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Hermione, Hilda Doolittle (par Yasmina Mahdi)

Ecrit par Yasmina Mahdi , le Jeudi, 29 Février 2024. , dans USA, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Editions Des Femmes - Antoinette Fouque

Hermione, Hilda Doolittle, éd. des femmes-Antoinette Fouque, janvier 2024, trad. anglais (États-Unis) Claire Malroux, 288 pages, 9 € Edition: Editions Des Femmes - Antoinette Fouque

La double

II

Dans ce texte daté de 1927, H.D. est tout juste sortie de l’université. Ici, elle se dédouble en Her Gart, en Hermione – un être mythologique, fille de Ménélas et d’Hélène, également reine de Sicile, héroïne persécutée par son époux dans Le Conte d’hiver. Notons l’admirable traduction de Claire Malroux (nommée au grade de Chevalier dans l’ordre national de la Légion d’honneur).

Hilda Doolittle questionne la nébuleuse partie d’elle-même, elle, l’anticonformiste, la double. Elle donne ici une nouvelle interprétation de l’espace confiné de la famille, un « sanctuaire », un territoire social dense, habité dans la durabilité mais dont les différences entre les membres rendent opaques les relations de proximité. H. Doolittle tente de s’en affranchir pour se libérer de sa sujétion. Son double, Hermione, refait le tour de la demeure des Gart, la décrivant au moyen d’infimes détails :

Portrait d’aujourd’hui (Paint It Today), Hilda Doolittle (par Yasmina Mahdi)

Ecrit par Yasmina Mahdi , le Vendredi, 09 Février 2024. , dans USA, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Nouvelles, Editions Des Femmes - Antoinette Fouque

Portrait d’aujourd’hui (Paint It Today), Hilda Doolittle, Éditions des femmes-Antoinette Fouque, janvier 2024, trad. anglais (États-Unis) Juliette Frustié, 128 pages, 14 € Edition: Editions Des Femmes - Antoinette Fouque

 

Pleurs, douleurs

Portrait d’aujourd’hui est une nouvelle inédite et inachevée d’Hilda Doolittle (née à Bethlehem en Pennsylvanie en 1886, décédée à Zurich en 1961), traduite pour la première fois en français par Juliette Frustié. H.D. (l’acronyme emprunté par Hilda Doolittle) a écrit ce Portrait intime en 1921, « dans un monde (…) où l’homosexualité était considérée comme une pathologie et traitée comme un crime » [A. Cazé]. Texte qui ouvre le cycle largement autobiographique d’une tétralogie, donc : Portrait d’aujourd’hui, Hermione, Dis-moi de vivre, et Le Don. Hilda Doolittle a été proche d’« Ezra Pound, de Frances Josepha Gregg, Richard Aldington et Bryher (…) soit le fiancé, l’amante, le mari, la compagne » [A. Cazé].

Nous les vivants, Ayn Rand (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Jeudi, 08 Février 2024. , dans USA, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Les Belles Lettres

Nous les vivants, Ayn Rand, Les Belles-Lettres, mai 2023, trad. anglais (États-Unis), Élisabeth Luc, 606 pages, 23,90 € Edition: Les Belles Lettres

 

Bien que la France se targue (ou se targuât ?) d’être à la fine pointe du goût et de la modernité, elle ignore coupablement le nom d’Ayn Rand (1905-1982). Née Alissa Rosenbaum, dans une famille juive de Saint-Pétersbourg, d’un père pharmacien, elle fut en sa jeunesse une lectrice assidue des grands auteurs français. La famille perdit ses biens lors de la Révolution de 1917 et, après différentes étapes, dont quelques années en Crimée, la jeune fille s’exila aux États-Unis, travaillant pour Hollywood et publiant en 1936 son premier roman, Nous les vivants. D’autres suivront qui connaîtront le succès, car une des originalités de celle qui avait choisi le pseudonyme d’Ayn Rand fut de couler ses préoccupations philosophiques dans la forme romanesque, son œuvre la plus fameuse (dans son pays d’adoption en tout cas) étant Atlas Shrugged (Le Réveil d’Atlas, publié en France sous le titre de La Grève).

L’iris sauvage, Meadowlands, Averno, Louise Glück (par Didier Ayres)

, le Lundi, 29 Janvier 2024. , dans USA, Les Livres, Les Chroniques, La Une CED, Poésie

 

Tintinnabulement

C’est à un fin tissage de la vie et de l’œuvre de la poète Louise Glück, Prix Nobel de littérature 2020, que nous sommes conviés ici dans l’édition bilingue de trois de ses recueils. Je dis cela car je trouve important cette coalescence de la poétesse et de son écriture, et déterminant pour ma lecture. Il s’agit d’une découverte car peu de traductions sont accessibles en français (j’ai d’ailleurs publié une traduction faite avec Michaël Taugis d’un de ses poèmes, pour la revue L’Hôte). Et cette vie en sous-texte qui gagne en grâce poétique grâce à un fond matériel et vivant, tend les poèmes, les étoffe, leur donne un mystère. Donc, des références mythologiques, ou bibliques, ou encore ici ou là des petits faits de la vie quotidienne. En tout cas, quelque chose altère la prosodie, laquelle confrontée à du connu et du surprenant, se dilate et se fait meuble, profonde et englobante. Cette littérature ne se conçoit que faite de ce mélange de la vie et de l’art, et sans doute de l’art et de la vie. Le mystère : un tintinnabulement grâcieux et prenant. Cette existence sonne comme point de mire, comme punctum.

Hymne, Ayn Rand (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Jeudi, 11 Janvier 2024. , dans USA, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Les Belles Lettres

Hymne, Ayn Rand, Les Belles Lettres, septembre 2023, trad. anglais (USA) Catherine Bonneville, 108 pages, 9,90 € Edition: Les Belles Lettres

 

Hymne possède la limpidité, l’efficacité et la force des grandes paraboles. Publié en 1938, alors que l’Europe préparait activement sa deuxième tentative de suicide (la troisième est en cours actuellement), ce mince volume vient enrichir la galerie des contre-utopies, ou dystopies, parmi Le Meilleur des mondes1984Nous autres, ou, bien plus ambigu, La Cité et les Astres d’Arthur C. Clarke, dont on peut se demander s’il n’a pas subi l’influence, directe ou indirecte, d’Ayn Rand.

L’univers (au sens étroit) dans lequel évolue le personnage principal, Égalité 7-2521, n’est en effet pas sans analogies avec la Cité de Diaspar. Alvin et Égalité 7-2521 vivent dans le monde post-apocalyptique d’une cité close, d’où nul n’a le droit ni même l’idée de sortir, car le monde extérieur est perçu comme maléfique, dangereux et tabou. Mais le Conseil mondial d’Ayn Rand n’est pas l’ordinateur omnipotent qui régit la vie de Diaspar et le monde dans lequel Égalité 7-2521 est appelé à inscrire sa courte vie n’est pas fondé sur la technologie. Hymne décrit une pure utopie communiste, une expression à la limite du pléonasme, comme eût dit Julien Freund, qui voyait dans le communisme l’utopie la plus dangereuse jamais secrétée par l’esprit humain.