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Les Livres

Matignon la nuit, Nicolas Idier (par Philippe Chauché)

Ecrit par Philippe Chauché , le Mercredi, 11 Septembre 2024. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Plon

Matignon la nuit, Nicolas Idier, Plon, août 2024, 176 pages, 19 € . Ecrivain(s): Nicolas Idier Edition: Plon

 

« Je suis une sous-plume, comme il y a des sous-mains. Un bout de plume de demain, un vestige de plume. Une ou deux barbules, à peine. Je n’ai presque rien pesé dans l’organisation sans faille du cabinet du Premier ministre. Mon départ se fera sans un tremblement, sans le moindre frémissement » (Matignon la nuit, 17:00).

Cet éblouissant roman est dédié À toutes les plumes, celles qui officient dans l’invisible auprès des ministres et du Premier d’entre eux, celles qui se glissent dans ce roman, plumes romanesques pour la plupart, plumes françaises et chinoises, affûtées et anonymes parfois. Nicolas Idier, qui fut l’une des plumes du Premier Ministre Jean Castex, romance cette expérience, cette aventure unique entre les murs de Matignon – Matignon est un peu ma Cité Interdite, mon voyage intérieur.

Swifts, Camille Loivier (par Marc Wetzel)

Ecrit par Marc Wetzel , le Mercredi, 11 Septembre 2024. , dans Les Livres, Les Chroniques, La Une CED, Poésie

Swifts, Camille Loivier, éditions isabelle sauvage, 2021, 76 pages, 16 €

 

(Je n’ai eu vraiment connaissance de l’œuvre de Camille Loivier – née en 1965 – que tout récemment, lors d’un festival de poésie où son éditeur m’a, utilement, mené à ce livre paru en 2021 – mais qui me paraît suffisamment authentique et fort pour en oser ici un mot tardif)

« Swifts » : les martinets, en anglais. On connaît la vitesse concertante de leurs sifflements (ils sont si évidemment grégaires qu’un martinet solitaire ne peut qu’être malade ou égaré), leurs pattes naines (qui s’agrippent aux parois mieux qu’aux fils ou aux branches), leur haine de l’architecture moderne (seuls les vieux immeubles – ou carrément les ruines – offrent leurs trous de première intention, où foncer nicher), leur régime strictement insectivore (leur bec insignifiant n’est qu’un ouvre-gosier, qui gobe tout ce qui volète au vent ou pend à son fil) : le martinet vit et vole comme ce qu’il mange, étant simplement un insecte un peu plus massif et malin que ceux qu’il happe. Comme les mots des poètes ressemblent, à force d’expression, aux vives sensations qu’ils chassent, condensent et relancent.

Revue Apulée, #9 Art et Politique, Collectif (par Yasmina Mahdi)

Ecrit par Yasmina Mahdi , le Mardi, 10 Septembre 2024. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Revues, Zulma

Revue Apulée, #9 Art et Politique, Collectif, éditions Zulma, mai 2024, 416 pages, 25 € Edition: Zulma

 

Création et pouvoir

Le numéro 9 de la Revue Apulée, riche de près de 90 contributrices et contributeurs, aborde ce qui fait lien entre l’art comme « invention permanente (ou pour le dire autrement work in process) et le politique, lieu [qui] n’échappe guère aux ressacs de l’histoire » [Hubert Haddad]. Et ce, en dépit d’une société contemporaine, travaillée et minée par l’« explosion des typologies identitaires, assignations sexuées, biologiques, communautaristes, ethniques [et de la] subite profusion de micro-intégrismes claniques » [Haddad]. La Revue Apulée propose un panorama des 20ème et 21ème siècles, du point de vue historique, anthropologique et esthétique. Ce qui semble transparaître ici, c’est le concept cher à Jean-Paul Sartre, celui de « littérature engagée », ou plus précisément de l’écrivain engagé, conscient, et le plus lucide possible ; l’engagement vu comme une obligation morale définissant une éthique dans laquelle l’homme est toujours responsable de lui-même.

Césarine de nuit, Antoine Wauters (par Murielle Compère-Demarcy)

Ecrit par MCDEM (Murielle Compère-Demarcy) , le Mardi, 10 Septembre 2024. , dans Les Livres, Les Chroniques, La Une CED, Poésie

Césarine de nuit, Antoine Wauters, Cheyne Éditeur, Coll. Grands Fonds, 2012, 128 pages

 

Et si Césarine de nuit, en même temps que ce livre constitue un réquisitoire contre le monde normatif qui impose ses codes et ses lois à des individus non conformes et non dociles à son pouvoir d’oppression, était, par le truchement d’un conte cruel initiatique, un hymne formidable à la Liberté individuelle face à tout Système qui la broie ? Le choix de deux enfants, en l’occurrence de jumeaux abandonnés à leur destin, comme protagonistes de ce périple d’une innocence martyrisée est largement symbolique, puisqu’ainsi que l’affirme Jean-Pierre Siméon en quatrième de couverture : « En ces enfants, c’est le désir qu’on assassine ».

« La Collection Grands Fonds accueille, en marge de tout genre littéraire codifié, des pages plus secrètes, témoins d’une vie qui s’inquiète et s’interroge », précise l’éditeur.

L’Enchanteur, René Barjavel (par Didier Smal)

Ecrit par Didier Smal , le Lundi, 09 Septembre 2024. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Folio (Gallimard)

L’Enchanteur, René Barjavel, Folio, 1987, 480 pages, 9,90 € Edition: Folio (Gallimard)

 

Depuis plus de neuf cents ans, Merlin hante la littérature et l’imaginaire occidentaux, avec juste un passage à vide durant la Renaissance – mais un retour en force depuis l’époque romantique. Aujourd’hui encore, séries télévisées, parodiques ou non, et films s’inspirent de cette figure du magicien conseiller des rois et prophète. Et si l’influence de Merlin sur Gandalf, le magicien de Tolkien, est diffuse (Tolkien s’inspirait d’un fonds nordique plutôt que celtique), elle est évidente sur Dumbledore, le directeur de Poudlard, l’école de magie créée par J.K. Rowling pour sa saga Harry Potter. Bref, Merlin est une figure omniprésente, comme un point de repère dans l’histoire des histoires racontées.

Il était logique que Barjavel, en 1984, pour ce qui va s’avérer être son avant-dernier roman, choisisse de s’attacher à la destinée de cette figure emblématique entre autres d’un rapport fort à la nature, ce Merlin qui en vient à se fondre dans la forêt, devenant « bois vif, écorces, racines, feuilles vertes et feuilles mortes, graines germées, sèves montantes, odeurs mouillées, couleurs lavées que le soleil revenu chauffait et caressait ».