La colline du mauvais-conseil, Amos Oz (par Anne Morin)
La colline du mauvais-conseil, Amos Oz, Gallimard, Coll. L’Imaginaire, novembre 2020, trad. hébreu, Jacques Pinto, 248 pages, 10,50 €
Ecrivain(s): Amos Oz Edition: Gallimard
« Et Edouard répliquait avec sévérité : Mes amis je vous en prie, revenons à l’ordre du jour » (p.244). Il n’est pas indifférent que cette injonction soit faite par le superviseur anglais d’une opération visant à l’épuration de l’eau, aux deux « ingénieurs », juif et arabe, au temps de l’occupation britannique.
Trois histoires liées, nouées par les enfants, enfants de l’immigration juive, dont l’un, Uriel qui en est le pivot, prend les traits et en partie l’existence d’Amos Oz.
Dans le premier récit, la mère d’Uriel s’enfuit avec un lord anglais, l’enfant sera envoyé au kibboutz, dans le second les parents semblent fomenter un complot pour chasser l’occupant, dans le troisième où la parole est donnée à un médecin atteint d’une maladie incurable, Uriel confié aux bons soins d’une tante attend le retour de ses parents… aucun de ces récits ne reflète ou ne recouvre la réalité complète de la vie de l’enfant Amos Oz, mais tous en possèdent une part, un contour :
« Mais qu’a-t-elle donc ? demandait O’Larry, amusé. Quel étrange pouvoir possède cette vieille terre au visage aride et sans vie pour que vous l’aimiez tous à en devenir fou ? Un jour, je me trouvais au sud de l’Iran. J’y ai vu les mêmes malheureuses collines couvertes d’une lèpre grise de cailloux, d’oliviers rabougris et de ruines. Mais personne ne s’y précipitait du bout du monde pour les conquérir ! » (p.229-230).
Quel est cet « ordre du jour » que chacun espère tout en n’y croyant pas, tout en le redoutant ? C’est peut-être cela qu’exprime le docteur Nissenbaum qui rédige sa dernière lettre – en forme de testament – à la femme aimée qui l’a quitté pour l’Amérique, Hermina, Mina… qu’il appelle aussi Yasmine, du nom d’une femme arabe qui l’a troublé… Comment réconcilier, comment rejoindre ?
Anne Morin
Amos Oz est né à Jérusalem en 1939. Depuis un premier succès international avec son roman Mon Michaël, il s’est imposé comme l’écrivain israélien le plus important de sa génération. Il a reçu de nombreux prix littéraires et distinctions à travers le monde, dont le prix Femina étranger pour La boîte noire. En 2004, Une histoire d’amour et de ténèbres lui a valu un succès populaire inédit. L’essentiel de son œuvre est disponible en français aux éditions Gallimard. Amos Oz est mort à Tel-Aviv le 28 décembre 2018.
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