Le Sens du calendrier, Nathalie Léger-Cresson (par Jean-Paul Gavard-Perret)
Le Sens du calendrier, Nathalie Léger-Cresson, octobre 2020, 171 pages, 15 €
Edition: Editions Des Femmes - Antoinette Fouque
Se méfier de l’eau qui dort
Nathalie Léger-Cresson, dans ce qui pourrait être pris pour une autofiction – tant elle se dit « transparente » – crée de fait une « surfiction » poétique, ou au minimum une traversée des apparences dans un réalisme magique très personnel, où les calendriers perdent leurs jours ou en possèdent trop par effet lunaire.
Ecrivant, voire au besoin « médisant », et ce « à la lumière de ma lampe à huile de thon en boîte », l’auteur met dans sa poche – mais ce n’est qu’une façon de parler – des amants de passage, tout comme ses rêves et ses cauchemars encore plus lumineux, dans le noir, là où les lapins levés n’ont pas d’oreilles, et où de l’amour une chose se retient – à savoir la technique.
Fleur parmi les fleurs, portant parfois une robe noire, l’auteure avance trottant menu entre narrations, haikus, listings, en des épisodes insaisissables comme le sont désormais les saisons. Lectrices et lecteurs sont menés par le bout du nez dans ce labyrinthe où la manipulatrice (un rien perverse) se moque même calligraphiquement des mâles qui lui tournent autour, et dont elle connaît bien la « monogamie de volatiles ».
L’ensemble tient du conte cruellement drôle, superbement écrit, intelligent jusqu’à la moelle. Les histoires d’amour sont souvent le fruit de « la coco-incidence » écrit celle qui les commence au besoin au sortir ou à l’entrée d’une rame de métro. Dès lors, et par rêves amplifiés, aux tragédies couvées par l’amère, aux vagues de langueur mélanco-romantique, fait place un hop ! hop ! hop ! qui laisse jusqu’au pangolin le cul dans l’eau et ses pattes de derrière idem.
Bref rien n’arrête celle qui – réclusion covidienne ou non – avance imperturbable. D’une certaine manière, pour elle, le confinement n’est jamais de saison. Sauf bien sûr pour des cinq à sept non-ascètes à n’importe quelle heure du jour ou de la nuit. Il y a donc là le plus beau portrait d’une femme drôle, performante (oh combien !) libre et altière.
Jean-Paul Gavard-Perret
Nathalie Léger-Cresson est parisienne. Docteur en biologie, elle a écrit une pièce de théâtre et des fictions radiophoniques pour France-Culture. Elle a enseigné le français à L’Ecole de la deuxième chance, dans le 93, et a déjà écrit trois livres chez le même éditeur.
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