Animaux en balade (par Yasmina Mahdi)
Mon oiseau… Ned, Christian Demilly, Marlène Astrié, Grasset-Jeunesse, mars 2019, 36 pages, 14,50 €
Un oisillon noir qui ressemble à un corbillat, volète de page en page dans ce bel album au format presque carré (28x25,5 cm). Il existe une grande quantité d’oiseaux au plumage noir, que ce soit la fauvette à tête noire ou le martinet noir, et bien sûr le merle. Celui du livre va se transformer à la fin de son adolescence en une sorte de passereau, oiseau chanteur et percheur, ou de Grand Pic, oiseau sédentaire de la forêt.
L’univers que découvre l’oison au bec orange se situe à hauteur d’yeux. Les gros plans et les fonds variés, souvent pastels, permettront à l’enfant – ici, une lecture pour les tout-petits – de s’identifier au monde neuf que perçoit l’oiselet tombé du nid et orphelin. L’habitat de nos amis à plumes est précisé par des branches feuillues délicatement peintes, des perchoirs et un nichoir – la maison indispensable pour la sauvegarde de l’espèce ailée.
Le noir englobe l’ensemble de la gamme chromatique, employé dans les arts plastiques comme taches, empreintes, ombres. Les phrases poétiques du texte de différentes couleurs inciteront l’enfant à l’apprentissage du respect et de l’amour envers tous les êtres vivants, et plus petits que lui.
Dès 3 ans.
Christian Demilly, auteur. Études de philosophie, assistant d’édition, directeur de collection (Palette, Autrement jeunesse, La Collection chez Grasset-Jeunesse).
Marlène Astrié, illustratrice, graphiste. Diplômée des beaux-Arts d’Épinal. Vit à Strasbourg. Mon oiseau est son premier album.
La Balade de Koïshi, Agnès Domergue, Cécile Hudrisier, Grasset-Jeunesse, février 2019, 68 pages, 20 €
Ce récit évoque la végétalisation et la fragilité de l’environnement. Le microscopique alterne avec le gigantisme : un grain de riz se promène et nous fait découvrir la vastitude du paysage, la force du macrocosme. La nature, changeante selon les saisons, le temps, la pluie, le soleil, étonnent le petit Koïshi. Sa forme élémentaire lui permet de s’acheminer discrètement et avec légèreté jusqu’à la fin de l’album. Koïshi, mot japonais pour le caillou, le galet, est le prénom du petit héros en balade vers le chemin de vie. L’épure des cailloux, feuilles, fleurs, végétaux, nuages, soleil, est celle du monde flottant.
Il n’y a ni début ni fin dans le grand vide qui détermine l’univers. Ainsi, le minuscule grain de riz saute tel un pois de senteur du printemps à l’hiver, parfois à l’aide de simples échelles de corde. Ce livre en accordéon ou leporello se déplie en un long tableau rectangulaire, une bande-ruban où il est possible de suivre le trajet effectué par Koïshi. La trace de la naissance, l’impact de la disparition vont autoriser une renaissance, en un mouvement perpétuel, une croissance sans fin. Le parcours du grain de riz est ponctué d’une prose proche des haïkus. Rien n’est discontinu, tout est relié, tout est harmonie. Un chemin en pointillé, et plutôt le chemin que le but…
Dès 3 ans.
Agnès Domergue, née en Corée en 1976, est musicienne et illustratrice. Études d’alto au CNSM de Paris, membre du quatuor Antares depuis 2007.
Cécile Hudrisier, née à Villeneuve-sur-Lot. Maîtrise d’Arts Plastiques à l’Université de Toulouse-le Mirail en 1999. Travaille pour la presse jeunesse. Vit à Toulouse.
La meilleure façon de marcher ?, Anna Castagnoli, Gaia Stella, Grasset-Jeunesse, février 2019, 40 pages 14,50 €
Cet album cartonné n’est pas sans rappeler le travail épuré des livres-jeunesse du Père Castor, aussi bien par la dynamique des positions des personnages que par la schématisation des divers éléments alentour. La stylisation des objets et des habitants, par exemple de Languependue, donne à voir un raffinement de détails dans les accessoires, les costumes, les vêtements à la mode, tous différents selon les personnages. La géométrisation des plans, des figures planes, des structures aplanies, en élévation, des lieux, de la végétation, de l’architecture dispense une lecture visuelle riche. En observant les fragments et morceaux composant les femmes, les hommes et les animaux, les enfants pourront développer leur imaginaire. Les figurines peintes sont si originales qu’il leur sera possible de les recréer en trois dimensions, en sculpture.
Le style peut évoquer certains aspects des arts décoratifs, l’héraldique avec les bandes de couleur, les triangles et les rayures. Des formes molles aux contours déliés viennent adoucir les angles et les lignes droites, les parallèles des ponts ou des toits. Des haltérophiles roses, des équilibristes bicolores et des objets volants transitent librement dans une perspective fantaisiste. Les gardes et les soldats rappellent ceux de Kasimir Malevitch, du Bahaus, ou bien les projections graphiques d’Oskar Schlemmer – par exemple le Ballet triadique de 1922. Un vieil homme, un garçonnet et un âne déambulent en aventuriers itinérants. Notons deux protagonistes à la peau noire, des animaux familiers et d’autres, plus sauvages, certains énormes. Le texte de La meilleure façon de marcher se lit comme une fable où il faut traverser cinq villes aux noms comiques et surréalistes, pour arriver à Bonvent. Mais comment s’y prendre – à dos d’homme, d’animal, ou tranquillement, à pied ?
Dès 5 ans.
Yasmina Mahdi
Gaia Stella, née en 1982 à Milan, est illustratrice. Diplômée de l’Institut européen de Design de Milan. Vit en Italie.
Anna Castagnoli, née à Versailles en 1971 de parents italiens, est auteure et illustratrice. Diplômée en Philosophie de l’Art. Vit à Barcelone.
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