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Paint it black, Graeme Thomson

Ecrit par Guy Donikian 19.02.14 dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Essais, Payot Rivages

Paint it black, quand la mort rode dans le blues, le rock, le rap et la country, décembre 2013, 266 p. 20 €

Ecrivain(s): Graeme Thomson Edition: Payot Rivages

Paint it black, Graeme Thomson

 

On a déjà beaucoup écrit sur les musiques populaires qui depuis plusieurs décennies ont contribué à créer l’environnement sonore que nous connaissons aujourd’hui. Les progrès techniques qui ont ponctué tout le vingtième siècle ne sont pas pour rien dans la diffusion à grande échelle d’une musique, ou plutôt de musiques qui ont déferlé sur les ondes. Que de chemin parcouru en effet depuis les rouleaux sur lesquels le début du vingtième siècle a gravé de rares témoignages musicaux jusqu’aux téléchargements actuels qui font malheureusement de la musique un bien de consommation comme un autre. C’est ce contexte qui sert de cadre à cet essai dont le titre donne justement le ton. Paint it black, le titre des Stones, trouve sa justification dans le sous-titre. Tout est donc dit ou presque. L’essai veut mettre l’accent sur les rapports qu’ont entretenus et qu’entretiennent encore ces musiques avec la mort, en remontant parfois jusqu’au début du vingtième siècle qui semble constitutif de la genèse de la présence de la mort dans les paroles du blues par exemple.

Ce n’est cependant pas que l’aspect morbide qui sera la raison de la présence de telles paroles. La volonté de dénoncer les horreurs de la guerre, la violence des discriminations et plus récemment la violence du 11 septembre sont également des événements qui ont poussé certains auteurs à écrire sur des sujets graves qui leur ont souvent valu des récriminations pour un succès plus intimistes.

Et d’une décennie à l’autre, l’auteur montre à quel point ces propos sont récurrents, les auteurs actualisant la mise en scène en fonction des événements. Qu’il s’agisse des injustices raciales des Etats-Unis dans les années 60, ou de la détresse des esclaves noirs au début du vingtième siècle dans ce même pays, les auteurs dénoncent en quelque sorte la même violence mais à quelques décennies de distance ils utilisent des événements différents. Ainsi rappelle-t-on que les paroles des vieux blues du début du vingtième siècle trouvent un écho dans celles du Bob Dylan des années soixante et soixante-dix.

Ce fut aussi le cas pour Bruce Springsteen qui avec American skin écrit une chanson « qui s’attaque aux questions de race, d’identité, de complicité en utilisant un meurtre ». En 1999, l’exécution d’un noir innocent, Amadou Diammo, par quatre policiers en civil dans le Bronx, est à l’origine de cette chanson souvent qualifiée « antiflics ». Interviewé, Springsteen déclare écrire en se demandant ce que signifie être américain, ou encore ce qui se passe « dans ce pays où nous vivons ».

Au-delà des violences « sociologiques », la mort est présente pour des raisons plus personnelles dans les chansons des Beatles, des Stones ou encore des Beach Boys qu’on imagine peu faire partie de ceux qui ont laissé une place à la mort. Qu’on se souvienne des paroles d’Eleonor Rigby pour s’en convaincre, la mort ici anonyme étant la raison de ce texte, mort d’une vieille dame.

Les drogues sont pour beaucoup dans la présence de telles paroles, et l’auteur leur laisse une large place. Brian Wilson des Beach Boys a ainsi décrit un trip à l’acide dans un texte où il vit sa vie à l’envers, en remontant le temps jusqu’à rejoindre le néant. John Lennon a également utilisé de telles expériences tout comme les Stones pour qui cependant l’introspection n’était pas au centre des préoccupations.

On l’aura compris, cet essai présente de bonnes occurrences de replonger dans ces musiques qui, depuis des décennies, ont fait une large place à la mort, comme à d’autres sujets d’ailleurs qui tous trouvent un écho chez l’auditeur, quelle que soit en définitive l’époque considérée, des chansons qui seraient des miroirs dans lesquels chacun devrait trouver une justification de ses angoisses. Et l’auteur de faire des parallèles audacieux qui le conduisent à faire de Hey Joe popularisé par Hendrix le même meurtrier archétypal que le Meursault de Camus. Mais de taxer aussi de « philosophie bidon » les textes d’Emerson Lake and Palmer ou encore de « bêtise incommensurable » ceux de Led Zeppelin !

Graeme Thomson, journaliste, a publié a publié ce livre en 2008 sous le titre I shot a man in Reno. La traduction est de Serge Loupien.

 

Guy Donikian

 


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A propos de l'écrivain

Graeme Thomson

 

Journaliste musique (Rolling stone. Esquire. MOJO ...)

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