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L’Ascension, Les Trafiquants d’éternité, Amélie de Bourbon Parme (par Philippe Chauché)

Ecrit par Philippe Chauché 17.01.25 dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Biographie, Récits, Gallimard

L’Ascension, Les Trafiquants d’éternité, Amélie de Bourbon Parme, Gallimard, octobre 2024, 496 pages, 23 €

Ecrivain(s): Amélie de Bourbon Parme Edition: Gallimard

L’Ascension, Les Trafiquants d’éternité, Amélie de Bourbon Parme (par Philippe Chauché)

 

« D’un pas tranquille, il longea le Tibre en pensant avec bonheur que la disparition de ceux qui avaient fait sa fortune le laissait désormais tout à fait libre de tracer son chemin vers le sommet de l’Église » (L’Ambition).

« La lumière du jour commence à percer à travers les volets de la chambre. On entend une petite musique venue de la chapelle attenante.

Alors que j’arrive au seuil de mon existence, jamais le passé et le présent ne m’ont semblé si proches, j’ai la sensation physique et morale que tous les moments importants de ma vie s’agrègent comme une nuit se mêlant au jour » (L’Ascension).

L’Ascension est le deuxième volet de la trilogie imaginée avec tant de finesse, de subtilité et de force par Amélie de Bourbon Parme. La trilogie de la vie, de ses revers, ses éclats, ses rencontres, ses paris et stratégies, et de l’amour qui ne cesse d’illuminer Alessandro Farnèse, qui deviendra pape en 1534.

Mais le temps qui passe et celui qui se retrouve sont les amis fidèles des écrivains de talent. Le temps ne presse pas et nous allons poursuivre et vivre cette aventure italienne où, d’une guerre à une trahison, se construit un monde en pleine Renaissance. L’Ascension est le roman du couronnement, et de son apprentissage. Nous avions quitté Alessandro Farnèse à la mort du pape Alexandre VI, le 214ème pape Rodrigo Borja devenu un Borgia, lors de son arrivée en Italie, qui dirigea l’église catholique et romaine de 1492 à 1503, à la mort également de Pie III, Il mourut par défaut, un peu comme il avait été élu. Giuliano Della Rovere s’installa le 1er novembre 1503 sur le trône de Rome, il prit le nom de Jules II, protecteur de Farnèse. Dans ce nouvel opus, tout aussi brillant et passionnant que le précédent (1), notre héros (2) se trouve dans sa légation d’Ancône, saisi dans ses chairs et son esprit, par mort qui s’invite à nouveau, sa sœur aînée a été assassinée. Amélie de Bourbon Parme s’approche une nouvelle fois au plus près du futur pape, de cet homme de chair et de soie, comme on le dit d’un torero, qu’elle accompagne, qu’elle suit à la trace familiale, qu’elle écoute, qu’elle voit, comme nous le voyons, au cœur de ses tremblements de vie, de ses douleurs, de ses colères profondes et intérieures et de son héroïque ambition qui le conduira sur le trône de l’apôtre Pierre.

« Avant de descendre l’escalier, il fit un tour par la petite chapelle pour y admirer la procession des rois mages qu’il aimait tant. Face aux lignes presque vivantes de cette fresque, éclairée par le rayon traversant le vitrail, il préférait penser que la conquête du pouvoir était un art avant d’être une guerre ».

Mi-septembre 1512

« Le pape entra vivant dans la mort ; jusqu’au bout il tint la barre de ce navire que Dieu et les hommes lui avaient confié. A force de le voir invincible, on l’avait cru immortel ».

Amélie de Bourbon Parme possède ce bien précieux de mettre en roman, autrement dit en espérance littéraire, l’Histoire italienne, celle de ces grandes familles qui feront pour certaines des Papes. L’Histoire n’a jamais été aussi féconde, troublante, admirable, éclairante, par ce qu’elle présage des années et des siècles qui adviendront. Le trait de l’écrivain n’est jamais forcé, toujours en nuance, préférant le pastel à l’encre noire. Ses descriptions, les situations, les dialogues, les regards de Farnèse qui entrecroisent le récit romanesque, sont autant de pierres précieuses qui ornent ce roman. L’Ascension est un roman d’émotions, comme l’on dirait un roman d’aventure, ce qu’il est aussi, un roman épris farouchement de liberté et donc de style, car il n’est point plus belle liberté que celle du style. Il irradie ce roman, cette fresque familiale éblouissante, dont on ne se détache qu’avec regret, en attendant son troisième pilier, qui sera, comment en douter, celui de la sagesse d’un pape.

 

Philippe Chauché

 

Avant de se lancer dans cette trilogie, Les Trafiquants d’éternité, on doit à Amélie de Bourbon : Le Sacre de Louis XVII, publié par Philippe Sollers dans sa Collection L’Infini chez Gallimard (Il m’avait confié que ce qui l’avait autant séduit était cette « absence de pathos », « cette bouillie romantique », « ce gras des sentiments » qui obstruent l’émotion comme les artères) ; Le Secret de l’empereur (Gallimard) ; Étonnantes histoires de l’Histoire (Editions de L’Archipel).

 

(1) https://www.lacauselitteraire.fr/l-ambition-les-trafiquants-d-eternite-amelie-de-bourbon-parme-par-philippe-chauche

(2) « Un diamant ne brille jamais plus que dans les ténèbres de la nuit ; et un héros ne paraît jamais davantage que dans les circonstances capables d’obscurcir la gloire de tout autre que lui », Le Héros, Baltasar Gracian, traduit de l’espagnol par Joseph de Courbeville, Editions Champ Libre 1973.



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A propos de l'écrivain

Amélie de Bourbon Parme

 

Amélie de Bourbon Parme a publié Le sacre de Louis XVII dans la collection L’Infini chez Gallimard en 2001, elle a obtenu la bourse de la Fondation Simone et Cino del Duca. Le Secret de l’empereur est son deuxième roman.

 

A propos du rédacteur

Philippe Chauché

 

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Rédacteur

Domaines de prédilection : littérature française, espagnole, du Liban et d'Israël

Genres : romans, romans noirs, cahiers dessinés, revues littéraires, essais

Maisons d’édition les plus fréquentes : Gallimard, Minuit, Seuil, Grasset, Louise Bottu, Quidam, L'Atelier contemporain, Tinbad, Rivages

 

Philippe Chauché est né en Gascogne, il vit et écrit à St-Saturnin-les-Avignon. Journaliste à Radio France durant 32 ans. Il a collaboré à « Pourquoi ils vont voir des corridas » (Editions Atlantica), et récemment " En avant la chronique " (Editions Louise Bottu) reprenant des chroniques parues dans La Cause Littéraire.

Il publie également quelques petites choses sur son blog : http://chauchecrit.blogspot.com