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Effets secondaires probables, Augusten Burroughs

Ecrit par Anne Morin 22.02.12 dans La Une Livres, Les Livres, Recensions, Nouvelles, USA, Héloïse D'Ormesson

Effets secondaires probables, Nouvelles traduites de l’anglais (USA) par Samuel Sfez, sortie le 23 Février 2012, 334 p. 22 €

Ecrivain(s): Augusten Burroughs Edition: Héloïse D'Ormesson

Effets secondaires probables, Augusten Burroughs

Délirant, peu souvent méchant, grinçant, le ton acéré d’Augusten Burroughs, révélateur. A travers un prisme déformant, un kaléidoscope de sentiments, de pensées infuses, changeant mais mettant à chaque fois l’accent sur une malformation, un travers, une anomalie, le génome d’une certaine Amérique, valant d’autant que la révélation émane d’un Américain et non du regard (souvent) critique d’un étranger. Un regard qui s’en prend, d’abord, dès l’abord, à soi-même, exagéré et caustique :

– La consommation, (p.29) « Nous – les Américains – ne voulons que des produits fabriqués en laboratoire, testés sur des femmes et des animaux, puis emballés dans du plastique et estampillés à l’image du dernier film de Disney ».

– La course au dédommagement, (p.98) « Rien n’impressionne plus les personnes – ni la gloire, ni un diplôme dans une université de l’Ivy League – qu’une grosse compensation financière à la suite d’un problème médical ».

– Les mauvaises habitudes alimentaires, (p.256) « Alors comme ça, ces enfoirés de Crocker Farms pouvaient manger des frites et des Big Mac tous les jours ? – à la cantine scolaire – Tandis que nous avions des pizzas plates au goût sucré, encore congelées au milieu ».

– Son homosexualité, (p.261) « Je porte une chemise Oxford à boutons. Mais je veux une chaîne en or avec mon nom écrit en diamants ».

Un regard amer, désabusé, mais moqueur :

(p.261) « (…) Il y a longtemps que l’Amérique n’est plus un melting pot : c’est une vaste étendue de terre remplie de petites boîtes dans lesquelles se rangent des groupes de gens, étiquetés, prêts à l’emploi », rappel en miroir des produits de consommation.

Face à un tel étourdissement, Augusten Burroughs découvre par hasard la thérapie par l’écriture. Enfant pas vraiment voulu, enfant interrompu, subissant d’abord les disputes de ses parents, partageant ses vacances entre deux grand-mères que tout oppose, impuissant face aux crises nerveuses de sa mère, déscolarisé, en pension chez le psychiatre de sa mère, Augusten Burroughs trouve un travail dans la publicité. Le jour, c’est un Américain banal, sans problème apparent, le soir il boit son litre de whisky dans un appartement-taudis où couches de journaux et vêtements sales s’empilent sur le sol et où la vaisselle et les boîtes de conserve envahissent l’espace de l’ordinateur. Tranches de vie, tout est cru, à cru, rien ne nous est épargné. Augusten Burroughs passe ses nuits branché, comme enfant il se branchait au téléviseur. Dans ce pays où chacun est un peu le prédicateur et le psy de l’autre, tout bascule insensiblement pour Augusten Burroughs dans le regard – à la fois pitié et frayeur – d’un serrurier venu le dépanner qui, ouvrant la porte de son appartement, découvre l’ampleur sordide des strates de déchets. C’est, pour lui, le salut.

Ranger, se dit-il, dans son esprit, dans ses pensées d’abord, déballer, écrire ce qui lui passe par la tête. Et il y a de quoi faire !

Dérision de soi d’abord, mais jamais ne s’esclaffer, la tendresse derrière l’agacement. On sort de lasaine lecture de ces nouvelles d’un quotidien à côté, curieusement rafraîchi, avec l’envie de donner un coup de balai ou de peinture à ce que le regard capture, et emprisonne.


Anne Morin


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A propos de l'écrivain

Augusten Burroughs

Né en 1965 aux Etats-Unis dans l'Etat du Massachusetts, Augusten Burroughs grandit dans un univers parfois délétère où violence et alcool font partie de son décor quotidien. Marqué par la dureté de cette atmosphère, il n'hésite pas à en faire la toile de fond de ses romans, en grande partie autobiographiques. Dès leur sortie, tous sont des succès de librairie. 'Courir avec des ciseaux', publié en 2002, est une satire sociale déjantée et humoristique qui est restée dans le tableau des meilleures ventes delivresaux Etats-Unis durant plus de deux ans. Adaptée au cinéma, elle fait la fierté de son auteur et la joie de ses lecteurs. En 2003, Augusten Burroughs sort 'Déboire', un témoignage drôle et touchant autour du combat qu'il livre contre l'alcoolisme. Puis il publie 'Sellevision', un roman ensuite adapté au cinéma. 'Pensée magique', roman autobiographique fait de plusieurs nouvelles, paraît en 2008 et est applaudi par la critique. L'auteur à succès est un habitué des voyages. Très régulièrement, il visite l'ensemble du territoire américain afin de participer à des conférences et rencontrer son public. Il vit à New York et dans le Massachusetts. L'humour d'Augusten Burroughs est plébiscité par l'ensemble des Américains. Il est d'ailleurs considéré comme l'une des quinze personnalités les plus drôles d'Amérique.

(Source evenement.fr)


A propos du rédacteur

Anne Morin

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Rédactrice

genres : Romans, nouvelles, essais

domaines : Littérature d'Europe centrale, Israël, Moyen-Orient, Islande...

maisons d'édition : Gallimard, Actes Sud, Zoe...

 

Anne Morin :

- Maîtrise de Lettres Modernes, DEA de Littérature et Philosophie.

- Participation au colloque international Julien Gracq Angers, 1981.

- Publication de nouvelles dans plusieurs revues (Brèves, Décharge, Codex atlanticus), dans des ouvrages collectifs et de deux récits :

La partition, prix UDL, 2000

Rien, que l’absence et l’attente, tout, éditions R. de Surtis, 2007.