Lettres en provenance de la nuit, Nelly Sachs (par Anne Morin)
Lettres en provenance de la nuit Ed. Allia, 86 pages. 6€,10
Ecrivain(s): Nelly Sachs Edition: Allia
C'est un tout petit livre, étroit comme la porte de Gide, et on en sort éclaté, transfiguré. Imprégnation et fulgurance. Rarement ici, souvent là-bas, c'est-à-dire autrefois, jadis, dans des temps immémoriaux, bibliques, et aussi plus loin, plus haut, par-delà, au-delà de l'échelle, dans le monde de l'âme, en tant que poète, bien sûr, mais aussi en tant qu'espérante, aspirante. Nelly SACHS… Et toujours dans le feu, apprendre, comme Marina TSETAIEVA, qu'il est lumière avant d'être brasier. Eclair (ant), jamais consumant.
On en ressort dépouillé, on a fait don de sa peau d'homme - de femme -.
Mais Nelly SACHS n'est pas qu'un esprit, mais si près de basculer qu'elle a fait des séjours "internés". On ne sauve (garde) pas la flamme, les mots qu'elle jette au-devant d'elle pour trouver, comme dans les contes russes, au bout, l'issue, le bout de la quête, l'extrême, jamais la vengeance, jamais l'amertume, la "nostalgie de la mort", comme passage, révélation, retrouvailles.
Et la foi dans tout cela ? Un mode de vie, une vision. Elle le dit, qu'il est tellement plus facile d'aimer à travers un Dieu qui s'incarne, d'aimer un homme comme un Dieu, plutôt qu'une voix, que des commandements, et pourtant, juive, sa foi est son mode de vie, sa vision.
Il ne faut pas dire plus, il faut laisser décanter. On y apprend que l'amour ne peine pas, ne peine jamais, dans la plus haute souffrance.
Une imprégnation, dans la foi vécue au jour le jour, "à côté" : l'amour, et toute la souffrance qu'il faut, et bien plus, pour y parvenir. L'amour nu, l'amour-dieu, l'amour-mère.
Anne MORIN
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