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Les Barbares, Jacques Abeille

Ecrit par Ivanne Rialland 27.10.11 dans La Une Livres, Les Livres, Recensions, Attila, Roman

Les Barbares, mai 2011, 550 p., 25 euros.

Ecrivain(s): Jacques Abeille Edition: Attila

Les Barbares, Jacques Abeille


« Ils n’arrivaient pas seuls mais eurent tôt fait d’être les maîtres. » Dès l’orée du livre, les barbares sont là, réduisant à néant la haute civilisation de Terrèbre. Un universitaire raconte… Mais raconte quoi ? Non la conquête, mais le reflux, celui de la horde dont la poussée brutale se commue presque aussitôt en une quête erratique d’un homme et d’un livre. Cet homme, c’est le « voyageur », narrateur et auteur des Jardins statuaires, celui qui cherchait le prince des barbares aux confins du monde des jardins. C’est à présent le prince qui se lance à la poursuite, accompagné du professeur, ethnographe d’un peuple en déclin.

Suite des Jardins statuaires, Les Barbares en sont également l’envers. Traducteur du livre des jardins dans la langue de Terrèbre, le professeur scrute passionnément son reflet dans le monde qu’il découvre. Auteur à son tour, accumulant des notes savantes, il signe un livre symétrique, monument nostalgique du peuple barbare, de même que Les Jardins statuaires témoignent d’un temps révolu, d’une civilisation balayée par ces barbares en train de s’éteindre.

Méditations sur la disparition des mondes, mélancoliques romans d’aventures, les deux ouvrages ne forment pas un simple diptyque. Les Barbaresproposent une véritable lecture des Jardins statuaires dont ils approfondissent l’énigme. Ils complexifient et troublent les frontières qui définissaient si nettement le monde des jardins, isolés dans leurs murailles, multiplient les révélations contradictoires sur l’origine de la culture des statues qui forme le nœud fascinant des deux ouvrages, faisant d’eux une passionnante interrogation sur l’acte de création. Au-delà même de cette invention, riche en images séduisantes — des statues, poussant dans des plates-bandes, soignés par des jardiniers qui leur dévouent leur existence — la création la plus mystérieuse est celle du livre des Jardins statuaires, aux multiples versions, aux pages manquantes, à l’auteur disparu. Il renvoie, énigme des énigmes, à la statue qu’il est censé commémorer, dont le visage indistinct garde son secret, dans le recoin le plus reculé du dernier des jardins statuaires. La phrase, parfois tortueuse, le vocabulaire, parfois précieux, s’accordent au rythme balancé du pas des chevaux barbares, dont l’image orne le dos du volume, et bercent notre rêve, lecteurs d’un livre de lecteur, scrutant par-dessus l’épaule du savant traducteur le secret des Jardins statuaires.

 

Ivanne Rialland


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A propos de l'écrivain

Jacques Abeille

Jacques Abeille, né en 1942, est écrivain et peintre. Il est membre du groupe surréaliste Parapluycha fondé en 1966 par Pierre Chaveau.

Il poursuit à l’heure actuelle Le Cycle des contrées, inauguré avec les Jardins statuaires (1982, rééd. Attila 2010) : après l’album Les Mers perdues (avec François Schuiten, 2010) et Les Barbares, un nouveau volume, La Barbarie, vient de paraître chez Attila (octobre 2011).


A propos du rédacteur

Ivanne Rialland

 

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Rédactrice


Ivanne Rialland est écrivain et chercheur.

Elle travaille notamment sur l'écrit sur l'art au XXe siècle et sur le récit surréaliste.

Agrégée de lettres, elle enseigne à l'heure actuelle à l'université de Versailles-St Quentin en Yvelines.

Elle a publié deux romans chez Alexipharmaque, C (2009) et Pacific Haven (2012)