Botaniska poesi, Pierre-Olivier Lambert (par Didier Ayres)
Botaniska poesi, Pierre-Olivier Lambert, éditions Ars-Poetica, mars 2023, trad. suédois, Laure-Hélène Dardelay, 111 pages, 18 €
Âpreté
Dire en quoi ma lecture s’est appuyée sur le style de l’auteur bordelais Pierre-Olivier Lambert, c’est désigner une pointe sèche, une âpreté de la touche, un caractère maigre (comme on l’oppose au gras en peinture), un lyrisme sourd, une pratique de l’épure, une absence d’emphase, somme toute une poésie taillée sans aucune exagération, une sorte de poésie d’une rigueur crue presque rude. Du reste, la répartition physique de l’ouvrage reprend bien l’idée d’un ordre esthétique. Calme énonciation distribuée en 10 sections de 4 poèmes, assorties d’une dernière section d’un seul poème, correspondant en un sens à la chronicité des saisons et des cycles de la nature. Ici, tout tourne autour du Jardin botanique de Göteborg – d’où la traduction en suédois (ce qui est original pour un livre publié en français).
Poésie âpre donc, lithique, dont l’élégance à la fois imagée et silencieuse traite d’une nature policée, abordant des espèces végétales au gré des déambulations dans le Jardin, et qui reste en suspens au-dessus des bambous, des roses ou des herbes aromatiques. Il faut ici sans doute une expression métallique pour traduire la force du trait, de la gravure (et signalons au détour la belle illustration d’un Rhododendron setosum de 1851 qui orne la couverture). En tout cas, en harmonie avec le ciel de la Suède – pays des aurores boréales. Avec peu de matière, surtout sans pathos, nous avançons dans ce pays du nord, au milieu d’un jardin qui pour finir prend des airs orientaux, nous ramène au Japon, au mode du Haïku.
au vert de mes pleurs
les oiseaux piaillent
mon prochain retour
essoufflées par le ciel
glissent sur mon cœur
les retrouvailles d’automne
ou
écueils du souffle
dévorent l’inadvertance
du crépuscule
geôle de verrière
le soupir pris au piège
du clair de lune
Didier Ayres
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