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Verdier

 

Les éditions Verdier sont fondées en 1979 dans l'Aude, à Lagrasse, par Gérard Bobillier, Colette Olive et Michèle Planel, en dialogue avec Benny Lévy et Charles Mopsik, à qui est confiée la première collection.

Cette maison, qui possède aujourd'hui une permanence dans le XXe arrondissement de Paris, publie dans les disciplines suivantes : littérature, arts et architecture, sciences humaines, philosophie et spiritualités.


Les deux Beune, Pierre Michon (par Gilles Cervera)

Ecrit par Gilles Cervera , le Lundi, 15 Mai 2023. , dans Verdier, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Nouvelles

Les deux Beune, Pierre Michon, éditions Verdier, 160 p. 18,50 € Edition: Verdier

 

Pierre Michon, auteur rare, aura écrit en deux temps ses deux Beune ! Quasi trente ans les séparent. Point-virgule et mots précieux se réjouissent ! Michon n’avait rien publié depuis Les Onze en 2009 !

Entre lèvres et lièvres

Pierre Michon est rare.

C’est notre autre Gracq. Leurs langues nous fascinent pour peu qu’encore la langue fascine. Langue non pas traquée ni pressée, urbanisée, mais haute langue de littérature, au plus ancien sens du terme. C’est-à-dire qu’elle entoure, enveloppe, ensorcelle voire, nous prend là, si vous voyez où là est.

Là : le ventre, les rêves, le sens du sens.

L’essentiel.

La pluie jaune, Julio Llamazares (Par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Mardi, 18 Avril 2023. , dans Verdier, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Espagne

La pluie jaune (La Lluvia amarilla, 1985), Julio Llamazares, Verdier Poche, 2009, trad. espagnol, Michèle Planel, 141 pages, 10 € Edition: Verdier

 

Le vieil homme meurt. C’est sa dernière nuit dans le village fantôme dont il est le dernier vivant. Avec lui, va s’envoler la dernière âme, le dernier cœur battant, les dernières souffrances. Le bonheur, l’espoir, la joie, eux étaient partis depuis très longtemps, depuis que Sabina, la femme du vieil homme, est morte. Ils étaient les derniers habitants du village, tous les autres étaient déjà partis au fil des années, morts ou émigrés ici ou là.

La mort traverse ce court roman, celle du vieux comme un point d’orgue à celle du village de montagne dont il est le dernier souffle vivant. La mort non comme un événement mettant fin, mais comme un lent progrès de la décrépitude, du pourrissement, de la chute. Murs, toits, poutres, portes, fenêtres font écho dans leur anéantissement à celui des êtres qui, naguère, ont vécu ici, travaillé, parlé, aimé. La mémoire du vieil homme, comme un long thrène lugubre, résonne comme la malédiction inéluctable qui s’est abattue sur le village dans un destin ténébreux : après la rudesse des hivers, la dureté des travaux, la pauvreté extrême, toutes les plaies d’une humanité oubliée, est venu l’exode inexorable, le départ des jeunes rêvant d’ailleurs, puis celui des vieux, ne pouvant plus subsister dans ce mouroir abandonné qu’est devenu Ainielle (1).

Le Pas de la Demi-Lune, David Bosc (par Philippe Chauché)

Ecrit par Philippe Chauché , le Mercredi, 24 Août 2022. , dans Verdier, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman

Le Pas de la Demi-Lune, août 2022, 192 pages, 17 € . Ecrivain(s): David Bosc Edition: Verdier

 

« Alentour, ce sont surtout des garrigues, la densité nue, lente, d’un tapis de garrigue où l’herbe haute à peine plus qu’un doigt, quand elle tremble au vent, pince le cœur ».

« Nos années heureuses dans une ville heureuse n’ont pas fait pâlir les heures ni les lumières de l’enfance, elles leur ont au contraire donné un éclat plus vif ».

Voici peut-être le roman le plus profondément original, peut-être le plus romanesque, le plus troublant, le plus éclairant, le plus saisissant, de cette rentrée littéraire. Cela tient à la richesse de son imaginaire, à sa forme, son style, à la matière qu’il travaille, qu’il polit, qu’il fait émerger, sous les frondaisons de l’enfance passée aux portes de la Méditerranée. Car nous sommes à Marseille et dans ses environs dans Le Pas de la Demi-Lune, ou plutôt à Mahashima, capitale désertée d’un Royaume ancestral, nous sommes en Provence et au Japon et parfois en Chine, comme si ce pays que connaît bien l’auteur avait été colonisé par un Royaume guerrier, ou comme s’il se réveillait dans un temps ancien où l’Histoire ne serait qu’un improbable souvenir.

Un été de glycine, Michèle Desbordes (par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Lundi, 28 Février 2022. , dans Verdier, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman

Un été de glycine, Michèle Desbordes, 108 pages, 13 € Edition: Verdier

Il serait impossible de classer ce livre dans un genre. Essai, un peu. Biographie, un peu plus. Roman, peut-être. L’auteure nous dit une passion. Une passion folle, dévorante, obsessionnelle, amoureuse. Sa passion pour un homme, qui hante sa vie. Il s’appelle William Cuthbert Falkner, dit William Faulkner. Il a écrit des livres. Elle a lu ses livres. Un amour fou qui, pour se dire vraiment, doit emprunter les mêmes voix que son objet, l’écriture.

Michèle Desbordes se livre à un exercice virtuose de tressage de trois fils : les œuvres de Faulkner – en particulier Lumière d’août – la vie de Faulkner et, plus légèrement, presque de façon allusive, comme le fil le plus ténu, elle-même dans son rapport aux œuvres de Faulkner.

L’univers romanesque de Faulkner est le fil majeur de la tresse. Ses personnages reviennent en antienne, obstinément : Sutpen, Comson, Coldfield, et cette jeune fille, comme un fantôme errant, qui marche, avec son bébé dans le ventre, en cet été de glycine, pour aller à la quête de l’homme qui en est le père, « celui dont le nom a les mêmes initiales que Notre Seigneur », J.C., Joe Christmas, le mulâtre. Scène inaugurale de Lumière d’août qui revient comme le refrain d’une chanson douloureuse.

Journaux de voyage, Bashô (par Philippe Leuckx)

Ecrit par Philippe Leuckx , le Mardi, 05 Janvier 2021. , dans Verdier, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Poésie, Japon

Journaux de voyage, trad. japonais, René Sieffert, 128 pages, 14,50 € . Ecrivain(s): Bashô Edition: Verdier

 

 

Peut-être bien le plus grand poète que la terre ait porté. Sans doute le pèlerin et le marcheur le plus assumé. Que n’a-t-il traversé comme terres nipponnes ! Ce poète était aussi un fort en méditation, un expert du haïkaï, un fulgurant amateur de relations humaines authentiques.

Ses journaux de voyage relatent avec force détails ses pérégrinations incessantes. D’un gîte où il reçoit le couvert à un monastère qui l’accueille, le poète Matsuo a tout supporté des voyages, la forte chaleur, les maux de pieds, le froid cassant, l’ennui des traversées. Mais de tout cela il en a extrait une matière unique, tissée d’observations insignes du monde perçu. La moindre fleur, la plus petite bête, le moindre ciel changeant, le glissement subtil des saisons : tout est objet d’écriture immédiate .