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Histoire

Les enfants d’Izieu, Rolande Causse-Gibel, Gilles Rapaport (par Yasmina Mahdi)

Ecrit par Yasmina Mahdi , le Mardi, 28 Mai 2024. , dans Histoire, Les Livres, Critiques, La Une Livres

Les enfants d’Izieu, Rolande Causse-Gibel, Gilles Rapaport, Éditions D’eux, avril 2024, 74 pages, 18 €

Izieu, 1944

Rolande Causse-Gibel (née en 1937, fondatrice de l’association La Scribure en 1975) est l’auteure d’un long poème, Les enfants d’Izieu, dont la déportation et l’assassinat sont de la responsabilité de Klaus Barbie (1913-1991, criminel de guerre allemand, officier de police SS sous le régime nazi), après la dénonciation d’un Français de Metz. Léa Feldblum (1918-1989), animatrice scolaire, a été la seule survivante de la rafle d’Izieu, ce dont elle a témoigné au procès de Klaus Barbie.

Ce texte émouvant et sobre nous fait revivre les ultimes moments, les petits mots de ces quarante-quatre innocents, âgés de quatre à dix ans, déportés « Le premier jour des vacances de Pâques / C’était le JEUDI 6 AVRIL 1944 ». Chacun de ces enfants a un vécu et une provenance différents, venus de toute l’Europe se réfugier à Izieu (commune du département de l’Ain, dans le Bugey). En arrière-fond, la guerre résonne, la peur de la délation, même si Radio-Londres diffuse des nouvelles rassurantes. Les enfants s’amusent, rêvent, dessinent, colorient, écrivent, fabriquent de petits objets, bien que séparés de leurs familles.

Poètes et lettrés oubliés de la Rome ancienne, Pierre Vesperini (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Lundi, 22 Avril 2024. , dans Histoire, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Anthologie, Les Belles Lettres

Poètes et lettrés oubliés de la Rome ancienne, Pierre Vesperini, Les Belles-Lettres, octobre 2023, LXVI+150 pages, 15 € Edition: Les Belles Lettres

 

On connaît, dans Cyrano de Bergerac, ces vers destinés à railler l’Académie française (où, de fait, Edmond Rostand ne fut jamais admis) : « Voici Boudu, Boissat, et Cureau de la Chambre ; // Porchères, Colomby, Bourzeys, Bourdon, Arbaud… // Tous ces noms dont pas un ne mourra, que c’est beau ! ». La perspective est évidemment celle du XIXe siècle, car ces écrivains n’étaient pas obscurs à leur temps. Ils étaient en tout cas suffisamment connus, à tort ou à raison, pour avoir attiré sur eux l’attention des protecteurs de l’Académie. Le reste fut, comme toujours, affaire de servitude ou de liberté d’esprit.

On pourrait tourner des vers analogues avec les noms de Licinius Calvus, Valerius Cato, Julius Calidus, Laevius, Valerius Soranus, ou d’un Salluste qui fut peut-être le futur historien. Même de bons connaisseurs de la littérature latine (il y en a de moins en moins) n’en auront sans doute jamais entendu parler.

Parachever un génocide, Mustafa Kemal et l’élimination des rescapés arméniens et grecs (1918-1922), Raymond Kévorkian (par Guy Donikian)

Ecrit par Guy Donikian , le Lundi, 25 Mars 2024. , dans Histoire, Les Livres, Recensions, La Une Livres, Odile Jacob

Parachever un génocide, Mustafa Kemal et l’élimination des rescapés arméniens et grecs (1918-1922), Raymond Kévorkian, Ed. Odile Jacob, août 2023, 412 pages, 30 € Edition: Odile Jacob

Raymond Kévorkian, historien, propose ici de montrer, scientifiquement, que la Turquie « moderne », celle de Mustafa Kemal, s’inscrit dans le droit fil de la Turquie du CUP (Comité Union et Progrès), au sein duquel les Jeunes Turcs nationalistes mirent en œuvre le génocide des Arméniens en 1915. Mustafa Kemal est très souvent présenté comme « un héros progressiste et laïque et le père de la Turquie moderne ».

