Identification

Globe

 

Lorsque le roman devient essai…

Quand Gandhi forge, en 1908, pour les besoins de sa cause, le mot-valise satyâgraha, formé de satya, vérité, et de agraha, force, étreinte en langue hindie, il ne sait pas que cette notion simple et révolutionnaire de « force-de-la-vérité » sera le plus souvent traduite par une négation : la non-violence.

Que traduit pareillement, dans nos esprits, l’étiquette de « non-fiction » ? La vaste, foisonnante et poignante variété de textes qui, pour n’être pas des romans de fiction ni des poèmes, sont pourtant romanesques et poétiques. Enquêtes, reportages, réflexions, essais, romans non fictionnels, mémoires, récits circonstanciés sont bel et bien des inventions, mais au sens que donnent à ce mot les juristes et les archéologues. Il s’agit de mettre au jour ce qui était enfoui, d’extraire de l’ombre et de l’oubli ce qui nous éclairera, nous avertira, nous fera tomber les écailles des yeux, nous fera mieux comprendre qui nous sommes et ce que nous faisons là, dans ce monde si peuplé de semblables, d’inconnus, d’étranges étrangers, de frères.

La littérature de non-fiction, c’est l’autre force de la vérité, celle qu’imprime aux faits singuliers, aux histoires rapportées, aux liens établis entre nous et les autres, le style de chacun des auteurs de notre maison, depuis 2013 : Alysia Abbott, Ted Conover, Shulem Deen, Carl Hoffman, William Giraldi, David Grann, Mark Sundeen, J.D. Vance, Sudhir Venkatesh, Jesmyn Ward…  Et bien d’autres encore pour qui la littérature ne se cantonne pas à la fiction pure mais demeure un moyen d’interroger les frontières du genre, d’explorer la variété du monde et de la langue, de penser notre société, de raconter notre histoire collective.

Valentine Gay

 

La note américaine, David Grann

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Jeudi, 17 Mai 2018. , dans Globe, Les Livres, Critiques, La Une Livres, USA, Récits

La note américaine, mars 2018, trad. américain, Cyril Gay 324 pages, 22 € . Ecrivain(s): David Grann Edition: Globe

 

David Grann persiste, à notre grand bonheur, à réveiller des affaires anciennes, à nous les raconter dans son style simple et fluide, à les autopsier enfin avec minutie. Ce n’est ici ni une fiction, ni une de ces exofictions qui la ramènent avec du fictionnel plaqué sur la réalité historique. Il s’agit d’une enquête d’investigation menée tambour battant, sur un fait divers incroyable survenu en Oklahoma.

Nous sommes dans les années vingt. Si les réserves indiennes d’Amérique végètent dans la quasi misère, celle des Osages, au bout de l’Oklahoma, connaît une prospérité ahurissante. On a trouvé des nappes extraordinaires de pétrole dans les territoires dont ils sont propriétaires et voilà nos Indiens milliardaires, ce qui donne lieu à une incroyable – et souvent cocasse – transformation du paysage traditionnel.