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La Contrée obscure, David Vann (par Patryck Froissart)

Ecrit par Patryck Froissart , le Mardi, 07 Novembre 2023. , dans USA, Les Livres, Recensions, La Une Livres, Roman, Gallmeister

La Contrée obscure, David Vann, éd. Gallmeister, août 2023, trad. américain, Laura Derajinski, 506 pages, 26 € . Ecrivain(s): David Vann Edition: Gallmeister

 

Hernando de Soto, né en 1496 ou 1497 en Estrémadure, à Barcarrota ou à Jerez de los Caballeros, en Espagne, et mort le 21 mai 1542 dans l’actuel Arkansas, est un conquistador et explorateur espagnol. Arrivé dans la baie de Tampa en 1539, il erre pendant trois ans entre la Floride et le Mississippi. Il meurt près du fleuve américain, sans avoir découvert les immenses richesses dont il rêvait.

Ce formidable roman de David Vann, exubérant produit du jaillissement bouillonnant d’une imagination intarissable, est le récit, donc fictionnel bien que fondé sur des détails historiquement réels dont la précision témoigne de recherches approfondies de la part de l’auteur, de la lamentable odyssée de de Soto dans les immensités, la plupart du temps marécageuses, de ces terres alors inconnues des Européens, que l’explorateur appelle la « Florida » et sur lesquelles il proclame sa souveraineté, en arguant d’une capitulación royale, dès qu’il en aborde le littoral.

Construire un feu (To Build a Fire, 1902), Jack London (par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Mardi, 17 Octobre 2023. , dans USA, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, En Vitrine, Libretto, Cette semaine

Construire un feu (To Build a Fire, 1902), Jack London, éditions Libretto, trad. américain, Paul Gruyer, 176 pages . Ecrivain(s): Jack London Edition: Libretto

 

Le cadre de l’histoire, dans le froid extrême d’un Yukon en grande partie inhabité, établit d’entrée le rôle principal de la nouvelle : la Nature. On est loin de celle des romantiques qui communique avec l’âme des hommes. La Nature de ce récit est impassible, d’une cruauté tranquille dans son indifférence. A sa manière, Jack London rejoint dans ce texte sublime, le chant des grands panthéistes que furent avant lui Spinoza et Thoreau. Mais en déifiant le monde naturel, London en fait un Dieu terrible, dénué de tout affect, de toute attention, à mille lieues du Dieu bienveillant des Chrétiens. Le Dieu de Spinoza est plus proche, il est la Nature et ne connaît donc ni compassion, ni amour, ni cruauté, il est, simplement, englobant le Grand Tout.

Le ciel est vide, blanc comme un linceul, immense comme l’éternité. La terre est à l’unisson, infinie, immaculée, déserte. L’homme de cette nouvelle est seul au monde et n’a d’autre compagnon que son chien dans ce paysage spectral.

D’un monde qui n’est plus, Israël Joshua Singer (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Mercredi, 11 Octobre 2023. , dans USA, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Les Belles Lettres

D’un monde qui n’est plus, Israël Joshua Singer, Les Belles-Lettres, janvier 2023, trad. yiddish, Henri Lewi, 326 pages, 15,50 € Edition: Les Belles Lettres

 

 

À partir de 1935 et jusqu’au début de la guerre, un photographe d’origine russe, Roman Vishniac (1897-1990) entreprit, dans des conditions difficiles, de photographier la vie des ghettos et villages juifs d’Europe orientale. Dissimulant son appareil, il prit des milliers de clichés – seize mille – dont il ne put sauver qu’une fraction, les négatifs ayant été cousus dans ses vêtements lorsqu’il s’exila aux Etats-Unis, ou cachés en France. Il en résulta un livre magnifique, un des plus beaux ouvrages de photographie, A Vanished World, d’autant plus émouvant que le monde décrit avait disparu à jamais, fondu dans les flammes de la Shoah, et que la plupart des personnages figurant sur les photographies avaient été massacrés par l’Allemagne.

Le Diamant orphelin, William Irish (par Didier Smal)

Ecrit par Didier Smal , le Mardi, 10 Octobre 2023. , dans USA, Les Livres, Critiques, Polars, La Une Livres, Roman, Folio (Gallimard)

Le Diamant orphelin, William Irish, Folio, mai 2023, trad. anglais (USA) Laurette Brunius, 288 pages, 8,10 € Edition: Folio (Gallimard)

 

Paru originellement en 1985, Le Diamant orphelin est un recueil de huit nouvelles publiées entre 1935 et 1942, durant l’âge d’or du « hard boiled » américain, par l’auteur new-yorkais William Irish. À l’époque, les éditeurs ne veulent plus entendre parler de ses romans (qui ont pourtant rencontré un certain succès durant les années vingt ; ils le connaîtront à nouveau à partir de 1940 et du fabuleux La Mariée était en noir), et il écrit des nouvelles pour des « pulps », dont le célèbre Black Mask, sous différents pseudonymes. Une édition critique de ces nouvelles, environ trois-cent-cinquante, pourrait faire l’objet d’un projet éditorial, mais cela risquerait d’avoir le même intérêt que ces intégrales d’enregistrements blues ou jazz effectués à la même époque : ce sont des chansons enregistrées pour être écoutées sur un soixante-dix-huit tours, cinq minutes à la fois maximum, pas pour être écoutées en collection de plus d’une heure à la fois. Ou alors, sous forme d’une bonne compilation destinée à montrer la diversité stylistique de l’artiste musical. Il en va de même pour les nouvelles policières écrites à la chaîne par un William Irish : un recueil à la fois, un florilège, ça convient à leur donner du relief et offrir le plaisir de la lecture.

Ubik, Philip K. Dick (par Didier Smal)

Ecrit par Didier Smal , le Mardi, 03 Octobre 2023. , dans USA, Les Livres, Critiques, Science-fiction, La Une Livres, Roman, J'ai lu (Flammarion)

Ubik, Philip K. Dick, éd. J’ai Lu, janvier 2023, trad. anglais, Hélène Collon, 320 pages, 7,40 € . Ecrivain(s): Philip K. Dick Edition: J'ai lu (Flammarion)

 

Publié en 1969, mais écrit en 1966, Ubik est considéré comme le chef-d’œuvre de Philip K. Dick, et est régulièrement cité parmi les meilleurs romans de science-fiction, voire, à en croire le magazine Time, parmi les meilleurs romans écrits en anglais au vingtième siècle. Et il est vrai que la première lecture de ce roman a été marquante, voire troublante. En effet, il s’ouvre sur une situation qu’on pourrait considérer comme conventionnelle dans le cadre de la science-fiction des années soixante : en 1992, la Lune a été conquise, la société est aux prises avec des personnes possédant des pouvoirs « psi » (télépathes, précogs – dont il faut contrer les agissements) et les morts sont maintenus dans une « semi-vie » qui permet à leurs proches de rester en contact avec eux. Dans ce contexte, Joe Chip travaille pour une « agence prudentielle » : sa fonction est de tester les « inertiels » (ceux qui peuvent neutraliser les « psis ») pour son patron, Glen Runciter ; Chip tient un rien du détective privé à la vie ratée des « hard-boiled novels » et son quotidien permet une critique sarcastique du capitalisme dans son ultime aboutissement, puisqu’il est confronté à la porte de son appartement refusant de s’ouvrir faute d’une pièce de monnaie, chaque élément électro-ménager fonctionnant (ou pas…) de même.