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Béton armé, Philippe Rahmy

Ecrit par Marie-Josée Desvignes , le Samedi, 22 Août 2015. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Récits, La Table Ronde

Béton armé, septembre 2013, 208 pages . Ecrivain(s): Philippe Rahmy Edition: La Table Ronde

 

Ce qui frappe tout de suite et fascine, à la lecture du livre de Philippe Rahmy, Béton armé, c’est la force de vie et de mort qui parcourt le texte. Vivre, mourir, survivre et voyager, toujours au bord, d’une rive à l’autre. Entre souvenirs, plongée intérieure, exploration extérieure, le voyage au cœur de la ville devient un voyage au centre de soi-même dans des descentes infernales.

L’écrivain, atteint de la maladie des os de verre n’a jamais voyagé, « Je suis né sans espoir de guérison ». Il a accepté pourtant une invitation pour une résidence d’écriture à Shanghai, et c’est une véritable aventure qui nous attend, et qui l’attend, d’autant que dans son cas, « voyager aussi loin [lui] donne un aperçu de ce que serait vivre toujours ».

Un voyage dans la ville et dans la vie, oui, un défi, la vie contre l’immobilisme, contre la mort. « [Le] voici à Shanghai, un grand vide dans une enveloppe de béton armé », un voyage dans une mégalopole, au centre de lui-même, au cœur même de l’écriture, « l’écriture, traduction du silence intérieur, la ville, affirmation bruyante du monde ». Car il s’agit bien de « voyager à travers le langage comme à travers le paysage ».

Poèmes du visage derrière la fenêtre, Louis Raoul

Ecrit par Marie-Josée Desvignes , le Samedi, 11 Juillet 2015. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Poésie

Poèmes du visage derrière la fenêtre, Ed. de la Crypte, coll. Les voix de la Crypte, 2014 . Ecrivain(s): Louis Raoul

 

Dans les Poèmes du visage derrière la fenêtre, de Louis Raoul, domine l’élément eau, eau du ciel et des pluies de printemps, eau mouvante, transformatrice, eau qui meurt/ avec le souvenir d’une pierre d’enfance/ ou d’une grenouille de Bashô. La fenêtre ou la vitre, motif récurrent dans chaque poème, comme autant de reflets dans l’eau de ce visage en attente, celui du poète qui contemple depuis l’autre côté de la vitre, au matin ou le soir, d’une saison l’autre, perdu dans la chanson de l’air, dans l’attente, la solitude des jardins :

D’ici

Je vous devine

Femme à venir

vous n’avez d’enfant

que la parole

je vous devine

cachée sous l’orage

Le temps d’ici, Marilyse Leroux

Ecrit par Marie-Josée Desvignes , le Vendredi, 03 Juillet 2015. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Poésie, Rhubarbe

Le temps d’ici, mars 2013 . Ecrivain(s): Marilyse Leroux Edition: Rhubarbe

 

Marilyse Leroux est une poète ailée et zélée. Sa poésie nous entraîne, nous envole : tu entres au cœur de l’espace comme dans un nid où tu poserais tes ailes. L’ouverture du recueil en témoigne. Légère, elle est, légère elle nous veut. Au monde que l’on sait difficile, elle en substitue un autre que l’on peut découvrir, nous dit-elle, habitable. Ce monde qui n’est autre que celui de la poésie, on peut le faire sien, si on sait regarder. Marilyse nous invite ainsi à ouvrir les yeux sur ce monde vaporeux et fluide où se mêlent au bleu du ciel et de la mer, les couleurs du temps.

Elle n’hésite pas pour cela à convoquer le ciel, les oiseaux et les arbres, leurs rires clairs, leur langage vivant. Le ciel s’amuse, les arbres rieurs nous donnent à voir ce qu’elle ressent, nous unissent à son souffle, nous entraînent, pour que le poids de nos ombres sur la terre soit la balance du monde. Marilyse est dans sa poésie comme elle est dans la vie, ouverte à l’autre, disponible, sensible, en partage d’amitié et de poésie.

L’arbre de vie, Raphaël Mérindol

Ecrit par Marie-Josée Desvignes , le Vendredi, 26 Juin 2015. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Arts, Poésie, Cardère éditions

L’arbre de vie, juin 2013, 93 pages, 15 € . Ecrivain(s): Raphaël Mérindol Edition: Cardère éditions

 

L’arbre de vie de Raphaël Mérindol, illustré magnifiquement par Pierre Cayol, Christian Jauréguy, Jean-Pierre Peransin et Le Zhang, est un petit bijou et une louange, un véritable hymne dédié à l’arbre, l’arbre en nous, celui qui En tout lieu, […] a le singulier pouvoir de donner des nouvelles du silence et à tous les arbres, de toute espèce. Qu’ils soient de l’automne ou de l’hiver, sous leur cape de brume, ils sourient. Qu’ils soient cyprès au cœur pur, cèdre centenaire, platane, poirier (tant aimé de la mère) ou pin sylvestre, ils sont habité(s) d’amour et chaque jour le ciel renouvelle la garde-robe de sa cime ajourée. Toujours là, présent à nos silences, à nos deuils, à nos solitudes, prêt à nous consoler, prodige bienveillant qui porte nostalgie et espoir, l’arbre (de vie) continue nos espoirs, perpétue nos mémoires endeuillées.

Dans ce recueil de belle facture où la trame même est en majesté (celle de l’arbre), se déploie une écriture arborescente, tantôt en ramées dispersées, brèves et légères comme des haïkus accolés à la douceur des illustrations, tantôt en longs feuillages qui descendent vers le sol, déployant une prose qui s’abandonne et se confie. Et, là… soudain…

Le Corps noir du soleil, Amina Saïd

Ecrit par Marie-Josée Desvignes , le Samedi, 20 Juin 2015. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Poésie, Rhubarbe

Le Corps noir du soleil, décembre 2014, (calligraphie Hassan Massoudy), 90 pages, 11 € . Ecrivain(s): Amina Saïd Edition: Rhubarbe

 

La vie d’Alexandre Le Grand a été si exceptionnelle qu’elle fait partie des mythes de l’Antiquité. Convaincu très jeune par sa mère qu’il était descendant des Dieux, il accomplira un parcours de conquérant unique, allant de conquêtes en conquêtes de la Grèce aux Indes. Dans ce très beau recueil, intitulé Le Corps noir du soleil, Amina Saïd nous fait revivre l’épopée d’Alexandre Le Grand, alors que celui-ci s’apprête à partir pour l’autre monde (étroite sera la tombe quand j’y serai enseveli), se rejoue alors sous nos yeux le voyage de sa vie, son parcours semé d’épreuves. La poète s’exprimant en je nous entraîne dans l’aventure et nous arpentons avec ce cavalier les innombrables paysages aux couleurs sublimées par la variété d’une nature luxuriante propre à ces pays de sable et d’ocre. Récit d’un passage de l’ombre à la lumière, mais aussi récit onirique, récit de la naissance, récit sans fin, comme le désir, le silence ou la mort, mais surtout quête initiatique afin d’aller à la rencontre de soi ou de l’autre en soi, comme pour donner un sens à l’absurde du monde, nous dit-il, en quête d’absolu donc. Cette épopée historique aux intonations lyriques de l’aventure humaine nous rappelle que la vie est brève comme une manière de rêve. Dans l’ignorance du parcours pour accéder à la lumière, le conquérant avance toujours sans peur.