C’est en se fondant sur une documentation très détaillée que Raymond Kévorkian nous permet de répondre aux deux questions concernant la région :

– « La République turque s’est elle fondée sur le génocide perpétré durant et après la première guerre mondiale ?

– La Turquie contemporaine porte-t-elle encore et toujours les stigmates de ces violences extrêmes ? ».

Récits de Kolyma, Varlam Chalamov (par Patryck Froissart)

Ecrit par Patryck Froissart , le Jeudi, 16 Novembre 2023. , dans Histoire, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Récits, Editions Maurice Nadeau

Récits de Kolyma, Varlam Chalamov, Editions Maurice Nadeau, Les Lettres Nouvelles, Coll. Format Poche, octobre 2023, trad. russe, Katia Kerel, Jean-Jacques Marie, 350 pages, 12,90 Edition: Editions Maurice Nadeau

 

Située à 6.000 kilomètres à l’est de Moscou, en Sibérie orientale, la Kolyma a été pendant plus de 30 ans, entre 1930 et 1953, la plus terrible zone de déportation des goulags staliniens.

Varlam Chalamov, l’auteur des Récits de Kolyma, y fut déporté durant dix-sept ans, de 1937 à 1954, accusé d’activités contre-révolutionnaires trotskystes.

En 1965 le texte, jusque-là inédit, en est proposé à Maurice Nadeau sous la forme d’un microfilm susceptible de lui être envoyé de Moscou de façon rocambolesque.

« Une de mes connaissances qui est depuis quelques mois à Moscou m’a fait parvenir par la valise diplomatique une lettre où il me dit posséder le microfilm d’un roman sur les camps de concentration de Staline où l’auteur a passé de longues années. L’homme s’appelle Varlam Chalamov… ». Lettre adressée par Nadeau à Jean-Jacques Marie, qui, lui-même ancien trotskyste, comme Nadeau, en effectue avec Katia Kerel la traduction initiale sous le pseudonyme d’Olivier Simon, pour une première publication en 1969 chez Nadeau dans la Collection Les Lettres Nouvelles.

La Louve de Dêrsim, Yasmina Kramer (par Stéphane Bret)

Ecrit par Stéphane Bret , le Vendredi, 23 Juin 2023. , dans Histoire, Les Livres, Recensions, La Une Livres, Roman, Belfond

La Louve de Dêrsim, Yasmina Kramer, Belfond, mai 2023, 178 pages, 20 € Edition: Belfond

 

En ce jour terrible du 13 novembre 2015, Paris ébauchait dans la soirée ce recensement macabre du nombre de morts et de blessés dans l’Est parisien, où avaient eu lieu les principales attaques terroristes. À quatre mille kilomètres de là, les forces kurdes procèdent à la libération de la ville de Şengal, dans le Kurdistan irakien. C’est cette guerre des femmes kurdes que décrit Yasmina Kramer dans un roman très inhabituel dans le ton général, mais bouleversant sur le fond. L’auteure du récit s’attache très sobrement à la description des combattantes, à leur origine, à leurs motivations : la narratrice, ainsi qu’Assîa, font partie des YPG, les unités de protection du peuple. Assîa dirige sous sa responsabilité quarante hommes et femmes. Les buts de la guerre sont simples, évidents aux yeux de ses troupes : lutter contre Daech, cette bande de barbares fanatiques, d’égorgeurs, de terroristes rétrogrades, qui pratiquent la terreur à grande échelle, les viols, la lapidation, pire châtiment pour les femmes qui subissent ces atrocités. Ces maquisardes excellent dans la formation au maniement des armes : charger une kalachnikov, s’entraîner au tir, ajuster rapidement son lance-roquettes…