L’Agent Seventeen, John Brownlow (par Jean-Jacques Bretou)
L’Agent Seventeen, John Brownlow, Gallimard, Coll. Série Noire, mars 2023, trad. anglais, Laurent Boscq, 504 pages, 23 €
Edition: Série Noire (Gallimard)
Nom : inconnu ; pseudonyme : Seventeen ; profession : tueur à gages ; employeur : Handler. C’est à peu près tout ce que nous saurons du héros de ce gros volume d’environ 500 pages. On peut ajouter qu’il rentre d’une mission à Berlin et que son prochain contrat est de tuer l’agent Sixteen, son prédécesseur. Il sera sans doute ensuite la cible de Eighteen, mais pour le moment, c’est le meilleur. Il sait peu de choses sur les personnes qu’il doit éliminer, juste ce qu’il a pu obtenir en tirant « délicatement » les vers du nez de Handler et surtout il ne sait pas pourquoi il doit le faire. « Efficacité et silence » pourraient être sa devise. Il connaît, bien sûr, tout des armes, pilote des bolides aux vitesses effarantes ou des machines abandonnées depuis des années dont les batteries continuent à alimenter un moulin à peine rouillé. Malgré une hygiène de vie affolante, peu de sommeil, pas de repos, une alimentation déplorable, il sait tirer de son corps le maximum. Il prend des positions qu’un maître yogi ne chercherait même pas à imiter, saute de hauteurs vertigineuses sans bobo, court tout habillé plus vite que Usain Bolt.
Et tout ça, sans même une foulure, mais par contre de la répartie il en a beaucoup qu’il destine à ses ennemis, parce qu’il est drôle bien qu’il ne soit pas entouré comme ses prédécesseurs d’une cour de jeunes femmes redoutables aux formes sculpturales, belles à damner un saint, prêtes à s’esclaffer à son premier jeu de mots. Ce héros redoutable, aux vêtements infroissables, au charisme magnétique, a eu des aïeux plus humains, succombant au charme féminin, mais c’était avant, peut-être avant que les esprits changent et que « Me-too » passe par-là.
Seventeen est une machine de guerre. Il se gave d’adrénaline comme d’autres de protéines. Sa véritable mission est de faire monter la tension du lecteur. Brownlow fait tout au plus court pour éviter que le lecteur décroche de son livre : phrases simples et courtes, paragraphes courts, chapitres courts, livre découpé en parties multiples pour ne pas perdre sa page, bref un super « page-turner » ! On peut penser que l’auteur s’est donné pour mission de rendre « speed » et accro le lecteur. On ne voit pas passer le temps en lisant ce livre. On l’avale d’un trait. Á la fin, il reste sinon beaucoup de souvenirs de l’histoire, de l’écriture en elle-même, une sorte d’ivresse. Ensuite, à chacun de voir s’il peut s’intéresser à ce genre de livre et le dosage qu’il s’autorise. Une drogue, et comme il est indiqué sur le bandeau du livre, « pour les fans de Jason Bourne et de James Bond ».
Jean-Jacques Bretou
John Brownlow a fait ses études dans les lycées de Retford et d’Aylesbury avant d’aller au Keble College d’Oxford pour étudier les mathématiques. Après un an, cependant, il a décidé qu’il ne souhaitait plus savoir ce que X équivalait et est passé à la langue et à la littérature anglaises.
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