Noirs dans les camps nazis, Serge Bilé
Noirs dans les camps nazis, Le Rocher poche, mars 2016, 168 pages, 6,50 €
Ecrivain(s): Serge Bilé Edition: Les éditions du Rocher
L’inimaginable monstruosité des atrocités commises par les nazis ne peut se comprendre à la lumière d’une seule explication. Il faudra sans doute encore accumuler de nombreux essais pour saisir tous les mécanismes qui ont concouru pour une « solution finale » qui vit industrialiser la mort comme jamais auparavant. Serge Bilé participe avec cet essai à la compréhension de ces mécanismes, de ces logiques simplistes mais efficaces pour la mort industrialisée de tout un peuple. Il s’agit en l’occurrence de la déportation des Noirs dans les camps de concentration et d’extermination de l’Allemagne nazie. Africains, Antillais, Américains, furent aussi victimes des nazis.
C’est en Namibie que tout a commencé, un pays voisin de l’Afrique du Sud. Les premiers colons allemands y débarquent en 1870, alors que ce pays est composé d’une mosaïque de peuples, dont les Ovambo, Kavango, Nama et Herero. La désunion qui règne alors entre ces peuples va grandement faciliter l’installation des colons allemands. Le sous-sol recèle des richesses dont le cuivre et les diamants qui vont attiser les convoitises, et Bismarck va nommer un gouverneur pour administrer le territoire et ses richesses : Heinrich Goering, le père de Hermann Goering, l’un des plus hauts dignitaires nazis.
Heinrich Goering va user des méthodes les plus expéditives pour mener à bien sa mission : déplacement des populations parquées dans des réserves raciales, esclavage, exécutions sommaires en cas de résistance et confiscation systématique des terres et du bétail.
Ce sont les Herero qui vont se révolter et ils paieront le prix de leur insoumission : soixante mille morts, soit 80% de la population, ce qui s’apparente à un véritable génocide. Les survivants, environ quinze mille, sont faits prisonniers, et regroupés dans des « Konzentrationslager », des camps de concentration, terme utilisé pour la première fois dans un télégramme de la chancellerie le 14 janvier 1905.
Eugen Fischer, généticien racialiste allemand, va disposer ainsi des Herero pour des « recherches » et réaliser des expérimentations anthropologiques, scientifiques et médicales sur ceux qui ne seront plus que des cobayes. A l’avènement d’Hitler, ce même Fischer dirige l’institut d’anthropologie, d’hérédité humaine et d’eugénisme de Berlin. Avec son assistant, Josef Mengele, futur bourreau d’Auschwitz, il collabore avec les SS.
Le mépris des Afro-Allemands va rapidement se transformer en rejet, et Hitler écrit dans Mein Kampf : « Les Juifs ont emmené les Nègres en Rhénanie dans le but de souiller et de bâtardiser la race aryenne ».
Avec les lois de Nuremberg, tous les Afros-Allemands sont privés de citoyenneté. Il leur est interdit de travailler, de faire leur service militaire et de fréquenter les bains publics. Hitler fait interdire le jazz à la radio, et Noirs et Juifs n’ont plus le droit de se produire sur scène.
Un programme de stérilisation des Afros-Allemands sera conduit sans anesthésie et qui concernera tous les Noirs et les Métis.
Les camps de concentration seront la destination de tous les Noirs faits prisonniers par les nazis. Serge Bilé rend compte ici de ces cas, comme celui de ce résistant français, Dominique Mendy, Noir engagé dans la résistance française, capturé, torturé et déporté au camp de Neuengamme.
A Dachau, John Vosté, résidant en Belgique quand Hitler l’envahit, sera interné jusqu’à sa libération en avril 1945. A Ravensbrück, une femme noire, dont on ne connaît pas le nom, sera internée et surnommée Blanchette par ses camarades de bloc (par amitié et non par dérision). Elle aura subi les pires humiliations.
Les témoignages se succèdent, et ils donnent la mesure de la haine dont ont été victimes les Noirs durant la seconde guerre mondiale. Plus que des anecdotes qui ne concerneraient que quelques cas isolés, ils prouvent que le délire raciste des nazis était sans limite.
Guy Donikian
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