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La Table Ronde

Maison fondée en 1944 par Roland Laudenbach et ainsi nommée par Jean Cocteau.

 


La Reine des souris, Camilla Grudova (par Delphine Crahay)

Ecrit par Delphine Crahay , le Mercredi, 06 Janvier 2021. , dans La Table Ronde, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Iles britanniques, Roman

La Reine des souris, Camilla Grudova, novembre 2020, trad. anglais, Nicolas Richard, 48 pages, 5 € Edition: La Table Ronde


Au début, cela ressemble à une histoire d’amour comme les autres : rencontre à l’université, passion commune – pour le latin –, mariage précipité sans l’accord des parents, entre-soi amoureux… Il ne faut pourtant que quelques pages pour sentir que quelque chose cloche, coince, grince. L’entre-soi est presque un huis clos, tant la narratrice et Peter semblent éloignés du monde ; l’appartement où ils habitent se trouve au-dessus d’une épicerie fermée dont les stocks rancissent et moisissent, comme leur amour ; Peter est sujet à de drôles de manies – notamment celle qui remplit l’appartement de parapluies trouvés dans le cimetière où il travaille… Il faut enfin considérer le ton détaché, presque froid, avec lequel la narratrice raconte, de manière factuelle et distanciée, cet amour, comme une dissonance de plus. S’installe ainsi une atmosphère étrange et morbide, l’air de rien, comme si tout était parfaitement normal.

Allez-Hop !, William Gropper (par Yasmina Mahdi)

Ecrit par Yasmina Mahdi , le Vendredi, 20 Novembre 2020. , dans La Table Ronde, Les Livres, Critiques, La Une Livres, USA, Roman

Allez-Hop !, William Gropper, octobre 2020, 216 pages, 26,50 € Edition: La Table Ronde

 

Quartier Loisada

William Gropper, né en 1897 dans le Lower East Side de New York (appelé parfois le quartier Loisada), de parents juifs venus de Pologne et d’Ukraine, aîné de six enfants, décédé en 1977, a étudié l’art et la politique à la Ferrer School. Son roman graphique Allez-Hop ! a été publié en 1930 aux États-Unis. Gropper dessinait pour le New York Tribune, divers journaux de gauche et des magazines yiddish. En 1953, il a été mis sur la liste noire pour « activités anti-américaines ». James Sturm, dessinateur et écrivain, a préfacé le roman graphique, et Art Spiegelman, auteur du célèbre Maus, a signé la 4ème de couverture. Ici, La Table ronde propose une version française, en fac-similé.

Le roman ô combien expressif Allez-Hop !, édité au format de 15,3 x 22 cm, a été élaboré sans un phylactère, sans un mot et en noir et blanc. D’un trait sûr, minimal, presque brut, Gropper campe ses premiers personnages, un couple d’équilibriste et de trapéziste musclés, voltigeant dans l’air au-dessus d’une marée de minuscules taches, de points ressemblant à du sable : le public (?).

Aux antipodes, Jacques de Loustal (par Yasmina Mahdi)

Ecrit par Yasmina Mahdi , le Jeudi, 08 Octobre 2020. , dans La Table Ronde, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Arts

Aux antipodes, Jacques de Loustal, septembre 2020, 192 pages, 32 € Edition: La Table Ronde

 

Loustal paysagiste

Jacques de Loustal, né à Neuilly en 1956, a étudié l’architecture, et publié, tous genres confondus, plus de 80 ouvrages. Bédéiste, illustrateur, Loustal nous offre son nouveau livre, Aux antipodes, qui fait l’objet d’une exposition à Bruxelles (chez Huberty & Breyne Gallery, du 5 au 26 sept. 2020). L’album, splendide, que l’on pourrait identifier à un carnet de voyage, est aussi un journal personnel graphique. Dans une mise en page élégante, l’on découvre des paysages mystérieux, des « terrains de jeux » jusqu’aux antipodes. À la façon de Jules Verne, nous effectuons un énigmatique tour du monde, peu peuplé, où la nature vierge domine, à travers plus de 157 tableaux originaux. Loustal cite écrivains et plasticiens qui l’ont inspiré, de Gustave Doré à Philippe Druillet (au parcours éclectique identique au sien), Yvan le Corre, Paul Theroux, etc.

Sanguinaires, Didier Ben Loulou (par Philippe Chauché)

Ecrit par Philippe Chauché , le Jeudi, 24 Septembre 2020. , dans La Table Ronde, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Arts, Albums

Sanguinaires, juillet 2020, 96 pages, 24 € . Ecrivain(s): Didier Ben Loulou Edition: La Table Ronde - La Petite Vermillon

 

« Quelles mers résonnent au fond de nous, dans cette nuit d’exister, sur ces plages que nous nous sentons être, et où déferle l’émotion en marées hautes » (Fernando Pessoa, Le Livre de l’intranquillité) (1).

Sanguinaires est l’album d’un photographe de l’intranquillité et du tragique qui rôde. La lumière qui décline porte ce tragique. Le photographe la saisit, la nuit s’annonce, le ciel en témoigne, et la mer en porte les premières traces. Le photographe est là, face au large, c’est une Ode Maritime (2) qu’il offre, à ses pieds un reflet dans une flaque de mer, et le bleu noir profond de la Méditerranée, c’est la première photo de Sanguinaires.

L’histoire se poursuit, un palmier qui se dérobe, une terrasse face à la mer qui se lève, l’écume des vagues comme une lettre adressée au photographe attentif à son précieux regard. Des volets bleus qui s’ouvrent sur un jardin. Là, des pins parasols qui s’élancent telles des vigies. Ici, le regard d’un mouton, et toujours cette incroyable lumière sous tension, où le ciel bleu, gris, noir rejoint l’ocre de la terre, et le vert des arbres.

Le Temps suivi de Notre-Dame, William Cliff (par Philippe Leuckx)

Ecrit par Philippe Leuckx , le Vendredi, 05 Juin 2020. , dans La Table Ronde, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Poésie

Le Temps suivi de Notre-Dame, mars 2020, 128p., 15€. . Ecrivain(s): William Cliff Edition: La Table Ronde

 

Ce seizième livre de poèmes (un sixième chez l’éditeur parisien) prend le « temps » comme sujet, comme « matière » ouverte, et sert une sorte de fil rouge qui mène en amont à Autobiographie ou à Journal d’un innocent, puisque le poème a pour projet d’évoquer ce « temps » de soi, au fil de très longs poèmes descriptifs, narratifs, dédiés à la jeunesse, passée à Louvain l’Ancienne, à quelques voyages (le poète est un hardi promeneur), à des rencontres, à des amours, à de pauvres résidences, si peu meublées, si peu coûteuses, bien inconfortables pour y loger patience et écriture.

Et pourtant, de là sont nés ces textes, largement autobiographiques, âprement personnels par leur diction, très syntaxique, leurs supports (alexandrins, dizains…) classiques, leur langue (ne rechignant guère à proposer archaïsmes, orthographe médiévale et autres néologismes) fidèle à la pure tradition des Villon et Verlaine.

Cliff relate ainsi ce métier difficile de professeur de français, se blâme de l’avoir pratiqué sans grande conviction parfois, mais de là sont venus ces poèmes lucides, francs, un peu tristounets, pleins d’alarmes et de doutes, vécus de l’intérieur et tout de même de promesses peu visibles :