Quand les anges tombent, Jacques-Olivier Bosco
Quand les anges tombent, Jigal Polar, septembre 2014, 328 pages, 19,00 €
Ecrivain(s): Jacques-Olivier Bosco Edition: Jigal
Jacques-Olivier Bosco, dans une interview début 2014 au salon du polar de Drap, après la sortie de son roman Loupo, avait déclaré, en parlant de ses projets littéraires : Et puis je travaille sur un beau roman noir, dans un style plus calme, avec des personnages forts, des enfants et des ados, rien d’extraordinaire pour eux, si ce n’est des déceptions, de la rage et l’envie de vivre « différemment ».
Si l’on compare cette déclaration avec la quatrième de couverture de Quand les anges tombent, on sourit en pensant à ce que l’auteur aurait pu écrire dans un style « plus calme » et sur une intrigue plus banale. À n’en point douter, pour JOB, le « rien d’extraordinaire » se vit dans l’extrême.
« Cinq enfants kidnappés…
Un truand impitoyable, Vigo, dit le Noir, condamné à perpet’ pour le meurtre de gamins qu’il nie farouchement avoir commis…
Un avion en provenance de Russie qui par malheur s’écrase sur une prison…
Un procès truqué, une vengeance…
Un préfet assoiffé de pouvoir qui brouille les cartes, un flic déboussolé au fond du trou, un malfrat corse en rupture de ban, un cheminot alcoolo, un juge en fin de parcours, une avocate opiniâtre, des parents bouleversés mais combatifs…
Et leurs cinq mômes bien décidés à survivre et prêts à tout pour en sortir tout seuls ! »
En réalité, ce nouveau roman de Jacques-Olivier Bosco emporte le lecteur dans un tourbillon d’événements, de rebondissements, s’étalant sur quelques jours. Un kidnapping d’enfants ne souffre pas de lentes et pénibles investigations. Alors, on fonce… Un avion sur une prison, des parents sur les traces du ravisseur, les flics sur des indices qui démentent certains faits qui semblaient acquis, le lecteur sur les pages d’une histoire qu’il dévore d’un trait ou presque.
Un scénario ficelé à la minute près et qui mène de front avec brio plusieurs intrigues. Des héros nombreux, aux personnalités brossées avec intelligence, adultes comme enfants, tous traités sur un plan d’égalité au niveau des chapitres, des dialogues qui sonnent juste, une documentation précise et adaptée aux lieux, aux personnages secondaires qui sous la plume de l’auteur prennent par de multiples détails de la profondeur, de l’épaisseur et de la vérité. Et puis, bien entendu, tendresse oblige, sur fond d’intrigue sordide, l’exaltation des liens de sang qui font que les pères, les mères, mais aussi les frères sont prêts à mettre leurs destinées, leurs réputations, leurs carrières en danger pour sauver la vie d’un enfant. Une histoire de cordons ombilicaux que l’on croyait coupés par le jeu de l’intérêt, de l’égoïsme, de la lâcheté, de l’ambition parfois aussi, mais qui se renouent sous le diktat de l’urgence, dans la violence des faits et des sentiments, dans le besoin d’exprimer son amour sans condition, total, parfois aveugle et désespéré.
Aucun n’échappe à cette règle commune, ne se soustrait à son devoir. Seule, la manière diffère. À ce propos, la façon dont Jacques-Olivier Bosco s’attarde sur le personnage de Vigo, dont il décrit son parcours, en particulier son enfance, est symptomatique de sa quête perpétuelle de traces tangibles d’humanité jusque dans les hommes les plus sombres qui peuplent ses romans. Si sa « tendresse » a des limites, ce sont plus les nantis, les arrivistes et les gâtés par l’existence qui en pâtissent ou ceux qui ont définitivement franchi la ligne rouge qui sépare un humain d’un monstre.
Quant aux enfants, me direz-vous ? L’auteur a gardé en lui assez de fraîcheur, de sensibilité pour en faire des héros à part entière, des êtres pleins de combativité, de générosité… enfin… presque tous.
Une plume en forme de scalpel qui charcute là où cela fait mal, qui met bas les masques dans un contexte social où les liens familiaux chahutés par les divorces, le carriérisme ou la déchéance liée à la pauvreté et à l’exclusion, ne se ressoudent que confrontés au pire. Une plume qui octroie aussi la possibilité à des hommes au passé lourd de trouver la voie de la rédemption. Un optimisme qui a le goût du tragique.
« Beau roman noir », Monsieur Jacques-Olivier Bosco ? Oui… contrat rempli.
Catherine Dutigny/Elsa
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