Les massacres des Arméniens, Arnold J. Toynbee
Les massacres des Arméniens, 315 p. 9,65 €
Ecrivain(s): Arnold J. Toynbee Edition: Petite bibliothèque Payot
Pour qui veut se convaincre que les massacres des Arméniens furent bien un génocide, cette nouvelle édition établie par Claire Mouradian sera très utile. Il s’agit en effet de la réédition du premier ouvrage relatant « le meurtre d’une nation ». Son auteur, Arnold J. Toynbee, historien anglais, humaniste, fit paraître l’ouvrage en novembre 1915, alors que l’Europe vivait sa Première Guerre Mondiale. Il y décrypte les mécanismes qui ont abouti à la volonté d’éradiquer toute trace d’un peuple. Claire Mouradian rappelle dans sa préface que le terme « génocide » n’existe alors pas. Il fut créé pendant la Deuxième Guerre Mondiale pour désigner les crimes nazis contre les Juifs d’Europe.
Un génocide donc, à en croire la déclaration de Talaat Bey, l’organisateur des déportations, l’homme du Triumvirat alors au pouvoir : « après cela, il n’y aura pas de question arménienne pendant cinquante ans ». Dans son chapitre intitulé Les preuves, l’auteur rappelle que « le crime fut préparé de façon très systématique, car nous avons la preuve que la façon d’agir fut la même dans plus de cinquante endroits différents ». Les ordres de déportations, d’exécutions, venus de Constantinople, furent exécutés sans failles, à l’exception de quelques fonctionnaires réticents qui furent remplacés immédiatement.
L’historien livre des preuves irréfutables pour décrire les atrocités commises en se fondant sur le croisement de témoignages qui donne à son travail la crédibilité à laquelle aspire tout historien. Parce que ce n’est pas là un simple récit, mais bien un travail d’historien qui veut alerter l’opinion internationale. Et c’est en tant que tel qu’il rappelle que l’apostasie fut un moyen utilisé par les Arméniens pour échapper au massacre en 1895-1896, mais en 1915, ce moyen leur fut refusé. En effet, les Arméniens durent en outre donner leurs enfants pour qu’ils soient élevés dans la religion musulmane, sans pour autant échapper à la mort.
Arnold J. Toynbee accorde une large place aux témoignages qui sont souvent des lettres écrites par des rescapés. L’horreur est présente à chaque ligne, mais ce qui frappe c’est la détermination du pouvoir de détruire toute une population. L’historien n’a de cesse de la prouver, et il croise pour cela témoignages, articles de journaux, archives, dans le seul but de la démonstration de cette volonté « d’en finir avec la question arménienne ».
Pour décrire son travail, l’auteur a ces mots : « Telle est, dans ses grandes lignes, l’histoire de ce qui est arrivé à la population arménienne… Et nous nous sommes bornés à raconter « le cours » normal du crime, à décrire le projet tel qu’il fut organisé par le gouvernement à Constantinople et exécuté en général par ses subordonnés ».
La première édition parut en novembre 1915, d’autres suivirent. La commémoration du génocide arménien se tient chaque année le 24 avril, date qui commémore aussi l’arrestation de six cents intellectuels arméniens à Constantinople, en 1915, déportés et assassinés.
Guy Donikian
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