Penjab, Éric Deschodt
Penjab, septembre 2016, 233 pages, 19 €
Ecrivain(s): Éric Deschodt Edition: Editions de Fallois
Les conséquences de la chute de Napoléon et de son exil à Sainte-Hélène ont provoqué le désespoir de ses soldats et officiers. Le capitaine Allard et le maréchal des logis Ventura, deux principaux personnages du roman d’Éric Deschodt, Penjab, vont aller chercher en Inde une sorte d’accomplissement qui est leur est dénié dans le cadre de la Sainte-Alliance qui dresse « les rois contre les peuples ». En effet, un autre empire ne cesse de s’étendre, il est situé au pied de l’Himalaya entre l’Hindoustan et l’Afghanistan. C’est l’empire Sikh du Penjab dirigé par Ranjit Singh, maharadjah de Lahore. Ces deux officiers, dont la curiosité intellectuelle est grande, vont se rejoindre pour parfaire l’organisation de l’armée de cet empire en pleine expansion. Mais qui sont-ils ? Pour le savoir, Allard et Ventura font appel à Baroud Singh Ahluwalia, un érudit local :
« Le mot Sikh vient du sanscrit. Il signifie “disciple”. Nous sommes les disciples du Guru Nanak, né au Penjab en 1469, fils d’un riche négociant. Le message tient en quatre mots : un seul Dieu, égalité, altruisme et tolérance (…) Sikh et altruiste sont synonymes. Le vrai Sikh n’agit que pour Dieu et pour son prochain. La paix est le bien suprême ».
La réorganisation de l’armée de l’Empire Sikh se poursuit, Allard et Ventura reçoivent des renforts en la personne de Claude-Auguste Court et de Paolo Di Avitabile, également anciens de la Grande Armée. Ils ne se doutent pas encore qu’ils formeront le quatuor qui va transformer définitivement la puissance militaire du Penjab par le renforcement de l’artillerie. L’un des passages les plus significatifs du roman est celui où Ranjit Singh se pose la question de l’explication de la supériorité de l’Occident. Sans trouver de réponse convaincante ni définitive – il n’est pas un homme dogmatique : « Cette digression abandonnée pour ne pas y épuiser le reste de ses jours, il revenait au fond de la question : hégémonie et christianisme sont-ils liés ? La puissance matérielle dépend-elle du spirituel ? »
Le roman caractérise bien la situation de ces quatre idéalistes cherchant sur le continent indien une concrétisation de leurs aspirations : « Après 1815, ils refaisaient leur vie de manière à réduire autant que possible le gouffre qui séparait leurs grandes années de la misère présente en Europe. Misère morale, la seule qui compte ».
Beau roman, qui s’inscrit dans l’esprit des Trois Mousquetaires de Dumas. Il fait partager aussi, et c’est essentiel, les interférences et liens forts entre êtres humains issus de civilisations différentes.
Stéphane Bret
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