52.dimanche (XXXVII)
réel
le réel en sa représentation
n’est-ce pas là à quoi va toute tentative pour écrire ou décrire ?
oui, décrire fabrique du réel où, en quelque sorte, la réalité se défait et se refait dans le langage
fusion dans le corps de la langue du corps de la chose
produire de l’effet de réel avec un peu de vision, que sais-je, le cercle rouge de l’abat-jour de la lampe ou le reflet d’argent qui se jette depuis l’huis de la ruelle
est-ce suffisant pour motiver cette lettre dans son ensemble ?
je ne sais pas, peut-être y-a-t-il là une façon pour ma personne de plonger des sortes d’épieux dans la signification, pour détourer le déplacement maritime de la pensée ?
je ne sais plus d’ailleurs si l’effet de réel est une preuve que le rouge de la lampe existe avant que j’en fasse la remarque
le reste a lieu avec cet automne qui s’installe – et ce soleil jaune qui devient gris sur la fenêtre – dans l’accomplissement de cette lettre dominicale, laquelle est une occasion pour moi d’établir des fractures entre sacré et profane, ombre et lumière, temps et néant, être et non-être, connaître et ignorer, dans une liste bien entendu imparfaite
en tous cas, le réel qui surgit ici ou là dépend de ces couples d’épithètes
car, voyons, écrire la lampe est rouge ne vaut que parce que le cercle rouge de la lampe confine à l’accroissement violent du moment qui passe ; le cercle rouge – qui est le titre aussi d’un film de Melville pour qui ce cercle est celui de la craie sur une queue de billard – me ramène au mysticisme hindou où le rouge symbolise le sansara – à quoi s’oppose le vert, le prana
pardonnez-moi encore une fois ces égarements par des chemins tors, mais vous les mettrez sous le joug de cette nouvelle rentrée qui commence, ce que vous admettrez bien légitime j’espère, mais qui m’occupe quand même
Didier Ayres
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