52.dimanche (XVI)
lettre en ce dimanche de pâques closes
le 15 avril 2012
vacance et chemin terrestre
la matinée est très avancée, et balance déjà lentement vers midi
or, cette heure un peu curieuse de la journée, qui n’est pas pur matin, mais glisse depuis le matin vers la journée, est tout à fait au goût de la lettre d’aujourd’hui, avec sa perte, déjà, dans le temps et les lumières
car je voudrais écrire quelques mots sur la vacance
et si je dis vacance, je dois parler de ce qu’il lui fait écho, évidemment, l’occupation, ce que j’appelle métaphoriquement ici « le chemin terrestre »
je suis, depuis ma jeune adolescence, un lecteur de philosophie chinoise, et les questions de vide et de voie du milieu, je les ai faites miennes il y a longtemps, avec mes propres mots
j’en ai conclu, malgré tout, qu’il n’y avait moyen d’obtenir cette vacance, sinon à lutter en dedans, malgré le monde, lutte qui se fait contre des ronciers, sur des sentiers de cailloux – ce qui ressemble, je le vois à l’instant, à une sorte de nietzschéisme corrigé de Cioran
à ce sujet, et pour ajouter à ce que je veux dire, j’ai en tête la parabole du sénevé et des quatre terres, ce qui fait que je crois fermement que le chemin terrestre est celui du chaos et des ronces, quand la vacance est meilleure, et comme un discours
un discours, oui, pour que cela ne se ferme pas sur soi, pour que cette vacance – cet intervalle – soit une ouverture à autrui, cette paix qu’il faut pour accueillir
je pensais ce matin, devant ma page, à ce sadou qui s’accompagnait d’un jeune héroïnomane, qu’il avait sauvé de sa dépendance, en disant qu’il ne ferait rien d’autre sur terre ; il avait juste sauvé un garçon !
alors pour finir, disons que ce partage, cette cession du pain de soi ne peut se faire dans le bruit continu et le mouvement, à mon sens, ou alors, c’est le monde qui en décide avec son aveuglement et son injustice
pour tout dire j’étais très occupé cette semaine et j’ai médité longtemps sur ce motif mondain et sur le silence
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Didier Ayres
Errata 52. (XVI)
j’ai été trop brutal tout à l’heure, et je voulais dire en guise de nietzschéisme, non pas un ton qu’aurait donné Cioran, mais Nietzsche parlant des stoïques ; qu’on me pardonne ma promptitude
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