De la simplicité !, Henry David Thoreau
De la simplicité !, avril 2017, trad. américain Louis Fabulet, 112 pages, 3,50 €
Ecrivain(s): Henry David Thoreau Edition: Folio (Gallimard)
A l’occasion de la commémoration du bicentenaire de la naissance de Thoreau, né le 12 juillet 1817, Gallimard réédite dans la collection Folios Sagesse, sous le titre De la simplicité !, des morceaux choisis de Walden ou la vie dans les bois, tirés de l’ouvrage précédemment publié dans la collection L’Imaginaire.
Thoreau se livre ici à un vibrant plaidoyer en faveur d’une vie simple et rustique, dans laquelle l’homme dépense en argent et en énergie juste ce qu’il gagne ou ce dont il a besoin. Pourquoi accumuler les richesses, nous dit Thoreau, alors qu’il est si simple d’avoir juste de quoi vivre ?
« Qui donc les a faits serfs du sol ? Pourquoi leur faudrait-il manger leurs soixante acres, quand l’homme est condamné à ne manger que son picotin d’ordure ? »
En effet, nous nous créons des obligations de productivité qui nous rendent la vie dure et la folie des grandeurs nous rend déprimés.
« L’existence que mènent généralement les hommes en est une de tranquille désespoir. Ce que l’on appelle résignation n’est autre chose que du désespoir confirmé ».
« Encore vivons-nous mesquinement, comme des fourmis […] Notre vie se gaspille en détail. Un honnête homme n’a guère besoin de compter plus que ses dix doigts, ou dans les cas extrêmes peut-il y ajouter ses dix doigts de pied […] De la simplicité, de la simplicité, de la simplicité ! Oui, que vos affaires soient comme deux ou trois, et non cent ou mille ; au lieu d’un million comptez par demi-douzaine […] Au lieu de trois repas par jour, s’il est nécessaire n’en prenez qu’un ; au lieu de cent plats, cinq ; et réduisez le reste en proportion ».
Comme les animaux, l’homme n’a besoin que du « grossier nécessaire de la vie » : « Pour le bison de la prairie cela consiste en quelques pouces d’herbe tendre, avec de l’eau à boire […] Les nécessités de la vie pour l’homme en ce climat peuvent, assez exactement, se répartir sous les différentes rubriques de Vivre, Couvert, Vêtement et Combustible […] ».
S’étant opposé au trop-plein économique, l’auteur se livre alors à plusieurs éloges. Tout d’abord un éloge de la lecture, du savoir, de la connaissance. Ayant exercé pendant quelque temps le métier d’instituteur, il est très porté vers les livres, qu’il caractérise comme « la fortune thésaurisée du monde et le dû héritage des générations et nations », et vers la connaissance des grands hommes de l’Antiquité.
On trouve ensuite un éloge de la solitude, à l’instar d’un Pascal qui pense que le malheur de l’homme consiste à ne pas pouvoir rester longtemps seul dans une chambre. L’auteur a en effet vécu deux ans dans une cabane forestière près de l’étang de Walden et fait l’expérience de la solitude rustique :
« Je trouve salutaire d’être seul la plus grande partie du temps. Etre en compagnie, fût-ce avec la meilleure, est vite fastidieux et dissipant. […] Nous sommes en général plus isolés lorsque nous sortons pour nous mêler aux hommes que lorsque nous restons au fond de nos appartements ».
Thoreau termine enfin par un éloge de la vérité, qui est pour lui la seule vraie hospitalité, celle qui vient du cœur : « Mieux que l’amour, l’argent, la gloire, donnez-moi la vérité. Je me suis assis à une table où nourriture et vins riches étaient en abondance, et le service obséquieux, mais où n’étaient ni sincérité, ni vérité ; et c’est affamé que j’ai quitté l’inhospitalière maison. L’hospitalité était aussi froide que les glaces ».
Cette conduite de vie individuelle, hymne épicurien à la vie simple et rustique, qui peut servir d’exemple, pourrait se résumer à la formule suivante : le bonheur réside dans l’adéquation des besoins et des désirs, et nul n’a besoin de tant de biens.
Sylvie Ferrando
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