Connaître et apprécier, Guillermo De La Roca
Connaître et apprécier, PhB éditions, Chroniques du ça et du là, 2013, 160 pages
Ecrivain(s): Guillermo De La Roca
Né en 1929 en Argentine, Guillermo de La Roca est peut-être plus connu comme musicien que comme écrivain, du moins pour ceux qui s’intéressent à la musique andine qu’il pratique et qui l’a amené à jouer avec quelques groupes de renommée (Los Calchakis, par exemple).
Ce recueil de nouvelles, dont le titre, Connaître et apprécier, semble un programme, a été publié en 2013 par les éditions PhB et nous permet de découvrir un écrivain méconnu, pour ne pas dire inconnu, qui mérite que l’on porte plus d’attention à son travail. Au fil des 16 nouvelles du recueil, nous découvrons en effet une voix qui sait jouer d’une ironie séduisante au travers des territoires de l’imaginaire, des mythes et des croyances, de la rationalité. On craint parfois de glisser dans un registre et une sensibilité « new age » dont on peut penser qu’elle est « hors d’âge », pour ne pas dire suspecte, mais non. Ce qui se déploie au fil des pages est d’un autre ordre.
Le recueil tire son titre de la première nouvelle qui tisse d’étranges liens entre loisir extrême, tourisme pour riches et violences des situations de guerre, dans un no mans land dont on ne sait s’il témoigne de la folie des simulacres ou de la brutalité implacable du réel.
Chaque nouvelle explore un autre monde, mais on retrouve dans presque chacune un goût du paradoxe et de la fantaisie, un regard à la fois plein de rêves et sans aucune illusion sur le monde.
L’on passera ainsi d’un dialogue entre un vieux professeur et son ancien élève, devenu libraire, qui échange sur le surnaturel et la mythologie des anges sous le regard attentif… de leurs anges gardiens ! Des anges qui ont bien du travail et qui se sentent assez mal traités par leur hiérarchie, très administrative et plutôt maltraitante, même si divine.
Dans un mode où la rationalité technologique et le sens des affaires entendent régenter les vies des hommes, Guillermo de La Roca développe une résistance tranquille, radicale même si plutôt souriante, qui est de celles qui peuvent ré-enchanter le monde, le rendre infiniment plus vivable, même si assumer une vie et la mener à bien n’est jamais facile, que l’on soit homme ou cheval, indien des Andes ou informaticien surdoué sur la Côte d’Azur.
Une voix discrète mais des plus plaisantes, qui n’écrit pas pour ne rien dire, qui sait nous faire sourire et rêver tout en questionnant le monde avec la complicité du lecteur.
Marc Ossorguine
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