Deuxième chambre du monde, Jean-Philippe Domecq
Deuxième chambre du monde, février 2017, 131 pages, 14,90 €
Ecrivain(s): Jean-Philippe Domecq Edition: Serge Safran éditeur
Dans ce roman, Jean-Philippe Domecq nous entraîne dans la métaphysique fiction, genre littéraire tendant vers un enrichissement de la perception du monde aux confins du romanesque et de l’interrogation de nature métaphysique. Deuxième chambre du monde met en scène un homme, qui semble vivre médiocrement, habité par la routine et la répétition mécanique de ses gestes et actes les plus quotidiens. Il semble ne pas avoir d’ailleurs une très grande estime de lui-même. Pour tromper son ennui, ou peut-être rechercher des sensations intenses, il scrute tout : son quartier, les lumières des immeubles voisins, la présence réelle ou supposée de ces derniers. Pourtant, un soir, sa persévérance est sur le point d’être récompensée : il voit le reflet d’une fenêtre qui s’allume, croit-il, au-dessus de chez lui. Il est envahi par cette présence, il en devient obnubilé. Le récit nous révèle, très graduellement, l’idée que le personnage central se fait de lui-même :
« C’est là que la nuit m’a dit, ou elle, l’ombre : Pourquoi avoir honte, c’est regimber contre ton inconsistance, quand telle est ta substance. N’est-il pas doux de se sentir creux au creux de l’air ? »
On le voit, cette présence de l’outre-monde est un cruel révélateur pour notre personnage central : celui de l’oubli, de la censure des questions vraiment fondamentales. Au point qu’il demande à l’apparition de le laisser espérer :
« Non, ça je n’espère plus, j’ai eu tort, d’espérer, réclamer en plus, non mais quel culot quel culot j’ai eu ! (…) Tu as raison, tu as eu complètement raison, mais complètement, j’ai eu ce tort complet, espérer !… ».
Les dernières pages du récit, comparables à un réquisitoire rendu à l’issue d’un procès, accablent l’illusion dont est victime, cet individu :
« Sais-tu que je n’ai jamais connu plus trouillard que toi ? C’est pourquoi je t’ai choisi ».
Le lecteur aura la sensation, à la lecture de ce roman, d’être susceptible d’avoir vécu ce genre de situation : négliger l’accessoire au profit de l’essentiel. Dans un style ironique, teinté d’humour et de dérision, Jean-Philippe Domecq nous conte ce rappel salutaire.
Stéphane Bret
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