Clarté naissante, Francis Gonnet (par Parme Ceriset)
Clarté naissante, Francis Gonnet, mars 2020, 54 pages, 10 €
Edition: Editions du Cygne
« Clarté naissante »… Voilà un titre qui interpelle immédiatement le lecteur et l’on comprend que ce recueil va s’inscrire dans une réflexion existentielle. En effet, ces deux mots font écho à notre arrivée au monde, et naître à la clarté, c’est surgir des ténèbres. Chaque jour de notre vie peut être une renaissance. La question qui en découle est la suivante : après la mort, rejoint-on les ténèbres ou renaît-on à la clarté ? La poésie de Francis Gonnet répondra en partie à ces questionnements. D’ailleurs, la fin ne rejoint-elle pas le commencement, comme le suggère cet extrait de l’Apocalypse, cité par l’auteur en introduction, qui symbolise l’éternité ?
« Je suis l’alpha et l’oméga / le commencement et la fin » (Apocalypse 21.6)
Le recueil est scindé en trois parties : « Celui qui était », « Celui qui est », « Celui qui vient ».
Celui qui était…
Le poète s’intéresse aux débuts de l’humanité :
« Aux premières heures / on respirait la passion des chants inconnus / le désir de l’aube ».
« Il n’y avait rien qu’un germe / tout restait à créer ».
On perçoit entre les lignes une évocation de l’acte créateur :
« Dans l’argile du silence / l’eau façonnait ses premiers mots ».
« Tes paroles portaient la paix des eaux /Le vent embrassait les nuages / enfantant, d’un seul souffle, une lumière d’étoile ».
Puis il est question des premiers humains, de la naissance de la spiritualité :
« On s’enivrait de la beauté des dunes / nos regards à genoux devant l’immensité ».
« Chaque heure était naissance ».
Naissance de chaque création du créateur qui, elle-même, enfante une créature qui devient créatrice à son tour : un des cycles de renaissances.
L’auteur évoque aussi ses premiers pas dans l’existence :
« Je percevais les palpitations du vent, l’azur d’un regard, les premiers mots d’enfant ».
Mais à peine né, l’homme porte déjà en lui le germe de sa mort : « Parfois, j’étais ma propre nuit ».
Dès le commencement de sa vie, intuitivement, il se sait condamné :
« Tu sentais glisser le pavé sous la semelle du temps, Alors, je serrais fort ton regard ».
« Celui qui était », c’est aussi l’auteur lorsqu’il était enfant :
« nos yeux s’ouvraient aux pétales du printemps / on râpait les heures sur le tapis de l’enfance ».
Puis l’enfance s’évapore peu à peu pour laisser place à l’adolescence et à l’âge mûr. Chaque jour écoulé est une mort et une naissance :
« On devinait sous ses paupières closes, la transparence d’une clarté naissante ».
Celui qui est…
« Celui qui était » a laissé sa place à « Celui qui est », c’est-à-dire l’auteur adulte au moment où il écrit ce livre :
« J’écris au creuset de la nuit pour combler le silence / entendre de qui n’a pas de mot (…) »
Il perçoit en chaque être l’étincelle divine :
« Je lis, parfois, le sourire du ciel sur ton regard ».
Il lui arrive même de sentir la présence de celui qu’on pourrait appeler l’Éternel :
« J’entends ton chant vibrer aux tempes de la nuit,
un crépitement de joie dans l’âtre du silence ».
Mais il est traversé par des moments de doute :
« Je ne trouverai ni sérénité, ni sommeil… »
Il a pleinement conscience d’être aussi un être de chair :
« Si j’appartiens à ce monde / mes mains et mes mots doivent travailler la terre ».
Et paradoxalement, en cela, il rejoint aussi le créateur par l’acte de créer.
Quand l’angoisse le saisit, il tente par la pensée de retrouver l’insouciance de l’enfance :
« Je croque chaque coin de l’enfance / le biscuit s’émiette mais le goût persiste ».
Puis il cherche à percevoir le souffle de l’esprit créateur :
« Je me hisse à hauteur de vent / pour deviner la main qui porte ton envol ».
Cette révélation fugace lui inspire cette réflexion sur l’éternité :
« La plénitude sans fin est-elle le bonheur d’un instant ? »
Celui qui vient…
Celui qui vient est celui qui meurt un peu chaque jour, celui qui mourra un jour vraiment puis qui, peut-être, renaîtra à une nouvelle clarté :
« J’ai voulu tout garder mais il ne reste rien / juste une fumée de cendre ».
Mais « Il suffira d’une parole (…) pour (…) caresser l’eau / le vert tendre d’une naissance ».
Celui qui vient est celui qui enfin saura (« Je comprendrai ce que je n’ai pas compris / Je regarderai au-delà de la Terre ») puis rejoindra l’Amour universel (« Le visage lové a l’aisselle d’une mère / le temps sera sans mesure ») et se fondra au créateur (« Ma voix prolongera ton silence / comme reflet à la voûte du temple »).
Il y a tout de même une interrogation sur ce qui restera de la vie de jadis, celle d’ici-bas :
« Au-delà de toute mémoire, de toute trace de cendre (…) il restera sa parole dans nos voix (…) il restera des miettes de joie, quelques résidus de fêtes ».
Mais dans l’après, toute peur aura disparu et chaque être baignera dans la clarté :
« Je toucherai l’amour de mille regards (…) Je n’écouterai même plus la nuit / la lumière se rapprochera de l’herbe qui tremble ».
En conclusion : un très beau voyage au cœur de la condition humaine et de la quête universelle de sens, toute éclairée de poésie et de spiritualité.
Parme Ceriset
Francis Gonnet, né en 1959 à Paris, est Docteur en sciences. Il a fait de la recherche en endocrinologie avant de faire sa carrière dans l’industrie pharmaceutique, à la direction du marketing et des ventes. Actuellement il est consultant en communication et management. Par son environnement familial, il est attiré dès son plus jeune âge par l’art, aussi bien la peinture que la musique et la poésie. Grace à son père, poète, il participe à diverses réunions de cercles poétiques et côtoie de nombreux poètes. Il écrit et peint depuis des dizaines d’années, publie dans quelques revues et reçoit le prix de poésie de Doué la fontaine.
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