Mon bel orage, Héloïse Combes
Mon bel orage, éd. de la Rémanence, coll. Regards, octobre 2015, 104 pages, 14 €
Ecrivain(s): Héloïse Combes
Lella a quatorze ans, elle est en troisième. Avec ses amis, Margot, les jumeaux Jules et Julien, elle mène la vie de beaucoup d’adolescents désabusés, entre cigarettes et verres de vin, cours soporifiques et ennui chronique. Rien ne semble devoir arriver en ce mois de novembre… Les jours se ressemblent, lugubres, pluvieux. Mais lors d’un cours de dessin, la collégienne plonge dans le regard de son professeur, Marius Gracq, cet enseignant qu’elle avait vu tant de fois, cet adulte parmi les autres adultes de l’établissement. Un quinquagénaire banal. De ce regard naît d’abord un trouble, puis une passion interdite.
Ils se retrouvent alors régulièrement dans l’atelier de la salle du professeur. Lui peint des paysages « zébrés de grands traits noirs façon Bernard Buffet ». Elle le regarde, l’observe. Ils parlent peu, ils sont ensemble, c’est tout, ils boivent du vin, fument des cigarettes : « Peu de paroles. Son corps assis près du mien, si près que j’entendais son souffle, le glouglou des gorgées de vin traversant son gosier, mon souffle à moi comme suspendu, mon gosier étranglé à chaque gorgée ». Elle attend plus, mais lui s’y refuse. Il lui offre quelques échappées, des balades dans la campagne lors desquelles il évoque sa passion pour la Renaissance italienne. Elle l’écoute et s’éveille à elle-même.
Les rumeurs elles aussi commencent à s’éveiller. Ils ont trente-cinq ans d’écart, il est professeur, elle est élève. Alors ils fuient, elle la « petite sorcière rousse », lui « son bel orage ». Un jour où la rumeur gronde trop sévèrement, ils s’échappent comme des voleurs (d’amour) dans le Berry où ils se cachent et s’aiment comme des enfants. Ils vivent dans une maison délabrée ce qui leur est donné à vivre, tant que cela leur est donné à vivre. Un amour toujours pur, qui perd peu à peu de son innocence et court à sa perte.
Mon bel orage est le très joli roman d’une passion impossible, d’une quête de liberté. Par son style et son sujet, elle n’est pas sans rappeler certains textes de Valérie Valère (Malika ou un jour comme tous les autres, 1983, notamment) qui avait marqué tant de lecteurs dans les années 80 et 90. L’écriture est fluide, épurée et ne fait, dans son économie même, jamais l’économie d’une certaine poésie. C’est sombre et lumineux à la fois, comme un orage flamboyant, comme un amour fauché…
Arnaud Genon
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