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Dominique suivi de Épectases de Sollers, Stéphane Barsacq (par Philippe Chauché)

Ecrit par Philippe Chauché 29.08.24 dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Essais

Dominique suivi de Épectases de Sollers, Stéphane Barsacq, Éditions Le Clos Jouve, mai 2024, 116 pages, 19 €

Ecrivain(s): Stéphane Barsacq

Dominique suivi de Épectases de Sollers, Stéphane Barsacq (par Philippe Chauché)

 

« Par elle-même, elle avait gardé une fraîcheur très remarquable. Elle irradiait de vie et de beauté » (Portrait d’une femme).

Une carte de Dominique à l’encre bleue : « Cher Stéphane, Heureuse de vous avoir vu, plus byzantin que jamais, c’est-à-dire très beau, comme je vous l’ai déjà dit. Et j’ai toujours raison » (Page de journal, 12 décembre 1999).

« Sollers était au cœur du pouvoir, cependant qu’il s’en tenait en retrait, par une liberté réelle. Comme Claudel, il n’a pas voulu être maudit pour réussir, il a voulu réussir quitte à être maudit » (Sur Sollers).

« Ce qui intéresse Sollers au fond ? L’élégance des êtres. Leur faculté à la joie. L’élan de la nuance du plaisir qui les détermine » (Hommage).

L’admiration conjugue à merveille sous la plume de Stéphane Barsacq le cœur et le verbe. L’écrivain est un admirateur doué du pouvoir de rendre la vie à ceux qui l’ont (provisoirement) perdue : Dominique Rolin et Philippe Sollers. Il y a tout d’abord ces liens de Dominique Rolin avec la famille Barsacq : à partir de 1956 elle vient passer quelques vacances dans la maison familiale bretonne, le grand-père André, met en scène L’Épouvantail son unique pièce de théâtre, et c’est en toute raison qu’une belle amitié la liera au petit-fils, l’écrivain et éditeur Stéphane Barsacq. De leurs rencontres, de leurs conversation naîtra un petit livre, édité à vingt exemplaires hors commerce en 2011. Cette nouvelle édition, rendue possible par Philippe Bouvier et Frédéric Houdaer, les capitaines au long cours des éditions Le Clos Jouve, s’est enrichie de textes et de photos, pour ne pas oublier nos chers disparus, leur offrir peut-être une autre vie. Dominique qui ouvre le livre, est le journal de Stéphane Barsacq, journal des rencontres, des conversations, des échanges de cartes reproduisant une toile du Titien, de Piero della Francesca, que l’on reçoit comme des fleurs, journal d’une amitié féconde qui débute le 18 mars 1998, pour s’achever le 22 octobre 2008, ces courtes notes, sont comme des esquisses légères d’une amitié profonde et vive. Un peu plus tard dans le temps des vies et des passions, l’auteur croise Philippe Sollers, nous sommes le 13 mai 2014, il a traversé de violents affronts de santé, il se déplace avec une canne, ils évoquent Dominique Rolin, disparue le 15 mai 2012 : L’espace de la discussion, elle aussi était revenue. Philippe va s’enfonçant chez les morts. Dominique en revenait soudain. Ayons en mémoire que le dernier et inachevé roman de Philippe Sollers est bien nommé La Deuxième vie (1), et que l’on y lire : Si j’en crois la Théologie, j’ai droit, après ma résurrection, à un Corps Glorieux, dont je connais les principaux caractères : impassibilité, clarté, agilité et subtilité. Voilà des caractères que l’on peut appliquer au livre de Stéphane Barsacq, qui écrit lui aussi sur les Corps Glorieux, que furent Dominique Rolin et Philippe Sollers. En prenant des nouvelles de Dominique Rolin et Philippe Sollers, en nous en donnant, Stéphane Barsacq nous offre leur renaissance, avec la légèreté d’un pianiste, celle par exemple d’Hélène Grimaud, que Stéphane Barsacq tient en grande admiration, et qu’il a édité. Sollers et Rolin auront toute leur vie partagé, tenu en haute part la musique, Stéphane Barsacq prolonge par la sienne ces passions communes. Pour bien écrire, il faut bien aimer, c’est le cas de ce livre vivifiant et gracieux.

« Rendez-vous à 11 heures du matin chez Dominique Rolin, élégante, habillée de noir, un châle rose couvrant sa poitrine et son cou. Elle ne m’embrasse pas, elle est malade. La classe incarnée » (Page de journal, 18 décembre 2000).

« À chaque Noël, avec Sollers, nous parlions de Maître Eckhart et de sa méditation sur la “naissance perpétuelle”. Après tout, la question n’est pas de mourir, mais d’avoir pu naître, fût-ce une fois, et donc, dès lors, de renaître » (Épilogue, 24 septembre 2023).

 

Philippe Chauché

 

(1) Gallimard 2024 : https://www.lacauselitteraire.fr/la-deuxieme-vie-philippe-sollers-par-philippe-chauche

 

Stéphane Barsacq avait participé à notre hommage à Philippe Sollers avec beaucoup de générosité, c’est cette générosité qui œuvre aussi dans ce petit livre : https://www.lacauselitteraire.fr/hommage-a-philippe-sollers. Quelques livres de Stéphane Barsacq : Mystica, Météores (Éditions de Corlevour), Renaître, avec Hélène Grimaud (Albin-Michel), Cioran, Éjaculations mystiques (Le Seuil).



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A propos de l'écrivain

Stéphane Barsacq

Stéphane Barsacq, né le 26 août 1972, est un écrivain et éditeur français.

A propos du rédacteur

Philippe Chauché

 

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Rédacteur

Domaines de prédilection : littérature française, espagnole, du Liban et d'Israël

Genres : romans, romans noirs, cahiers dessinés, revues littéraires, essais

Maisons d’édition les plus fréquentes : Gallimard, Minuit, Seuil, Grasset, Louise Bottu, Quidam, L'Atelier contemporain, Tinbad, Rivages

 

Philippe Chauché est né en Gascogne, il vit et écrit à St-Saturnin-les-Avignon. Journaliste à Radio France durant 32 ans. Il a collaboré à « Pourquoi ils vont voir des corridas » (Editions Atlantica), et récemment " En avant la chronique " (Editions Louise Bottu) reprenant des chroniques parues dans La Cause Littéraire.

Il publie également quelques petites choses sur son blog : http://chauchecrit.blogspot.com