52.dimanche (XL)
entre-deux ou comment ce moment indéterminé contient la forme et l’idée de la chose
c’est aller se brûler, disons, à cet instant-là, à ce moment extraordinaire où cela fait fusion et devance la chose finie, accomplie
ainsi, pourquoi au moment où l’on écrit en avançant dans le blanc de la page comme en une surface de neige, nuitamment, monde merveilleux de l’inconnu de soi, pourquoi donc cette fusion, cet avant là ?
je dirais l’endroit où c’est la fuite, l’instant où entrent en contact trois éléments distincts, éléments terre à terre, comme l’arquebuse, tension de la corde, coup, et cœur de la cible – même si cette opération est sans doute plus compliquée, cela revient à cela
c’est-à-dire, chercher dans le petit matin comme aujourd’hui, dans le silence d’ailleurs, le haut du ciel – qui n’est jamais de fait ni haut ni bas, mais circulaire – et essayer de réduire cette force, cette violence, à une étrange confiance dans la capacité d’envelopper du langage
le réel est là, dans cette enveloppe, dans l’appropriation de la chose
dire : le soleil est comme un chardon, un buisson de flammes, revient à fermer le soleil à la taille de la langue, et dissipe ainsi le flou du soleil qui ne dit rien tant qu’il n’est pas réduit à la taille de la langue
c’est de cette façon que s’opère le destin plastique – comme les enveloppes de nos journaux, en quelque sorte – du langage
donc, être à l’affût, à la minute de la fusion, au contact du solaire
Didier Ayres
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