Nocturne, Richard Montanari
Nocturne. Cherche-midi. Septembre 2013. Trad (USA) Marion Tissot. 576 p. 21 €
Ecrivain(s): Richard Montanari Edition: Le Cherche-Midi
Ce thriller est –paradoxalement – un vrai moment de récréation. Montanari a choisi, contrairement à ses romans précédents noirs et proches du cauchemar, de venir sur les terres d’écrivains qui ont peuplé, pour certains d’entre nous, les lectures de détente. Le souvenir de Ed McBain, par exemple, revient souvent à cette lecture. Ed Mc Bain, vous connaissez ? Celui du 87ème district, de Steve Carella, d’Isola ? La vie quotidienne de flics dans la trame d’affaires multiples qui se croisent et se dénouent.
Montanari ne s’est pas pris la tête avec ses deux personnages principaux. Deux flics, un homme et une femme. Pas de grands états d’âme, pas de plongée abyssale dans les méandres psychologiques des enquêteurs, pas de policiers véreux ou ambigus. Rien de tout cela. Xxx et xxx font leur boulot, s’entendent bien entre eux et avec leurs collègues, montrent une humeur égale et une perspicacité toute professionnelle face au tueur en série – oui il en faut bien un avec Montanari – qui décline son bestiaire sanglant en toute sérénité. Ils sont flics, donc fonctionnaires de la morosité d’une cité, quand ils ne sont pas héros de cauchemars.
« Jessica et Byrne passèrent l’heure suivante à arpenter le voisinage, chacun de son côté. Ils en apprirent un rayon sur les épouses volages, les propriétaires paresseux, les voitures mal garées, d’hypothétiques cartels internationaux de la drogue, les invasions d’extra-terrestres, les voitures mal garées deuxième et – un incontournable – les conspirations gouvernementales. En d’autres termes, rien. »
Un livre habilement construit, efficacement écrit, que demander de plus ?
Le fil narratif est, comme le titre le dit, musical. Nocturne. Il s’agit de la forme musicale intitulée comme tel. De Liszt, ou Chopin, ou Brahms. Derrière le violoncelle une figure mythique de l’instrument, Christa-Marie Schönburg. Figure fictionnelle certes mais que l’auteur a l’intelligence de placer dans le très réel et célèbre Orchestre de Philadelphie aux côtés du non moins réel et célèbre Ricardo Muti. De petits tatouages (tiens ! on pense encore à Mc Bain !) se retrouvent sur tous les cadavres, tic du serial killer qui – comme toujours – décline son scénario de dingue.
Philadelphie est sombre certes. « La Ville de l’amour fraternel* avait un héritage tellement lourd ; la honte, la culpabilité, la folie coulaient sous ses rues pavées comme une rivière de sang. » Mais nos deux policiers rendent cette affaire et ce lieu humains en fin de compte. Comme cette remarque de Byrne qui sonne comme une sorte de consolation face à la noirceur :
« Le chagrin a cette particularité étrange, reprit Byrne. C’est parfois la meilleure chose qui puisse nous arriver. Parfois, il nous rappelle que notre cœur ne s’est pas arrêté de battre. »
Un divertissement intelligent, séduisant. Somme toute attendu mais talentueux.
Leon-Marc Levy
VL1
NB : Vous verrez souvent apparaître une cotation de Valeur Littéraire des livres critiqués. Il ne s’agit en aucun cas d’une notation de qualité ou d’intérêt du livre mais de l’évaluation de sa position au regard de l’histoire de la littérature.
Cette cotation est attribuée par le rédacteur / la rédactrice de la critique ou par le comité de rédaction.
Notre cotation :
VL1 : faible Valeur Littéraire
VL2 : modeste VL
VL3 : assez haute VL
VL4 : haute VL
VL5 : très haute VL
VL6 : Classiques éternels (anciens ou actuels)
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