Punto Basta, Lionel Froissart (par Jean-Jacques Bretou)
Punto Basta, Lionel Froissart, janvier 2021, 192 pages, 17 €
Edition: Héloïse D'Ormesson
Comme elle le fait presque chaque semaine, Jocelyne, employée au service des cartes grises à la préfecture de police, exécute un tour de Paris au volant de sa Fiat Uno blanche, qu’elle a baptisée Paulette. Elle s’offre les « beaux quartiers », seule, ou presque, puisque que son gros chien en peluche Mike (en souvenir de Mike Brant, un verseau comme elle) est installé sur le siège-arrière. Elle passe par le XVIe arrondissement, roule non loin de la Tour Eiffel, prend les voies sur berges avec attention et décontraction. C’est son plaisir, un petit luxe qu’elle s’accorde, elle qui ne part pas en week-end mais rentre ensuite sagement à son domicile de Bobigny2. Jocelyne est heureuse. Sa voiture va bientôt être avalée par le grand tunnel du Pont de l’Alma, elle entend des moteurs de Piaggio qui la dépassent puis, tout à coup, un choc du côté arrière gauche la déstabilise, et tandis qu’elle essaie, les mains crispées sur son volant, de maintenir la trajectoire de son véhicule, elle aperçoit furtivement dans son rétroviseur une grosse Mercedes s’encastrer dans un pilier avec un fracas d’enfer. Choquée, les mains moites, elle sort du tunnel tout en s’appliquant à garder sa droite. Il y a encore relativement peu de véhicules, nous sommes le samedi 30 août 1997. Elle rejoint avec moult précautions Bobigny.
Ayant eu sa dose d’émotions, elle rechigne à descendre sa Fiat dans son parking au troisième sous-sol, et se contente de la laisser au bas de son immeuble, puis rejoint son appartement, un petit deux-pièces. Elle se jette sous la douche et profite du jet tiède et dru pour se détendre l’esprit et les muscles, nettoyer son corps souillé par la sueur dont il s’est couvert. Sans lire une page de Djian, son auteur préféré, elle rejoint son lit et s’endort comme une masse.
Le lendemain matin, elle accomplit son rituel du dimanche, elle boit un thé tout en tapotant sur les touches de son minitel à la recherche de l’âme sœur. Elle se lasse très vite et descend en bas de son immeuble acheter la presse dominicale, le JJD en premier (enfin après L’Humanité, coutume familiale oblige). Et là elle déchiffre le bandeau : La princesse et Dodi Al-Fayed se tuent dans un accident à Paris !
Ce livre, qui se lit fort bien et rapidement, est l’histoire très romancée de la fin de vie de la princesse Diana, vue à travers les yeux de Jocelyne, petite française moyenne malheureuse et romantique. Il y a une distance immense entre ce qu’elle découvre dans la presse dite « populaire » et ce qu’elle a vécu. Loin des larmes que versent ses copines, le fait divers se résume pour elle à une histoire de feu clignotant arrière. Outre celui de nous divertir, cet ouvrage a le mérite de soulever la question essentielle pour l’enquête : qu’est devenue la Fiat qui a laissé des traces de peinture sur la Mercedes de Lady Di !
Jean-Jacques Bretou
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