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Hôzuki L’ombre du chardon, Aki Shimazaki (par Patrick Devaux)

Ecrit par Patrick Devaux 23.10.19 dans La Une Livres, Actes Sud, Les Livres, Critiques, Roman, Québec

Hôzuki L’ombre du chardon, Aki Shimazaki, juin 2019, 128 pages, 6,80 €

Edition: Actes Sud

Hôzuki L’ombre du chardon, Aki Shimazaki (par Patrick Devaux)

 

Madame Mitsuko et Madame Sato lient connaissance lors d’un achat de livres de philosophie. Leurs enfants respectifs vont sympathiser entre eux, suscitant un amical élan entre les deux femmes. L’intrigue se noue de vies secrètes en non-dits, épreuves féminines à l’appui dans ce monde de traditions ancestrales ayant cours, encore de nos jours parfois, au Japon. L’atmosphère est brillamment rendue à l’appui du décor et de cette littérature très efficace, clairsemée de références inhérentes à la forte tradition japonaise, telle ce « Miaï » (rencontre arrangée en vue d’un mariage) qui en dira long sur le vécu d’une des protagonistes, Madame Sato, secrète avec des intentions à rebondissements.

Outre d’être libraire en livres anciens fort recherchés (cette ambiance est particulièrement bien rendue), Madame Mitsuko exerce, en soirée, un second métier dans le « Yükaku » (quartier des prostituées). Les intrigues sont multiples, notamment pour ce qui concerne les enfants, Tarô et Hanako, lesquels communiquent via « Hiragana » (écriture syllabique japonaise, Tarô étant, lui, sourd de naissance).

Le fil conducteur du roman se fait « Hôzuki » (physalis) alors que le moindre flocon de neige aura une importance majeure dans l’intrigue jouant du destin tel un « Momotarô » (conte de fées japonais). Le roman, outre d’être superbement écrit, fait la part belle aux notions importantes d’une certaine philosophie asiatique :

« Je descends à la boutique. Ma mère parle avec un client. Je l’interromps :

– Où est Tarô ?

– Il n’est pas rentré.

J’éprouve un étrange pressentiment :

– Si longtemps ?

Je téléphone chez les voisins. La jeune femme me répond :

– Tarô nous a quittés il y a une heure ! Je l’ai vu par ma fenêtre franchir la porte de votre arrière-cour.

Je suis confuse. Elle ajoute :

– Aujourd’hui, il n’a pas posé de questions intéressantes sur le bouddhisme.

– Sur le bouddhisme ?

– Oui. Il sait qui est Shaka et il m’a demandé ce que signifie “atteindre l’éveil” ».

Aki Shimazaki suscite, elle, en tout cas, l’éveil du lecteur tenu en haleine par l’étrange destin de ce petit garçon sourd, Tarô, mais aux gestes et à la maturité que parfois n’ont pas les adultes.

« Hôzuki, hôzuki, l’amour en cage

Orange comme le lis tigré

Eclatant comme le soleil.

Quelle joie ! Tu es ma lumière »… chante ainsi la sage-femme berçant l’enfant.

L’Amour en cage ? Cela reste à voir…

Et, après lecture, ne plus voir un hôzuki (physalis) qu’avec dans l’œil une étincelante lumière orange.

 

Patrick Devaux

 

Aki Shimazaki est une écrivaine québécoise, née en 1954 à Gifu au Japon. Elle a immigré au Canada en 1981 et vit à Montréal depuis 1991. Écrits en français, ses livres ont été traduits en anglais, en japonais, en serbe, en allemand, en hongrois et en espagnol.

 

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A propos du rédacteur

Patrick Devaux

 

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Patrick Devaux est né en Belgique sur la frontière avec la France, habite Rixensart, auteur d’une trentaine d’ouvrages auprès d’éditeurs divers en poésie, quelques prix d’édition, 3 romans parus dont 2 aux éditions Les Carnets du Dessert de Lune; 2 recueils de poésie récents (2016 et 2017) parus aux éditions Le Coudrier ; membre de l’AEB (association des écrivains Belges) et de l’AREAW (association royale des écrivains et artistes de Wallonie), il a aussi de nombreux contacts en France ; il anime une rubrique « mes lectures » sur le site de la revue Vocatif www.moniqueannemarta.fr de Nice depuis 2013 et fréquente de près ou de loin les écrivains du groupe de l’Ecritoire d’Estieugues de Cours la Ville  et de l’association LITTERALES de Brest ; publie aussi dans diverses revues de poésie. Fréquente aussi les réseaux sociaux, faisant ainsi connaitre la poésie d’auteurs moins connus ou disparus.