Apolline et la vallée de l’espoir, Lim Heng Swee (par Yasmina Mahdi)
Apolline et la vallée de l’espoir, Lim Heng Swee, Grasset Jeunesse, août 2020, trad. anglais, Christian Demilly, 48 pages, 15,50 €
Edition: GrassetGrand Soleil
Lim Heng Swee, originaire de Kuala Lumpur en Malaisie, est un auteur illustrateur qui a commencé par créer des paysages minimalistes où la courbe domine. S’inspirant des estampes japonaises, reprenant librement La grande vague de Kanagawa d’Hokusai, il a figuré également dans ses perspectives des chats blancs – des maneki-neko (chats porte-bonheur) – se fondant, se révélant ou se dissolvant au sommet de la houle de l’océan et des montagnes enneigées. Dans ce tout récent album, Apolline et la vallée de l’espoir, Lim Heng Swee campe l’histoire d’une petite fille solitaire habitant au fond d’une vallée, Apolline, au prénom de la martyre chrétienne d’Alexandrie, morte en 249. Une menace terrible vient assombrir l’univers pacifique de la petite semeuse et planteuse de tournesols. Ainsi, les très jeunes lecteurs vont apprendre que la particularité du tournesol, appelé Hélianthe ou Grand Soleil, plante annuelle, se trouve dans le fait qu’il se tourne le long de la journée vers le soleil, d’où son héliotropisme. Dans le langage des fleurs, en Chine, le tournesol est une nourriture d’immortalité. Le jus de sa tige apporte la sagesse.
Quelque chose cependant vient troubler la paisible vallée où séjourne Apolline : l’apparition d’un nuage noir, menaçant, annonce et signe d’un malheur, d’une maladie. Néanmoins Apolline ne perd pas espoir, et toute la puissance de la fleur solaire va l’accompagner dans sa quête. Le registre graphique est sobre, dépouillé, l’on y retrouve la spirale nuageuse tracée à grands traits à l’encre. Les lignes sous forme d’ondulations composent un mouvement harmonieux et ne sont pas sans faire penser à la calligraphie arabe – la Malaisie a pour religion d’état l’Islam du courant sunnite et de l’école chaféite. Les festons des altostratus se contractent, modèlent tantôt un animal, un cœur, tantôt une vague, un bosquet feuillu. L’épure noire domine, excepté ici ou là quelques touches jaune solaire et vert tendre. Le texte est rédigé en termes assimilables afin d’enrichir le vocabulaire d’enfants dès l’âge de 5 ans. En effet, avec peu de détails, Lim Heng Swee va permettre au jeune public de se familiariser avec le blanc, le vide, la justesse du dessin, par exemple, par la variété des déclinaisons autour d’une seule fleur, le tournesol.
L’espace est traité de façon onirique, les divers éléments sont représentés à une échelle libre, à hauteur d’yeux d’enfants. Dans ce joli récit, la fillette se trouve au cœur de la nature, et en découvre la complexité des cycles. Le message est actuel : apprendre à fusionner avec respect avec l’environnement immédiat de l’eau, des arbres, des fleurs, du vent.
Yasmina Mahdi
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