Le printemps des poètes chez Gallimard jeunesse
Pef, Farces et Attrapoèmes (1989), mis en couleurs par Geneviève Ferrier, Gallimard jeunesse, mars 2016, 48 pages, 13,50 €
Mon imagier de la poésie, illustré par Olivier Latyk, Gallimard jeunesse, coll. Éveil musical, mars 2016, 36 pages cartonnées + 1 CD, 16 €
À l’occasion du printemps des poètes, Gallimard jeunesse propose deux recueils fort séduisants aux tout jeunes amateurs de poésie.
Mon imagier de la poésie est accessible aux plus jeunes, dès deux ans. Les images vives et colorées d’Olivier Latyk accompagnent un choix de poèmes, incluant deux fables de La Fontaine et des textes de Verlaine, Prévert, Hugo, Apollinaire, Maurice Carême, Paul Fort et Desnos. Les textes, très connus, rappelleront à beaucoup leurs années de maternelle et de primaire et leur donneront le plaisir de lire ces poèmes aimés à leurs enfants.
On pourra cependant regretter l’étroitesse de l’histoire de la poésie ainsi parcourue : à l’exception de La Fontaine, les auteurs appartiennent au XIXe siècle (avec trois textes, l’un d’Hugo et deux de Verlaine) et, surtout, à la première moitié du XXe siècle : le plus proche de nous est le surréaliste Desnos, né en 1900 – avec deux textes, La fourmi de 18 mètres et Le léopard. Il ne s’agit pas, bien sûr, de regretter la présence de Desnos : j’en profite au contraire pour conseiller l’excellente anthologie de Desnos proposée par Benoît Marchon chez Bayard jeunesse, illustrée avec beaucoup de talent par Frédéric Bénaglia. En revanche, j’aurais préféré voir réduite la place de Maurice Carême – le poète le plus représenté, avec trois textes – pour ouvrir cet étroit cercle chronologique et faire entrer des poèmes plus récents (Tardieu, Guillevic, qui ne sont pas non plus des choix très audacieux), ou plus anciens.
Ce petit livre cartonné et robuste est accompagné d’un disque : à part Chanson pour les enfants l’hiverde Joseph Kosma, les autres poèmes sont agréablement mis en musique par Jean-Philippe Crespin, et chantés par des enfants. L’alternance avec des voix d’adultes invite à chanter avec son enfant, ce que permettent les pistes instrumentales à la fin du disque. Cela limite également le côté agaçant des voix enfantines.
En dépit de ces réserves mineures, cet imagier de la poésie me paraît ainsi une excellente introduction à la poésie, et je le recommande vivement.
Tandis que l’anthologie nous renvoyait vers nos années de maternelle, la réédition les Attrapoèmes de Pef susciteront une douce nostalgie chez les anciens lecteurs de La Belle Lisse Poire du Prince de Motordu. Graphiquement, le livre, d’un agréable format carré, séduit l’œil par des typographies et des illustrations variées. Les poèmes, assez divers eux aussi, placent en leur cœur le jeu avec le langage qui a fait la célébrité de Pef : jeu avec les sonorités, avec l’orthographe (Un doigt/deux doigts/ toi, dois/ cadeau à/ Saint Doigt…), avec la forme des lettres (citons un beau calligramme en forme de vache, ou CCCCCCCCCCCC c’est une chenille…). La mise en page, créative, ajoute au plaisir de la lecture. Certains textes plairont aux plus jeunes, dès la maternelle, d’autres sont un peu plus difficiles d’accès. C’est un joli album à feuilleter en famille, d’autant que l’organisation des poèmes suivant les mois de l’année invite au picorage.
Ivanne Rialland
Pierre Elie Ferrier, dit Pef (né en 1939), invente en 1980 le personnage du prince de Motordu, héros de son plus grand succès, La Belle Lisse Poire de Motordu, vendu à plus d’un million d’exemplaires. Il est l’auteur de plus de 150 ouvrages.
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