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Articles taggés avec: Mahdi Yasmina

Terre natale, Exercices de piété, Jean Clair (par Yasmina Mahdi)

Ecrit par Yasmina Mahdi , le Jeudi, 22 Août 2019. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Essais, Histoire, Gallimard

Terre natale, Exercices de piété, juin 2019, 416 pages, 22 € . Ecrivain(s): Jean Clair Edition: Gallimard

 

 

Dans ce livre savant, référencé, Jean Clair nous fait partager vingt-quatre exercices de piété à la manière d’un symposium, banquet propice à la dissertation, par rétrospection et par le biais de « l’écriture [qui] est un filet de mots pour attraper les papillons de l’âme », et ce, en dépit de « ce temps de pauvre littérature ». Le texte de Jean Clair participe d’une recherche paradoxale de la part absente du moi, invisible à soi – à la fois conscience (révélée par la psychanalyse), récapitulatif de ce qui nous nourrit (l’instruction, le savoir, l’art), et altérité. Ces traités sont le prétexte de considérations sur le voile des femmes, ce qu’il recouvre, sur le miroir qui révèle à l’envers, brouille également ou trompe le regard, tout en captant des apparences et des présences fantomatiques, notamment.

à propos du catalogue d’exposition Le Monde en tête (par Yasmina Mahdi)

Ecrit par Yasmina Mahdi , le Vendredi, 05 Juillet 2019. , dans La Une CED, Les Chroniques, Les Livres, Arts

Le Monde en tête, Le Seuil, Musée des Confluences, Lyon, juin 2019, 312 pages, 42 €

Couvre-chefs Initiation et fantaisie

Le mécène, collectionneur, Antoine de Galbert, fondateur de la Maison rouge à Paris en 2004, a choisi de léguer en 2017 plus de cinq cents coiffes du monde entier au musée des Confluences de Lyon. Le Monde en tête, ouvrage imposant, de belle confection, constitue le catalogue raisonné de la donation d’Antoine de Galbert, présentée au musée lors d’une exposition qui durera du 6 juin 2019 au 15 mars 2020. Des écrits d’anthropologues et d’ethnologues fournissent des explications documentées accompagnées de photographies très réussies de ces couvre-chefs fantaisistes et énigmatiques. Tout d’abord, n’oublions pas que la coiffe possède une histoire ancienne. La « couverture de tête » (Richelet, 1680) se lisait comme signe indiciel, car personne ne sortait en Europe sans couvre-chefs. Femmes et hommes étaient chapeautés jusque dans les années 60, à la ville et à la campagne. L’on se découvrait devant les instances de pouvoir (religieuses, seigneuriales, patronales), par allégeance, humilité. L’homme soulevait son chapeau pour saluer les femmes. Les femmes en « cheveux » étaient des ouvrières ou des femmes perdues, les individus sans chapeaux, des indigents.

Épopée, historiette et fable, 3 livres de la Joie de Lire (par Yasmina Mahdi)

Ecrit par Yasmina Mahdi , le Vendredi, 28 Juin 2019. , dans La Une CED, Les Chroniques, Les Livres, Jeunesse

 

Cabane en péril !, Jean-Claude Lalumière, La Joie de lire, juin 2019, coll. Hibouk, 168 pages, 10,90 €

 

Cabane en péril est un récit simple, à l’imparfait, raconté par le petit garçon Bernie. Le temps y est découpé comme dans un journal intime, mais le ton est plus perfectionné, plus disert. Au début du livre-jeunesse se trouvent de petits schémas, plutôt réduits à de simples traces maladroitement dessinées à la main, et ce sont peut-être là les miettes du Petit Poucet qui nous engagent à suivre la trame de la fiction. La littérature enfantine ne naît pas ex nihilo et il est judicieux de la part de Jean-Claude Lalumière de citer Jean de La Fontaine, des dessins animés, des héros de bande dessinée, tout en situant l’intrigue dans notre monde actuel, et d’aborder des débats environnementaux. L’on peut parler aussi, à propos de Cabane en péril, de littérature d’apprentissage, d’une édification sur les problèmes de notre planète, le sens de la responsabilité de chacun à son égard.

Animaux en balade (par Yasmina Mahdi)

Ecrit par Yasmina Mahdi , le Jeudi, 06 Juin 2019. , dans La Une CED, Les Chroniques, Les Livres, Jeunesse

 

Mon oiseau… Ned, Christian Demilly, Marlène Astrié, Grasset-Jeunesse, mars 2019, 36 pages, 14,50 €

 

Un oisillon noir qui ressemble à un corbillat, volète de page en page dans ce bel album au format presque carré (28x25,5 cm). Il existe une grande quantité d’oiseaux au plumage noir, que ce soit la fauvette à tête noire ou le martinet noir, et bien sûr le merle. Celui du livre va se transformer à la fin de son adolescence en une sorte de passereau, oiseau chanteur et percheur, ou de Grand Pic, oiseau sédentaire de la forêt.

L’univers que découvre l’oison au bec orange se situe à hauteur d’yeux. Les gros plans et les fonds variés, souvent pastels, permettront à l’enfant – ici, une lecture pour les tout-petits – de s’identifier au monde neuf que perçoit l’oiselet tombé du nid et orphelin. L’habitat de nos amis à plumes est précisé par des branches feuillues délicatement peintes, des perchoirs et un nichoir – la maison indispensable pour la sauvegarde de l’espèce ailée.

Trois gouttes de sang, Sadeq Hedâyat (par Yasmina Mahdi)

Ecrit par Yasmina Mahdi , le Vendredi, 31 Mai 2019. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Asie, Nouvelles, Zulma

Trois gouttes de sang, mai 2019, trad. persan Gilbert Lazard, Farrokh Gaffary, 192 pages, 8,95 € . Ecrivain(s): Sadeq Hedâyat Edition: Zulma

 

Sang et phosphore

Dès la première nouvelle, Sadeq Hedâyat puise au répertoire allégorique de son pays d’origine, l’Iran, à travers les jardins, la présence des animaux, la musique, la famille, les marginaux, tous étranges et entêtants. Dans un temps bouleversé, traumatisé, chaque récit recoupe un pan de l’histoire syncopée des vieux mondes islamisés, dans des espaces que hantent les morts. L’on y rencontre le chat à « la plainte déchirante », au « roucoulement amoureux », l’œil – sacré, celui du destin, l’œil porte-malheur, jusqu’à l’œil crevé de l’aveugle –, la référence parabolique aux fables, Kâlila wa Dimna, puis l’hommage au poème versifié et à la prose persans.

Ainsi, la nature morte recouverte de poussière, synonyme du passé, se remet à embaumer et à reverdir. La survivance olfactive d’« un parfum de violette » alimente la mélancolie nocturne et la folie, comme le prouve l’acharnement exalté de l’archéologue américain de la nouvelle Le trône d’Abou Nasr, taraudé par l’espoir de trouver la porte qui mène aux trésors enfouis du vieux Chiraz, tentant de déchiffrer des manuscrits complexes, et qui creuse sans ménagement l’entrée du caveau.