mener l’enquête officielle. La traque va s’organiser avec en arrière-plan le SAC, l’OAS, le FLNC, et des évènements bien réels de cette époque : les essais nucléaires français dans le Sahara, l’attentat perpétré par l’OAS à Vitry-le-François contre le train Strasbourg-Paris, et le massacre de manifestants algériens par la police française, le 17 octobre 1961. Ce premier roman n’est pas sans rappeler Meurtres pour mémoire, de Didier Daeninckx, publié dans les années 1980 dans la Collection Série noire.
Dans le second roman, Luc Blanchard, de policier est devenu journaliste. Il va cette fois-ci enquêter sur le meurtre étrange d’un leader politique camerounais Bechtel soupçonné d’avoir empoisonné deux ans plus tôt Félix Moumié, le Président de l’UPC (L’Union des Populations du Cameroun). En voulant faire éclater la vérité, Blanchard va se mettre en danger et devenir une cible. Il va se retrouver ainsi à Yaoundé et retrouver ses amis corses et Sirius Volkstrom. Cette partie de l’histoire française est un peu moins connue bien qu’elle continue à faire parler d’elle lorsqu’apparaît le mot « Françafrique «
Ces deux livres sont les deux premiers polars de Cantaloube. Souhaitons-lui bonne chance. À dévorer sans retenue.
Jean-Jacques Bretou
Thomas Cantaloube a été correspondant à l’étranger, puis grand reporter de presse écrite. Son premier roman, Requiem pour une République (2019), a obtenu de nombreuses récompenses dont le Prix Landernau 2019 et le Prix 20 Minutes / Quais du polar 2020.
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