Hemingway à Taourirt Mimoun
In "Souffles"
Je l’ai vu, l’écrivain. De mes propres yeux, je l’ai vu, l’écrivain du siècle ! Ce que je vous raconte ne relève pas de l’imagination, ni d’hallucination ! Cette semaine, de vrai, au village Taourirt Mimoun, j’ai vu Ernest Hemingway ! Je ne suis pas frappé par un Djinn, ni hanté par le diable. Et je suis sûr et certain que cet écrivain est né le 21 juillet 1899 à Oak Park dans l’Illinois aux Etats-Unis et mort le 2 juillet 1961 à Ketchum (Idaho). Mais moi, je l’ai vu, ces jours-ci, d’abord à Béjaïa, comme partir sur les traces d’Ibn Khaldun. Puis Hemingway soudain a pris « la route des olives » vers la grande Kabylie. Dans les pays des Berbères, il n’y a ni petite ni grande ! Ils ont tous la même taille, celle de l’olivier ou celle de la liberté, c’est kifkif !
Puis, je ne sais pas comment, je ne sais pas pourquoi Hemingway s’est arrêté dans le village de Taourit Mimoun. Pourquoi Taourirt Mimoun ? Je ne saurai vous le dire. Tout simplement c’est le choix d’un écrivain américain couronné du prix Nobel de littérature en 1954. Un fou ! Ou peut-être l’écrivain romancier universel voulait découvrir le village natal d’un certain Mouloud Mammeri ou de Mohamed Arkoun ? Pour vous rappeler que ce grand philosophe, penseur et islamologue, est enterré au Maroc !
Cette patrie, vaste comme le paradis, qui est capable d’abriter les abeilles, les fourmis, les oiseaux, les chansons, Dieu, le ciel et la langue, pourquoi est-ce qu’elle n’arrive pas à nous offrir une petite « tombe » ? En fait, avez-vous lu le roman d’Hemingway, le texte le plus célèbre de tous ses écrits, intitulé Le vieil homme et la mer ? Un récit, une nouvelle ou un roman peu importe ! Ce soir, je vous invite à une lecture de Le vieil homme et la mer dans un village en Kabylie. Des voix, en une seule voix, se lèvent en forme de protestation : mais on ne comprend rien de cet anglais ou cet américain qui ressemble à des aboiements des chiennes en chaleur, peu importe ! Hemingway adore l’huile d’olive kabyle ! Il aime écouter Matoub Lounès et lire les poèmes Si M’hand Ou M’hand, amokrane achchouaraê ! Prince de Larbaâ Nath Iraten et de Aïn El Hammam ! J’ai placardé l’invitation sur les murs des maisons des villages. Les gens de la Kabylie m’ont pris pour un fou ! Il s’est trompé, cela, d’adresse ! disent les villageois. Oui, ce soir on va écouter un fol’artiste américain ! Mais le soir dans une petite salle reculée à Ath Yenni, la parole est donnée à Hemingway. Je suis sûr et certain, vous aussi, que cet écrivain est né le 21 juillet 1899 à Oak Park dans l’Illinois aux Etats-Unis et mort le 2 juillet 1961 à Ketchum (Idaho).
Au début de la soirée-lecture, les villageois se sentaient mal à l’aise. Mais ce soir Le vieil homme et la mer est lu en tamazight ! Le ton a changé ! La langue amazighe est nobélisée ! Nobélisable. En écoutant Le vieil homme et la mer, plutôt Amyar d Yillel en tamazight, je poste un grand salut au traducteur Mohamed Arabe Aït Kaci. Et un double merci à l’éditeur, qui n’est autre que l’écrivain et romancier Brahim Tazaghart, directeur des éditions Tira, pour son goût et son courage littéraire. Ce soir, Hemingway est content de se voir lu en tamazight, dans les villages et les hameaux. Lui qui adore l’huile d’olive et la poésie de si M’Hand Ou M’hand.
Amin Zaoui
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