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Articles taggés avec: Ossorguine Marc

Girafes, Pau Miró (2ème article)

Ecrit par Marc Ossorguine , le Mercredi, 01 Juillet 2015. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Théâtre, Espaces 34

Girafes, 2015, traduit du catalan par Clarice Plasteig Dit Cassou (Girafes, 2009), 101 pages, 14,60 € . Ecrivain(s): Pau Mirò Edition: Espaces 34

 

Le théâtre, c’est a priori fait pour être joué et pour être vu, regardé. Mais cela peut aussi se lire. Une lecture qui est un autre plaisir pour le lecteur en même temps qu’une épreuve pour le texte qui se livre nu, dépouillé des trouvailles du metteur en scène comme de l’habileté des acteurs, ou même simplement de leur présence physique, du grain et de l’épaisseur de leurs voix et de leurs corps. Il y a des textes qui ne sont alors pas toujours à la hauteur du spectacle, et pas seulement des réalisations qui ne savent pas donner une vraie vie au texte. Il y en a d’autres qui peuvent vivre leur propre vie, tel celui-ci.

Pau Miró, lui, n’est pas seulement auteur de textes pour le théâtre, il est aussi comédien, metteur en scène et fondateur d’une compagnie. Trois de ses pièces, qui forment une trilogie « animale », ont été traduites du catalan et publiées par Espaces 34 – un éditeur installé près de Montpellier qui poursuit depuis quelques années un travail remarquable, nous faisant découvrir de nouvelles voix du théâtre d’aujourd’hui, tant françaises qu’étrangères. Buffles, Lions et Girafes sont les trois étapes de cette trilogie qui a été récompensée en 2009 (Prix du meilleur texte théâtral de la critique théâtrale de Barcelone). Nous découvrons ici la plus récente.

Régiment de femmes, Clemence Dane

Ecrit par Marc Ossorguine , le Vendredi, 26 Juin 2015. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Iles britanniques, Roman, Belfond

Régiment de femmes (Regiment of Women), septembre 2014, traduit de l’anglais par Jeanne Fournier-Pargoire, 487 pages, 19 € . Ecrivain(s): Clemence Dane Edition: Belfond

 

 

Il peut paraître difficile de se plonger dans la lecture de ce Régiment de femmes car il nous impose un saut dans le temps qui n’est pas que celui de l’imaginaire, mais aussi celui de la lecture même, de son rythme. Première œuvre de son auteur, alors âgée de 29 ans, publiée en 1917, donc il n’y a pourtant pas si longtemps au regard de l’histoire de la littérature, l’écriture et le récit s’y déploient en effet dans une dynamique et une durée qui peuvent nous prendre au dépourvu, demandant au lecteur de trouver dans sa propre lecture un tempo et un phrasé qui appartiennent sans doute plus à la musique classique de ce temps qu’au rap ou à d’autres rythmes contemporains. Une difficulté de lecture qui est celle qu’un lecteur du XXIe siècle peut éprouver à la lecture de La Recherche du temps perdu, même si ici, la longueur du récit n’est pas en cause.

N’appartenir, Karim Miské

Ecrit par Marc Ossorguine , le Mardi, 16 Juin 2015. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Biographie, Récits, Viviane Hamy

N’appartenir, mai 2015, 83 pages, 12,50 € . Ecrivain(s): Karim Miské Edition: Viviane Hamy

N’appartenir est un livre très autobiographique, mais en même temps il touche à des questions qui nous concernent tous plus ou moins dans un monde mondialisé et inégalitaire, où chacun doit se débrouiller pour trouver sa place et résoudre une partie des paradoxes qui l’entourent. La philosophie et la sociologie critiques attirent notre attention depuis un moment sur ce phénomène : dans nos sociétés inégalitaires et mondialisées, la question de la reconnaissance, et donc de l’identité et de l’appartenance, sont devenues des questions centrales pour la plupart de nos sociétés. Le métissage, quant à lui n’est pas une question bien neuve, et le fait qu’elle s’impose de plus en plus comme la norme, l’ordinaire de chacun d’entre nous, ne la rend ni plus simple ni plus facile à vivre, même dans ce même « monde mondialisé ». Surtout dans ce monde où la réalité et la peur de l’ouverture génèrent aussi les plus redoutables fermetures.

Il faut dire que les paradoxes du métissage, Karim Miské les a connus avec une certaine radicalité. Un père mauritanien, souvent absent, diplomate tiers-mondiste et anticolonialiste, puis sympathisant déclaré du Front Polisario, et une mère française issue de la France que l’on dit profonde, catholique, mais militante communiste jusqu’au bout des ongles qui fera découvrir les « merveilles » du communisme albanais à son fils.

Lisbonne mélodies, João Tordo

Ecrit par Marc Ossorguine , le Mercredi, 10 Juin 2015. , dans La Une Livres, Actes Sud, Les Livres, Critiques, Langue portugaise, Roman

Lisbonne mélodies (O Ano Sabático), mai 2015, traduit du portugais par Dominique Nédellec, 240 pages, 22,50 € . Ecrivain(s): João Tordo Edition: Actes Sud

 

Malgré son titre français, ce n’est pas de la ville de Lisbonne que nous parle ce roman, mais de musique et de création, et encore plus d’identité. Cela commence avec le retour au pays d’un musicien de jazz qui s’est découvert sur le tard une passion pour la contrebasse. Ses armes de jazzman, il les a faites à Québec où il a aussi appris la dépendance à l’alcool. Après quelques années où il s’est perdu lui-même, laissant derrière lui musique et amours rêvés, Hugo revient à Lisbonne, accompagné de son encombrante contrebasse dont il a juré qu’il n’en jouerait plus. Mais revenir là où on ne l’attend pas, où il n’a plus vraiment de place, c’est prendre des risques impossibles à imaginer. Comme celui de rencontrer son double, qui, lui, semble avoir « réussi » : le pianiste de jazz Luis Stockman, qui au cours d’un concert va le trahir, alors qu’ils ne se connaissent pas, en donnant à entendre la mélodie, le thème secret qui est comme l’âme du contrebassiste. Un thème qui le hante et qu’il n’a jamais pu achever et que l’autre lui a « volé ». Un autre qui pourrait être le frère jumeau qu’il aurait pu avoir mais qui n’a jamais vécu… Un frère par les yeux duquel il va apprendre ou réapprendre à voir le monde. La vie. Sa vie.

Antonia, Gildas Girodeau

Ecrit par Marc Ossorguine , le Mercredi, 03 Juin 2015. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Roman

Antonia, éd. Au-delà du raisonnable, mars 2015, 250 pages, 18 € . Ecrivain(s): Gildas Girodeau

 

Les romans qui tirent vers le noir et du côté du polar sont souvent ceux qui nous en apprennent le plus sur le monde tel qu’il est ou tel qu’il a été, voire tel qu’il pourrait être ou sera. Le dernier opus de Gildas Girodeau n’échappe pas à cela et, en outre, c’est un roman dont le personnage principal emporte le lecteur, le séduisant tout en l’amenant à réfléchir au monde et à sa place dans le monde.

Antonia appartient aux fameuses Brigades rouges, alors que l’Italie entre dans les terribles « années de plomb », celle où une démocratie mal en point sera le théâtre des actions armées, violentes (on commence alors à parler plus systématiquement de terrorisme), ciblées ou aveugles, menées par les extrêmes politiques. Mais Antonia, celle que les services de police ont surnommée la « pistolera », parvient à échapper au « coup de filet » qui démantèle son organisation et l’amène à prendre le large sans tarder, à se fondre dans une autre identité, à changer de pays. Toutes choses qu’elle fait avec une détermination et une intelligence qui vont lui permettre de démarrer une autre vie, ailleurs.